La chanteuse est retournée dans sa ville natale, il y a une semaine, clouée sur un fauteuil roulant pour mourir auprès des siens. Après une lutte contre la maladie qui a duré plusieurs années, la chanteuse Sabah Saghira s'est éteinte, hier, à Oran. La chanteuse est retournée dans sa ville natale, il y a une semaine, clouée sur un fauteuil roulant pour mourir auprès des siens. Benthabet Fatima venait tout juste de quitter le monde de l'enfance quand elle fut remarquée par feu Ahmed Wahbi, qui devint pour de longues années son mentor. Le maître de la chanson oranaise, subjugué par le timbre de la voix de la jeune Fatima, lui donna le nom de Sabah Saghira, une façon pour lui de prédire à la jeune chanteuse le même itinéraire que celui de la diva libanaise. Ses premiers pas dans la chanson, elle les fit sous la direction de Wahbi, de feu Saïm El Hadj et de Hadj Maghni qui avait couvé lui aussi des voix prometteuses de la chanson oranaise comme Souad Bouali. Sabah Saghira, gagnera ses lettres de noblesse avec la chanson El Khoumri, un hymne à la beauté du beau brun algérien et une invite adressée aux jeunes hypnotisés par le chant des sirènes d'un étranger trompeur. Les paroles qui constituaient un aveu lancé par une jeune femme à l'adresse de sa mère. Un aveu dans lequel elle reconnaissait qu'elle ne concevait sa vie qu'avec El Khoumri ; chanté par Sabah Saghira avec sa voix suave, l'hymne ne pouvait qu'accrocher. Ayant foulé dans sa tendre enfance les planches du théâtre, Sabah fut sollicitée par Oukaci pour camper le rôle d'une jeune chanteuse débutante tombée dans les griffes d'un producteur roublard qui abusera d'elle. Le producteur, Sid Ali Kouiret, terminera le film, poignardé avec une paire de ciseaux par l'innocente chanteuse. C'était en 1975 et le film projeté par l'Entv avait connu un franc succès. Mue d'une énergie débordante, Sabah Saghira ne tenait jamais en place. Elle a fait plusieurs fois le tour d'Algérie. Elle avait chanté pour les travailleurs des bases pétrolières du Sud. Elle avait bercé les enfants des écoles de villages socialistes. Elle s'était produite devant les appelés des casernes. Elle a chanté à l'étranger. Elle ne tenait jamais en place. Ces dernières années, terrassée par la maladie, elle a perdu de sa verve pour se retrouver clouée dans des lits d'hôpitaux. Elle a souffert en silence, seule, jusqu'à ce que Mme la ministre de la Culture lui délivre une prise en charge pour des soins appropriés. Malheureusement, le mal avait eu raison de son corps frêle. Mercredi dernier, à son retour d'Alger par avion, elle était clouée dans un fauteuil roulant. A des proches, elle avait confié qu'elle voulait vivre pour réaliser un voeu, celui de se rendre aux lieux saints de l'Islam. Hier, elle s'est éteinte, laissant la scène oranaise à la recherche d'une voix qui pourrait reprendre le refrain interrompu de Ya el khoumri ya ma.