Durant la campagne, il a multiplié les propos abjects sur les femmes, les musulmans et les Africains L'ancien vice-président démocrate Joe Biden a estimé que «ce n'est pas comme cela qu'un président devrait parler et se comporter. Mais, surtout, ce n'est pas comme cela qu'un président devrait penser». Donald Trump, le «génie très stable», est devenu un habitué des polémiques dont se nourrit visiblement son ego démesuré. Mais en qualifiant des pays africains et sud-américains de «pays de merde», il a franchi une ligne dangereuse tout en confirmant ce que l'on pensait du personnage, clairement raciste, arrogant et provocateur. Hier, les cibles étaient l'Iran et la Syrie, puis ce fut le tour de la Corée du Nord et voilà qu'il ouvre une nouvelle page dans l'indignité et la calomnie.» Racistes», «abjects» et «blessants», ces propos de Donald Trump sur l'immigration en provenance de «pays de merde» ont certes soulevé des torrents d'indignation à travers le monde, mais le fait que l'actuel président des Etats-Unis tente une esquive comme à son habitude, en prétendant que ses mots étaient très durs sans pour autant qu'ils soient exactement les termes répercutés par les médias, démontre au moins une chose. Contrairement à l'idée désormais répandue que Trump est un individu qui ne maîtrise pas son rôle et son discours, il faut comprendre que l'homme dit ce qu'il pense, sans détours, et qu'il pense ce qu'il dit. En d'autres termes, il ne s'embarrasse d'aucun faux-fuyant pour afficher son mépris de classe et sa haine des populations qui ont subi les exactions du Ku Klux Klan. Rappelez-vous, il y a de cela quelques mois, le président Donald Trump avait louvoyé, des semaines durant, pour ne pas avoir à condamner les électeurs de cette mouvance et, au final, il leur a même trouvé des circonstances atténuantes. Ce serait donc illusoire que d'attendre des excuses d'un tel personnage qui vit en conformité avec toute sa culture, je sais, le mot est osé, et sa vision du monde. Mais quand on en vient à jouer avec Kim Jong Un sur le bouton le «plus gros et le plus puissant», il n'y a rien d'étonnant qu'adviennent des sorties calamiteuses telles que cette diatribe contre les «peuples de merde» qui a, bien sûr, provoqué des flots d'indignation dont le point culminant aura été cette exigence de 54 ambassadeurs du groupe africain à l'ONU sur une rétractation et des excuses de Trump. Les diplomates ont condamné des propos «scandaleux, racistes et xénophobes» et se sont dits préoccupés par la propension croissante de l'administration Trump à «dénigrer le continent et les gens de couleur». Et tandis que Haïti qualifiait ce soi-disant dérapage de Trump d'«odieux et abject», reflétant une «vision simpliste et raciste à tous égards inacceptables», le Sénégal et le Botswana convoquaient le représentant américain dans leur pays pour lui signifier leur indignation. En Amérique latine, le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a appelé à la solidarité avec les pays «agressés» par Donald Trump et Cuba a «condamné fermement des déclarations racistes, dénigrantes et grossières». Usager assidu de Twitter, le président américain s'emmêle souvent les pinceaux à force de vouloir aller vite dans les commentaires et les jugements de certains faits. On pourrait dire qu'il confond allègrement vitesse et précipitation. Mais en aucun cas, il ne peut prétendre ignorer la portée et les conséquences de ses tweets et encore moins nier leur véracité, comme il se complaît à le faire, depuis maintenant une année. Une chose est ainsi évidente, sa propension au mensonge est au moins égale à celle du dénigrement. Qu'importent alors ses formules alambiquées pour essayer de désamorcer la tension qu'il a choisie à dessein de provoquer, toujours avec le souci de contenter sa base électorale, elle aussi raciste et xénophobe. «Durs», alors ses propos? Non, ils sont bel et bien ignobles et c'est tout. Des témoins étaient là qui ont assuré que les mots étaient bien ceux rapportés par les médias. C'est le cas du sénateur démocrate Dick Durbin, présent à la réunion, qui confirme l'utilisation de «l'expression injurieuse à plusieurs reprises». Et c'est aussi le cas de Jeff Flake, sénateur républicain, qui assure que «les mots utilisés par le président tels qu'ils m'ont été rapportés directement par ceux qui ont participé à la rencontre n'étaient pas «durs», ils étaient abjects et répugnants». Quant à l'ancien vice-président démocrate, Joe Biden, il estime que «ce n'est pas comme cela qu'un président devrait parler et se comporter. Mais, surtout, ce n'est pas comme cela qu'un président devrait penser». Tout aussi intéressante est la réaction de la Maison-Blanche qui n'a eu d'autre argument que celui de souligner que «M. Trump se battrait toujours pour le peuple américain». Il est vrai que le président américain a participé à une cérémonie en l'honneur de Martin Luther King, vendredi dernier, louant «le rêve d'égalité, de liberté, de justice et de paix» du militant noir des droits civiques. Mais aux médias qui croyaient le tenir pour répondre aux questions que tout le monde se pose sur ses rapports à la communauté noire, justement, il a opté pour un silence éloquent. La preuve est faite que Donaled Trump gère la politique interne et internationale des Etats-Unis avec le même cynisme et la même absence d'état d'âme qu'il gérait jusque-là ses affaires. Reste à savoir combien de temps va durer cette dérive et quelles replâtrages pourront tenter ses représentants diplomatiques qui, par ailleurs, partagent visiblement les positions de leur dirigeant. Qu'importe que Trump cherche aujourd'hui à se dédouaner de propos qu'il assume pleinement, en son fort intérieur, quitte à verser une larme de crocodile sur Haïti, un «pays très pauvre et en difficulté». Les Norvégiens devraient rendre grâce au ciel de n'avoir pas à bénéficier de l'hospitalité du président américain qui aurait souhaité pouvoir les accueillir plutôt que des Africains ou des Mexicains. Son racisme est ce qu'il est, une tâche indélébile dans la personnalité de base d'un Américain ultraconservateur, nourri aux valeurs du KKK.