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Du nettoyage ethnique à l'exode
DRAME DES ROHINGYAS EN BIRMANIE
Publié dans L'Expression le 17 - 09 - 2017

Les Rohingyas vivent parmi plusieurs ethnies, à majorité bouddhiste. Ils sont les seuls à être musulmans, classés par l'ONU comme la minorité la plus persécutée au monde
Le peuple des Rohingyas est d'origine indo-aryen. Il représente 4% des 55 millions d'habitants.
Ils sont depuis le VIIIe siècle après J.-C., à la suite de l'arrivée des Arabes au cours du siècle considéré, présents dans la partie géographique de l'Arakan, une subdivision administrative de la Birmanie, situé sur la côte occidentale du pays, à l'ouest du Bangladesh, la capitale régionale Sittwe, (ex-Akyab), séparé du reste de la Birmanie par une chaîne de montagnes. Le climat est tropical. Il y a l'or, l'argent et des hydrocarbures, une population estimée avoisinant 3 millions d'habitants, vivant sur une superficie de 36762 km2. Les Rohingyas vivent parmi plusieurs ethnies, à majorité bouddhiste. Ils sont les seuls à être musulmans, classés par l'ONU comme la minorité la plus persécutée au monde. Ils sont essentiellement regroupés à la frontière avec le Bangladesh. En été 2012, de violents affrontements ont eu lieu entre les Rohingyas et le reste des Arakanais, après le meurtre de 10 musulmans par des Arakanais à la suite d'un viol et du meurtre d'une Arakanaise. Des villages entiers ont été rasés et 650 Rohingyas tués, 1200 disparus et 80000 déplacés. Ces déplacements de population sont dus semble-t-il, à la réalisation d'un gazoduc pour exporter du gaz naturel vers la Chine. Il est également prévu la construction d'un port pour permettre à la Chine de recevoir du pétrole du Moyen-Orient sans transiter par le détroit de Malacca.
Le motif historique de la discorde. Entre 1824-1826, lors de la guerre entre les indépendantistes birmans et les Anglais, les Rohingyas ont été supplétifs au sein de l'armée britannique et ont été considérés comme traîtres. Durant la Seconde Guerre mondiale, ils sont de nouveau du côté des Anglais comme les harkis recrutés par les Français en Algérie. Les Birmans n'ont jamais pardonné cette attitude. En 1948, à l'indépendance de la Birmanie, les Rohingyas furent rejetés et persécutés d'où s'ensuit un exode massif. Des persécutions ont jalonné l'histoire des Rohingyas. En 1825, l'occupation britannique fera bénéficier les Rohingyas d'une forme de liberté politique et culturelle ce qui les a poussés à rester fidèles aux Anglais. Cette fidélité entraîna en 1942, le massacre de milliers de Rohingyas par les Japonais et les Birmans réunis et la fuite vers l'Inde de 22000 d'entre eux. Le plus grand exode eut lieu en 1978, (200000) à la suite d'un recensement décidé par la junte militaire birmane destiné à déterminer la nationalité. Les restants ont été confinés dans une misère sans nom, dans des camps. Ils seront déclarés en 1982 comme des non-citoyens puisqu'ils n'ont pas pu prouver leur présence sur le territoire avant 1799. De ce fait, ils ont été déchus de la nationalité et sont considérés comme des migrants clandestins. L'arrivée sur la scène politique d'Aung San Suu au moment de l'acceptation du prix Nobel de la paix en 2012, décerné en 1991, prônant une forme de réconciliation nationale a donné effectivement espoir aux Rohingyas dans un cadre qualificatif de minorité ethnique reconnue. Le président Thein Sein a rejeté cette éventualité arguant que les Rohingyas ne sont pas de son ethnicité. Cette prise de position claire et nette, soutenue par les moines bouddhistes, a entraîné des exactions par des massacres collectifs, (100000 tués), incendiant des maisons et des mosquées acculant l'armée à instaurer l'état d'urgence et un couvre-feu. Cet affrontement entre la population bouddhiste et les Rohingyas tire son origine sur la base d'une anodine scène entre un vendeur musulman et des bouddhistes entraînant la destruction de tout ce qui est musulman. Le caractère raciste à l'égard du musulman est profondément ancré dans la société birmane. Il a donné naissance à un autocollant distinctif de l'ascendance bouddhiste, distribué aux commerces et taxis. Ces barmans bouddhistes représentant 75% de la population se considèrent comme les seuls vrais Birmans. Toute autre ethnie n'est qu'hébergée. L'indépendance en 1948 était censée asseoir un gouvernement fédéral démocratique. Cette exigence n'a jamais vu le jour. Un coup d'Etat militaire s'en est suivi en 1962 mettant l'armée au pouvoir pour un demi-siècle et sans partage.
La méconnaissance de l'Islam, la destruction des symboles des bouddhas de Bâmiyân en mars 2001 en Afghanistan, les images du 11 septembre sont à l'origine de l'instauration d'une haine anti-Rohingyas et d'une peur réciproque, générant des représailles à l'égard des Rohingyas. Difficultés à se marier, extorsion des terres, interdiction d'étudier, tout cela pour forcer les Rohingyas à quitter définitivement le pays. Le viol d'une femme bouddhiste a entrainé de terribles violences à l'égard des Rohingyas en 2012. L'impunité de leurs auteurs n'est pas de nature à assurer la sécurité de cette population musulmane en Birmanie.
Des feuilles d'arbres pour survivre
Un millier d'enfants ont traversé des jungles et des rivières pour rejoindre les terres du Bengladesh. Ils se nourrissent de feuilles d'arbres et d'eau impure pour survivre durant la course contre la mort. Ils n'ont ni famille, ni proches parents. Ils sont livrés à eux-mêmes. Cette frange sociale mineure est extrêmement vulnérable et constitue un trafic idéal et insoupçonnable. Ils racontent que l'armée birmane et les milices bouddhistes ont massacré leurs familles et incendié leurs villages. Ils n'avaient que le choix de fuir ce nettoyage ethnique. Ils n'ont pas échappé également à des blessures par balles tirées par leurs poursuivants. Sur les 400000 arrivants au Bangladesh, la moitié sont des enfants isolés. Ils sont pieds nus. Ils errent nus. Ils ne parlent pas. Ils ne mangent pas. Ils sont assis, l'air hagard. Ils ne jouent pas. Les plus âgés portent dans leurs bras les petits et assistent le frère ou la soeur. Leurs prises en charge par l'Unicef leur a donné un peu de vie. Pour les adultes comme pour les enfants ces camps de fortune sont une rémission plongée dans une misère noire et inattendue.
La responsabilité des premières incombent aux pays musulmans asiatiques régionaux en général, arabes du Moyen-Orient en particulier, notamment de l'Arabie saoudite en raison de la présence des Lieux saints sur son territoire, de sa responsabilité historique de l'Islam dans cette région, enfin sur un plan humanitaire. L'allure à laquelle le nettoyage ethnique se poursuit, il serait malhonnête vis-à-vis des Rohingyas de croire à un possible arrêt de ce génocide ou à une pression conséquente de la communauté internationale. Le silence du prix Nobel de la paix, Mme Aung San Suu Kyi, les règles du jeu en vigueur dans la Birmanie qui excluent toute arrestation d'un moine bouddhiste criminel par les forces de l'ordre public et le calcul politicien des dirigeants envers le peuple et dans ce dernier point de vue que le silence complice de l'Occident sous le prétexte de soutenir une démocratisation dans le pays ne sont pas de nature à favoriser une arrêt de ce nettoyage ethnique effectué «à l'air libre», au su et au vu de l'humanité tout entière. Que voulez vous attendre d'une communauté internationale hypocrite qui continue de répéter à qui veut bien l'entendre que Aung San Suu Kyi est une grande figure des droits de l'homme parce qu'elle est une icône de la démocratie aux yeux des Occidentaux alors qu'il est notoirement connu, historiquement et les faits actuels le démontrent ostentatoirement que les Birmans sont viscéralement racistes. Pour la simple raison que, les Birmans, sur la base des vestiges coloniaux, ont opté pour la construction d'une nation birmane sur la base de notions de race et de religion. Suivant ce tracé dans l'espace national birman, ils sont les seuls à l'avoir adopté avec Israël sur la planète terre. Ce processus a progressivement marginalisé la population musulmane jusqu'à lui dire de prouver qu'elle existait avant 1799, concrétisé sur le plan politique par une «birmanisation» via la religion bouddhiste tout en mettant en exergue la peur d'un Islam radical et conquérant entrainant une pure et simple négation des birmans musulmans. Puisque ces musulmans vivent à l'ouest du pays avec la frontière du Bangladesh, pourquoi le Bengladesh ne revendique pas ce territoire musulman sous l'angle d'une approche éthniciste, (même espèce humaine par la religion, la couleur de la peau initiée par le politique colonial suivie par le Birman) tout en s'appuyant sur le tracé frontalier conçu par les colonialistes anglais, connus pour avoir tracé d'autres frontières dans leurs anciennes colonies actuellement en vive tension entre les pays concernés, d'autant qu'au fil des années, la population du fait de sa marginalisation, se reconnaît aujourd'hui comme une communauté politique, religieuse, linguistique et culturelle spécifique au sein de la société birmane. Cette dynamique a engendré une prise de conscience nationale chez les Rohingyas. Elle se traduit par une émergence inévitable d'un groupe armé, apparue au grand jour en 2016, sous la dénomination de l'Asra.
L'assistance aux personnes en danger.
La Birmanie a intérêt immédiat de trouver une solution au conflit. Le dirigeant de l'Asra est né au Pakistan, a grandi en Arabie saoudite, (lieu de naissance du wahhabisme. El Qaïda a apporté son soutien à ce mouvement armé actuellement, rejeté. Il peut se radicaliser et s'associer au diable pour aboutir à des revendications au demeurant simples et légitimes. Déjà, faut-il le souligner, des combattants venus du Pakistan et d'Indonésie auraient participé à certaines actions armées. L'influence des taliban aussi bien pakistanais ou afghans trouveront dans ces camps un réservoir humain de combattants à recruter qui n'ont rien à gagner de la vie ni rien à perdre. Les conditions de vie, humiliantes et inhumaines des camps, ont poussé la jeunesse Rohingyas à travailler en quasi esclavage dans des usines en Malaisie ou en Thaïlande ou sur des navires de pays limitrophes. En outre, l'attitude du prix Nobel ne peut paraître aux yeux des simples honnêtes gens que «comme une bouddhiste chauvine, prête à faire le pas qui la sépare des moines extrémistes pour aboutir à l'anéantissement définitif de la présence musulmane dans le pays en vue d'asseoir sa légitimité pour accéder au pouvoir suprême. D'ailleurs, aucun musulman ne siège au Parlement ou dans d'autres structures comme l'armée ou les institutions publiques. Une commission d'enquête sur les Rohingyas, présidée par le Ghanéen, Kofi Annan, a été confiée cet été par l'ex-secrétaire général de l'ONU. Dans son rapport, il recommande la révision de la législation en vigueur dans le pays à propos de la citoyenneté. Martin Luther King n'a-t-il pas déclaré: «Le pire endroit de l'enfer est réservé pour ceux qui se taisent au moment des crises morales.» Des Noirs dans le passé, maintenant, il s'agit de la menace d'extermination d'une population dont le tort est d'avoir embrassé l'Islam en terre bouddhiste au VIIIe siècle puisque c'est un élément d'un processus défalqué de l'histoire pour justifier la mise en oeuvre du nettoyage ethnique. Les ignominieuses injustices historiques que sont la haine, l'intolérance et la xénophobie n'ont mené leurs auteurs que vers des massacres d'innocents, la destruction des nations et une condamnation unanime. Vivre ensemble pour 130 ethnies, cinq races constituant la mosaïque sociale birmane est certes une dure épreuve pour un pays cosmopolite, multi ethnique, multi religieux, monarchisé, puis colonisé, ensuite décolonisé, enfin militarisée pendant des décennies, n'est pas de nature à effectuer aisément sa mutation vers une nation démocratisée. L'urgence actuelle, inévitable, demeure et reste la seule et unique voie, c'est l'assistance immédiate et inconditionnelle, de la part des pays musulmans asiatiques en particulier, (comme souligné ci-dessus) et les autres en général, qui s'impose cruellement. Je formule le voeu et prie l'Eternel de faire entendre ma voix, mon appel désespéré. Déjà nos mains sont liées devant le drame palestinien, notamment de cette prison à ciel ouvert qu'est Ghaza, le chaos critique des peuples, irakien, syrien et afghan, le conflit des Grands Lacs, le Darfour en Afrique, le désordre intérieur des pays arabes, maintenant les Rohingyas de Birmanie, sans oublier les musulmans regardés avec un oeil de méfiance, parfois de mépris, vivant dans l'espace occidental alors responsable du chaos mondial par sa responsabilité coloniale, (ce texte a été élaboré sur la base d'informations recueillies au sein de la presse écrite et télévisée, nationale et internationale).


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