Dalila est le genre de filles ayant connu une déception dans un premier lit. Elle refait sa vie. Le «mot» est mis au pluriel... Les salles d'audiences sont pleines à craquer. Toutes les sections, de celles des «non-détenus» au «social» en passant par le «civil» et «statut personnel». Cette dernière, par exemple, rassemble des conjoints venus aux convocations ou encore des soutiens des moments difficiles lors des audiences. Me Abdelmalek Azzouz casse la baraque. Le divorce frappe. Il frappe fort, c'est un fléau quotidien. Un des tribunaux de la cour d'Alger (il y en a cinq !) a enregistré durant le premier semestre 1998 près de mille divorces prononcés, c'est dire. Dalila s'était mariée à dix-sept ans. Cela n'a pas duré. Une année. Six mois si l'on ôtait les nuits. Deux, si l'on ôtait les heures et les heures des scènes de ménage, les coups de gueule, les bouderies avec déménagement chez les beaux-parents. Dix-huit mois après, se morfondant avec son statut de «divorcée» difficile à assumer, Dalila tue le temps à la cuisine, le ménage, les courses au marché d'à côté. Un beau matin, Farouk O., un cadre financier, s'avance au numéro 27, de la rue D. R... tape à la porte et attend. C'est Dalila qui ouvre. Un frisson parcourt son dos, mais elle a chaud. Le «monsieur» demande le papa qui n'est pas là. Avant qu'il ne la salue, il la fixe des yeux. Le courant passe. Quelques jours après, c'est la fête avec son cortège de youyous, de chants et de danses d'un défilé à travers la capitale. «Vingt jours après la nuit de noces, dira plus tard la dame, à vingt ans, je savais que le nouveau mari n'avait rien à envier au premier. Grincheux, homme à histoires, amateur de Bacchus, cupide et surtout méprisant». Le jeune homme, lui, est catégorique: «C'est une malade. Elle est une véritable maniaque. Mais ce qui tue en elle, c'est le gaspillage», se plaint-il en affirmant que la vie avec cette femme est impossible. Devant le président de la section statut personnel, le couple «vide son sac». Chacun déversera les pires accusations. La vie intime est abordée. Le juge écoute puis demande au mari s'il était prêt à réintégrer son épouse. «Jamais. Même si je devais crever. Elle est irrécupérable», martèle-t-il alors que Dalila pleure pour la première fois au cours de cette troisième audience. La mise en examen est décidée. Plus tard, le divorce est prononcé aux torts de Fadhel. Dix mille dinars à verser à titre de dommages et intérêts et deux cent mille autres en guise de pension de mouta'a. La retraite légale (Idda) a été fixée à cinquante mille dinars, telles ont été les demandes de la femme qui n'a pas tout eu. C'est même loin des demandes. Une déception de plus pour Dalila qui ne croit plus qu'en... Dieu!