«Les problèmes de la presse et des journalistes proviennent des groupes d'intérêts politiques, économiques, financiers et criminels.» Le chef de l'Etat, dans un message adressé à la corporation journalistique, à l'occasion de la Journée internationale de la presse, a trouvé matière à s'attaquer à la corruption qui gangrène l'administration. Source d'une multitude de problèmes dénoncés à longueur de colonnes. Le président tout en vilipendant ceux qui en sont à l'origine, a fait le plaidoyer des institutions nationales estimant qu'elles «ne sont pas contre la liberté de la presse. Les problèmes de la presse et des journalistes proviennent des groupes d'intérêts politiques, économiques, financiers et criminels qui poussent les journalistes à contrevenir à la loi et à s'attaquer aux gens. Ceci ne signifie pas que la presse doit taire les déviations des institutions et les dysfonctionnements des autres pouvoirs publics». Si le président défend les institutions, il ne sera pas indulgent avec la pratique journalistique. Il a, à ce propos, tracé les lignes rouges concernant l'exercice de la profession. Ce qui laisse transparaître la volonté d'organiser la presse de façon à éviter ce qui s'est produit lors de la campagne pour les présidentielles en avril 2004. La loi sur l'information qui tarde à venir devra, et c'est la lecture que l'on peut faire si l'on décode soigneusement le message du président, contenir les nouvelles directives avec des garde-fous que la corporation est tenue de respecter et de ne pas transgresser. Ainsi, le président qui reconnaît le rôle déterminant de la presse dans la vie quotidienne et son impact sur l'opinion publique a estimé que «notre célébration aujourd'hui de la presse et de la liberté de son exercice n'est pas seulement celle d'une profession car, au-delà de l'aspect strictement professionnel, il s'agit également de rendre hommage à une fonction indispensable à la société». Et d'ajouter «même si nous rendons, par cette célébration, hommage à la famille de la presse algérienne qui oeuvre, depuis que l'Algérie s'est engagée, dans la voie du pluralisme politique, sans relâche, aux côtés des autres composantes politiques, sociales et culturelles de la société, à l'édification et à la propagation de la culture de la pratique démocratique dans tous les domaines et sur tous les plans». Cependant, il a signifié clairement que la pratique journalistique doit se plier au respect de l'éthique et de la déontologie. Il a indiqué en outre que «le véritable sens de la liberté et de l'honnêteté de la presse ne donne pas le droit aux journalistes de s'ériger en juge et partie, mais doit conduire à habiller leurs pratiques quotidiennes de valeurs morales, d'idéaux et principes de la société. Ils doivent oeuvrer, de toutes leurs forces, à informer les citoyens de façon sincère, juste et objective». Des propos qui ne prêtent à aucune équivoque et qui renseignent sur le contenu du texte qui dort dans le tiroir du ministère de tutelle et qu'on qualifie de drastique du point de vue des dispositions et des articles qui devront reconfigurer le paysage médiatique. Les journaux sont sommés de se soumettre à une certaine discipline inexistante par le passé du moins depuis le début de l'aventure de la presse indépendante née dans le tumulte du pluralisme après le 5 Octobre 1988. La presse qui a joué jusqu'à présent le rôle de contre-pouvoir et à un certain moment a été partie prenante dans les joutes politiques a de fortes chances de se retrouver privée de cette liberté dont elle jouissait avant le 8 avril. Une liberté jugée absolue par le premier magistrat du pays qui exhorte les journalistes «à se consacrer, avant toute chose, au service de leur société, de ne point dévier de la vérité et de ne pas la dénaturer». En mettant les points sur les «i», il a fait comprendre que dorénavant «la poursuite de la promotion d'une information pluraliste, honnête et indépendante est l'idéal auquel doivent contribuer les pouvoirs publics en prodiguant l'aide nécessaire aux organes de presse sérieux et utiles». Evoquant les martyrs de la profession, il a rendu hommage à «ceux qui ont milité, par leurs voix et leurs plumes, à la libération de l'Algérie et à ceux parmi les journalistes, hommes et , assassinés par le terrorisme sauvage». Le président a ainsi présenté sa vision de la future presse ou du moins celle qui s'adaptera à la nouvelle donne et qui travaillera dans «une société soumise à la suprématie de la loi». En faisant un retour sur l'histoire, il a passé en revue les étapes «franchies par l'Algérie, depuis l'indépendance, sur la voie de la rationalisation de sa presse, et sa mobilisation au service de son développement et son progrès, il apparaît clairement que le pluralisme médiatique n'a eu de cesse de prouver véritablement son utilité pour la société et sa capacité à réunir les conditions nécessaires à la promotion, avec responsabilité, du rôle médiatique et éducatif de la presse nationale au service exclusif de la nation et du peuple algériens». Pour lui , la corporation, qui lui semble sans repères et désorganisée, doit se structurer dans «des organisations professionnelles à même d'assurer un travail sérieux et utile en vue de promouvoir le système médiatique pour le mettre au diapason des règles professionnelles qui lui permettraient de jouer pleinement son rôle dans la réalisation d'un projet social moderne». La survie de la presse dépend du degré d'intégration dans la nouvelle stratégie d'information qui mise sur la responsabilisation et la rationalisation de la presse loin de la passion. Pour le président, les pouvoirs publics doivent «encourager la création de davantage de publications dans le sens de la garantie du service public dans tous les genres d'information, en assurant l'expression des tendances de l'ensemble des catégories sociales, en satisfaisant leurs besoins en information, en levant tous les obstacles qui empêchent la transmission du message médiatique et en assurant l'accès du public à l'information». En guise de conclusion, il a exprimé sa certitude que «la jeune presse algérienne est en phase de maturité et de maîtrise pour accomplir sa noble mission au service de l'Algérie et de son peuple. J'espère sincèrement qu'elle réussira à réaliser les espoirs que nous fondons en elle».