Selon ses actionnaires, des dispositions seront prises pour sauver le titre. La faucheuse est arrivée presque silencieuse pour signer l'arrêt de mort du quotidien La Tribune. Comme peuvent l'être des personnes en excellente santé victimes d'accidents de la circulation ou d'une mort instantanée provoquée par un arrêt cardiaque. Une disparition subite, inattendue qui accouche d'un drame. Le drame? La Tribune le connaît. Deux de ses emblématiques directeurs nous ont quittés. Sans crier gare. Kheireddine Ameyer, un seigneur de la plume, comme seule l'Algérie sait les enfanter, fils de la Casbah, le chaâbi d'El Anka dans l'âme. Une âme brillante de journaliste qu'il a décidé de faire taire lui-même un jour de juin de l'an 2000 comme pour nous dire qu'il était seul à décider de son destin. Sa disparition tragique a semé l'émoi à travers la corporation. L'Algérie s'est retrouvée subitement orpheline d'un de ses plus brillants hommes de plume. La presse venait d'être privée de son Petit Prince. Personne ne se doutait que près de dix-sept ans plus tard La Tribune et le monde de la presse écrite allaient être endeuillés encore une fois. La mort de son successeur allait être annoncée de façon aussi soudaine. Brutale. Hassen-Bachir Cherif décède le 4 juin 2017 à l'âge de 66 ans. En pleine force de l'âge. Il avait tout donné et avait encore énormément à apporter à un journal qui s'était taillé une place à part dans le monde de la presse en Algérie: Il était notamment très apprécié des intellectuels. Le talent de Bachir allait lui faire défaut. La Tribune allait perdre pour la seconde fois son Homme. La boussole venait de se détraquer. L'annonce de l'arrêt de sa parution le 9 août par ses deux actionnaires, Cherif Tifaoui et Djamel Djerrad, sonnait la fin d'une belle aventure perturbée à trois reprises avec la disparition de trois de ses membres fondateurs: Kheireddine Ameyar, Baya Gasmi et Hassan Bachir-Cherif. Le motif évoqué est celui de dettes faramineuses que le journal ne serait pas en mesure d'honorer. Le collectif du journal refuse la mise à mort du titre et appelle tous «les responsables, à tous les niveaux et ayant la moindre once de pouvoir décisionnel, à réagir pour trouver une ou des solution(s)-un échéancier pour le paiement des dettes par exemple- qui permettraient au journal de continuer à jouer son rôle de média et de vecteur de l'information». La décision de cessation de parution du journal est contestée par les héritiers Ameyar, principaux actionnaires de la Sarl omnium Maghreb presse, éditrice du journal La Tribune. «Nous contestons la décision portant cessation de parution du journal et nous exprimons notre solidarité avec le personnel», a indiqué la veuve de Kheireddine Ameyar qui a qualifié la mesure d' «illégale» compte tenu «des parts de chacun des associés dans la Sarl». «La Tribune doit reprendre. Le titre ne doit pas mourir sur une décision de deux associés minoritaires», a-t-elle ajouté. Un brin d'espoir. Pour que Kheireddine Ameyer et Hassan-Bachir Cherif ne connaissent pas une seconde mort.