Connaître les spécificités de son environnement, c'est être capable d'y vivre en harmonie. Les anciens ont su apprivoiser la nature et le temps. Leur mode de vie et le calendrier agraire qu'ils ont pu établir avec une grande précision sont intimement liés justement à leur environnement. C'est pourquoi chaque mois de septembre, au début généralement, les villageois se mettent aux travaux collectifs pour l'ouverture des chemins obstrués par les ronciers et autres objets ou buissons. Cela permettait la bonne circulation des eaux des premières pluies d'automne qui tombent en torrents. Avant l'apparition des mairies et des communes, les premières pluies étaient connues pour leur caractère imprévisible et déchaîné. Mais, les anciens les avaient apprivoisées. Elles passaient sans provoquer de dégât. Les anciens les appelaient «thahmalt N'hartadem». Leur préparer les voies d'évacuation était un travail obligatoire et collectif. Fausser le pas au groupe était passible de sanctions affligeantes surtout pour sa réputation. Aujourd'hui, avec les moyens dont sont dotées les collectivités locales, les premières pluies sont hélas synonymes de catastrophes et de dégâts humains. La gestion moderne des collectivités locales n'a rien appris des anciens. Pourtant, les élus sont issus de ces villages et sont tous nés à une époque où la société maintenait encore ces travaux par vigilance. Aucune commune ne mobilise ses services de la voirie et les services des ponts et chaussées en prévision des premières pluies. Dans les pays où l'élu vient pour servir les siens, le bien-être des populations est son premier souci. Mais dans notre pays, en regardant l'état des routes et de l'espace urbain, il devient évident que l'élu n'a aucun souci à se faire. Preuve en est que même lui vit les aléas des premières pluies comme ses semblables. Annoncées pour hier, dimanche, les premières pluies risquent de causer des dommages incommensurables pour les routes. Obstruées par les amas de terres, de bouteilles et de tous rejets, les avaloirs et autres voies d'évacuation des eaux ne serviront à rien. Les torrents d'eau seront rejetés vers les maisons, les routes. Aux premières heures de pluies, les routes et les oueds se ressemblent. Ils ont la même fonction, évacuer les eaux pluviales. Mais les oueds rejoignent les mers et les routes mènent vers les villes, les villages et les maisons. Les élus ne semblent guère prendre conscience de cela. Malgré la disponibilité des moyens dont ils disposent. Il n'y a pas que l'absence de prise de conscience des élus. Il y a pire. La matière grise en charge de ces services à travers les communes n'a pas eu le réflexe de s'inspirer des méthodes des anciens. Pourtant, les élus de nos jours gèrent exactement les mêmes villages que ceux de leurs ancêtres. A la différence qu'aujourd'hui, les villages croulent sous les immondices alors que jadis, ils étaient de petits paradis naturels. La rupture entre la gestion moderne et l'ancienne s'est accentuée, ces dernières décennies. Il y a quelques années seulement, malgré l'existence des communes et de ces services, les villageois faisaient encore ces volontariats de chaque début de septembre. Ils n'attendaient pas que les services de la voirie ou des ponts et chaussées les fassent à leur place. Mais depuis que les élections se font tambour battant, les promesses se sont multipliées. Les candidats rivalisaient de promesses. Il y en avait même qui promettaient de balayer devant les maisons des électeurs. Ces promesses, au lieu de rendre le cadre urbain meilleur, ont engendré le contraire. Ce cadre s'est clochardisé et le citoyen démobilisé. Aujourd'hui, les villageois ne font plus ces travaux. Ils ont appris que c'est le rôle des mairies. Mais en attendant que les mairies apprennent que c'est là leur rôle, il y a vraiment risque d'attendre longtemps...beaucoup trop longtemps, jusqu'à...trop tard.