La deuxième semaine du mois de décembre 1960 a vu se dérouler d'importantes manifestations populaires à travers la plupart des agglomérations urbaines du pays. A l'occasion de ces manifestations, on ne peut plus spontanées, les populations ont clamé leur rejet de toutes les combinaisons inspirées par les maîtres de la colonisation et leurs alliés, et leur volonté de continuer la lutte jusqu'à l'indépendance totale, qui devait concrétiser leur aspiration profonde à la liberté, marquant ainsi leur fidélité absolue à la proclamation du 1er Novembre 1954. C'était la meilleure contre-offensive opérée par le peuple d'Algérie en réaction aux opérations «Jumelles», «Sauterelles» et autre «Emeraude» qui avaient quelque peu malmené l'ALN de l'intérieur pour des raisons faciles à comprendre. Ce fut le souffle de ces journées de décembre qui ébranlèrent les positions antérieures du général De Gaulle sur le devenir de l'Algérie. Ce furent également ces manifestations qui ouvrirent les yeux à Messali Hadj et mirent fin à son entêtement: les Algériennes et les Algériens venaient de défendre face à la mitraille les mains nues leur volonté d'indépendance totale et leur attachement au FLN. Et c'est surtout en raison de cela que, le 22 janvier 1961, c'est-à-dire, moins de quarante jours après les événements de décembre, Messali se retira publiquement de la course à travers une conférence de presse et reconnut, à sa manière certes, le FLN comme représentant exclusif du peuple algérien. Il était certain que ces hommes et ces femmes de Décembre 1960 ainsi que tous ceux qui ont fait leur la proclamation du 1er Novembre 1954, ne voyaient, à travers leur rêve, ni les droits de l'Homme ni la démocratie, mais simplement la Liberté à laquelle ils ont tout sacrifié. Depuis une vingtaine d'années, on clame tous les jours sous le ciel d'Algérie les multiples vertus de la démocratie et des droits de l'Homme, pendant que le mot liberté risque de devenir tabou. Est-ce le châtiment? Dieu seul le sait.