Chris Froome dans la légende du cyclisme: le Britannique a écrit un exploit majuscule en remportant la première Vuelta de sa carrière et en scellant un somptueux doublé Tour de France-Tour d'Espagne, inédit la même saison depuis 1978. Vainqueur en juillet de son quatrième Tour de France, le longiligne leader de l'équipe Sky est remonté sur son vélo moins d'un mois plus tard pour dominer enfin l'épreuve espagnole, où il avait échoué trois fois à la deuxième place (2011, 2014, 2016). «Ces trois derniers mois ont été un tourbillon», a reconnu Froome en recevant un trophée commémoratif de ce doublé sur le podium dressé place de Cibeles, à Madrid. «C'est un sentiment génial de remporter enfin ce maillot rouge, je ne pourrais pas être plus heureux», a-t-il reconnu après avoir vécu «le Grand Tour le plus difficile de sa carrière». Froome est le premier Britannique à inscrire son nom au palmarès de la Vuelta, où il succède au Colombien Nairo Quintana, vainqueur en 2016. Surtout, «Froomey» inscrit son nom parmi les géants de son sport: il a égalé les Français Jacques Anquetil (1963) et Bernard Hinault (1978), les deux seuls coureurs avant lui à avoir remporté ces deux Grands Tours la même année. Le natif de Nairobi (Kenya) est d'ailleurs le premier à réussir le doublé Tour-Vuelta dans cet ordre depuis le repositionnement à la fin de l'été de la course espagnole, disputée au printemps avant 1995. Cela en dit long sur les capacités de résistance de Froome: le 23 juillet, revêtu du maillot jaune, il levait les bras sur les Champs-Elysées à Paris et moins d'un mois plus tard, le 21 août, il endossait le maillot rouge de leader de la Vuelta lors de la 3e étape en Andorre. Malgré une rude opposition et une course débridée, Froome est parvenu à garder sa tunique jusqu'au Paseo del Prado dimanche à Madrid, où l'Italien Matteo Trentin (Quickstep) s'est imposé au sprint pour remporter sa quatrième victoire d'étape dans cette édition. «C'était un énorme défi d'un point de vue athlétique d'être au top niveau aussi longtemps», a reconnu le Britannique. En ramenant le maillot rouge à Madrid, Froome donne tort à ceux qui ne voyaient en lui qu'un coureur programmé pour briller en juillet. Et il offre à l'équipe Sky une première victoire sur une autre course de trois semaines que le Tour de France, apportant un peu de réconfort à une formation visée par une enquête au Royaume-Uni, notamment sur l'usage des autorisations à usage thérapeutique (AUT). L'Italien Vincenzo Nibali (Bahreïn), deuxième et le Russe Ilnur Zakarin (Katusha), pour la première fois sur le podium d'un Grand Tour, ont complété le trio de tête final. Quant à l'Espagnol Alberto Contador (Trek), dont c'était la dernière course avant de prendre sa retraite à 34 ans, il a fini 5e du classement général, non sans avoir fêté ses adieux en remportant samedi l'étape-reine au sommet du mythique col de l'Angliru. Le peloton a d'ailleurs laissé le champion madrilène pénétrer seul en tête dans les rues de la capitale espagnole, en hommage aux 15 années d'une fructueuse carrière: le «Pistolero», triple lauréat de la Vuelta, restera comme l'un des six coureurs à avoir remporté les trois Grands Tours (France, Italie, Espagne), malgré les retraits du Tour de France 2010 et du Giro 2011 pour dopage. «C'est le moment de laisser la place à d'autres coureurs. J'ai toujours voulu tirer ma révérence au plus haut niveau», a réagi Contador, élu super-combatif de l'épreuve. Rejoindre ce cercle très fermé des collectionneurs de Grands Tours est le nouveau défi qui s'offre à Froome, qui n'a plus que le Tour d'Italie à conquérir. «Evidemment, une année, je vais devoir viser le Giro», a reconnu l'intéressé. «Mais un cinquième Tour de France serait aussi un immense objectif pour moi l'an prochain et je dois le garder en tête.» Avant de viser le maillot rose du Giro, le Britannique a fait le plein de tuniques dimanche; outre le maillot rouge du classement général, il a également gagné le maillot blanc du combiné et participé au sprint massif afin de préserver son maillot vert du classement par points menacé par Trentin. Quant au maillot du meilleur grimpeur, il a été décroché par l'Italien Davide Villella (Cannondale).