On les appelle des «usines à clics». Dans la clandestinité, elles fabriquent de fausses notoriétés pour des produits industriels et des fausses informations d'officines. Elles sévissent sur Facebook, Twitter, YouTube et les autres. Plongée dans un univers mafieux pas comme les autres... Mercenariat numérique. Cette semaine, des médias occidentaux (très peu) sont revenus sur un fléau découvert il y a quelques années. Il s'agit du contenu des réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, YouTube et bien d'autres. Ces plateformes sont utilisées par des contrebandiers du 3ème type organisés sur le modèle mafiosi. Au début, on les appelait les «fermes à clics». Avec le temps elles sont devenues «les usines à clics». C'est qu'elles se sont terriblement développées ces fabriques à façonner les opinions. Elles fonctionnent sur le modèle des ateliers clandestins de contrefaçon de tee-shirts ou chaussures de marque au Bangladesh. A la différence que ces «usines à clics» se consacrent uniquement à l'information. Ou plutôt à la désinformation. A l'intox ou «fake news» pour les branchés. Elles offrent leurs services autant aux industriels qui veulent faire passer leurs bas de gamme en produits de luxe dans l'esprit des internautes qu'à certains milieux politiques qui visent des objectifs inavoués ainsi qu'aux lobbys qui leur sont affiliés. Alors comment cela se passe concrètement? L'image commence dans une salle qui rappelle celle d'un centre d'appels classique. Des opérateurs, casques aux oreilles, sont penchés sur des écrans de micro-ordinateurs. Ils pianotent des textes sur un même sujet, mais avec des textes différents dans la forme alors que dans le fond, ils versent tous dans la même direction «éditoriale». Chacun des opérateurs a, sous un nom d'emprunt, (pseudo) un compte sur les réseaux sociaux les plus importants. Ils ont pour rôle d'intervenir sur un sujet préfabriqué sur commande. Pour faire du nombre et pousser les internautes à les suivre jusqu'à obtenir le «buzz» (la saturation). Ils agissent sous plusieurs formes. Soit en inondant les réseaux sociaux de la fausse mention «j'aime» (que les internautes connaissent bien) pour un produit industriel, soit ils servent de fans fictifs pour entraîner les autres personnes connectées. Pour le compte de loobys et autres milieux de la politique c'est un autre mode opératoire. Pour mieux le comprendre, nous allons emprunter l'exemple donné par un journaliste d'un des médias qui a découvert le «pot aux roses» après avoir réussi à visiter une de ces «usines à clics». Il écrit: «Un encart annonce qu'une infirmière (nous ne citerons pas le pays) aurait échangé, pendant vingt ans, plus de 9000 bébés dans les maternités de ce pays. L'information est, évidemment, bidon, mais le rituel est immuable. Dans la section des commentaires les lecteurs se divisent en trois catégories: les naïfs qui se laissent prendre au piège; les «trolls» (polémiques artificielles) qui en rajoutent une couche; et les preux chevaliers qui crient, parfois bien seuls, au «Fake» (mensonge). «La peine de mort pour cette folle!» lance une lectrice remontée contre l'infirmière «imagi-naire». Etc, etc. On l'aura compris, l'objectif étant d'induire en erreur les honnêtes gens et de les entraîner dans des réactions extrêmes. Jusqu'ici, ces «usines à clics» ont été localisées par les médias occidentaux en Inde, au Bangladesh, en Irak et en Europe de l'Est. Elles peuvent être installées également ailleurs. En général, elles utilisent des «faux comptes en ligne pour le partage à répétition qui offre une visibilité certaine sur le Web» affirment des enquêteurs. Les patrons des réseaux sociaux reconnaissent l'existence de ce fléau. Facebook avait promis en 2014 de les écarter. Que des promesses. Les usines à clics se développent à grande vitesse. Twitter de son côté aurait pas moins de 48 millions de faux comptes. On ne voit vraiment pas pourquoi ces réseaux sociaux s'empresseraient de lutter contre ces «contrebandiers» du numérique. Leurs intérêts reposent sur le taux de fréquentation de leurs sites. De l'audience qu'ils font pour attirer les publicitaires. C'est sur quoi se fondent toute leur stratégie commerciale et la manne financière qui en découle. Des intérêts convergents qui fructifient en exposant de plus en plus les internautes ignorant tout de ces pratiques. D'ailleurs, une certaine connivence, au moins tacite, est constatée entre ces fabricants de l'intox et une grande partie des médias internationaux. Il faut savoir que ce sujet que nous livrons aujourd'hui aux lecteurs algériens, n'a jamais été traité à sa juste proportion par les professionnels du «devoir d'informer». Ce fléau existe depuis quelques années, ses dégâts sont immenses, mais son éradication ne semble pas être le premier souci des grandes puissances. Sauf lorsqu'elles sont elles-mêmes victimes. Comme lors des dernières élections américaines. Mis au «parfum», les Algériens seront certainement plus vigilants lorsqu'ils iront sur ces réseaux sociaux. Il n'y a aucune raison d'en douter! [email protected]