Les animateurs de ces deux syndicats savent pertinemment que le temps joue contre eux Les deux syndicats s'obstinent, sciemment, à aller droit dans le mur. Ils ont opté pour une aventure dans laquelle les enseignants se jouent de l'avenir des enfants et les médecins résidents de la santé des citoyens. Pourquoi un tel choix? Que cherchent-ils? Peut-être juste une sortie honorable. Le Cnapeste (Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l'éducation) décide de renouer avec la grève, cyclique cette fois, et son porte-parole trouve même des explications à avancer pour justifier cette décision. Le Camra (Collectif autonome des médecins résidents algériens) quant à lui, entérine sereinement l'année blanche. Les deux syndicats s'obstinent, sciemment, à aller droit dans le mur. Ils ont opté pour une aventure dans laquelle les enseignants se jouent de l'avenir des enfants et les médecins résidents de la santé des citoyens. Pourquoi un tel choix? Les animateurs de ces deux syndicats savent pertinemment que le temps joue contre eux et qu'il ne reste plus que quelques semaines avant le Ramadhan et les vacances d'été. L'année scolaire, et même sociale, va se terminer et les deux syndicats n'auront pas avancé d'un iota sur leurs revendications socio-professionnelles. Que cherchent-ils donc à prouver en poursuivant un combat syndical qui n'a pas trouvé son épilogue? Sauf s'il ne s'agit plus de combat syndical, mais juste d'une sortie honorable. Histoire de terminer l'année sans abdiquer. Si les médecins résidents, qui sont toujours dans l'esprit estudiantin versant dans la spontanéité et un peu d'inconscience, ont tranché le sacrifice de leur année, les syndicalistes du Cnapeste, eux, risquent de terminer leur course en solo... sans les enseignants. Ces derniers ont été leurrés une première fois par leurs représentants qui ont mis leur avenir professionnel en péril en les exposant à la radiation des listes de la fonction publique. Nombreux d'entre eux qui ont fini par comprendre la machine administrative, savent pertinemment aujourd'hui qu'une décision de justice doit être appliquée et qu'une loi doit être respectée. Les enseignants ont pris conscience donc que les journées de grève qui ont été observées ne peuvent en aucun cas faire objet de rémunération et c'est pourtant là la raison déclarée du recours de ce syndicat à la grève cyclique. Car, faut-il toujours le rappeler, l'obstination observée par le Cnapeste et qui a mené au pourrissement, est loin d'être un débrayage dont les raisons sont purement syndicales. Le syndicat est dans une pure logique politique faisant l'écho de thèses déjà brandies par les contradicteurs extrémistes de la ministre de l'Education, accusée faut-il le rappeler de mener des réformes qui menacent les composantes de l'identité nationale. Car rien n'explique que les simples «malentendus» qu'a connus le secteur en début d'année, des «faits divers», amènent un syndicat à appeler à une grève nationale illimitée. La réalité est que les animateurs du Cnapeste ont trouvé le moyen de faire durer le malaise dans le seul objectif de généraliser le débrayage. Et loin de toute action syndicale traditionnelle, le Cnapeste n'avait pas cherché à dialoguer avec la tutelle, mais s'était empressé de faire cavalier seul sur une action extrême et sans fondement syndical, qui n'est autre que la grève illimitée. La grève illimitée est une aventure qui ébrèche l'authenticité de l'action syndicale car recourir à une action aussi extrême quand les portes du dialogue ne sont pas fermées ne se justifie point. C'est le cas de le dire et pour le Cnapeste et pour le Camra. Même si pour ce dernier, il semble s'agir plus de l'amateurisme syndical qu'autre chose. Il n'empêche que les médecins résidents refusent de prendre leurs responsabilités. Ces derniers ont porté une plate-forme de revendication contenant plusieurs points et avaient raison de le faire. Exiger un logement décent lors d'une affectation à l'intérieur du pays et un plateau technique fonctionnel pour mener à bien le geste médical, sont des revendications qui relèvent des besoins primaires ne devant d'ailleurs même pas figurer sur une liste de revendications. Demander l'autorisation du regroupement familial pour les couples de médecins résidents et l'introduction de mesures incitatives ou encore le droit de bénéficier des oeuvres sociales, le droit de bénéficier d'une journée pédagogique sont également des revendications légitimes. Cependant en ce qui concerne la demande d'annulation du service civil, là il y a à dire. La première question qui doit être posée est celle de savoir si les habitants des zones reculées en Algérie ne sont pas des Algériens à part entière? Car si l'Etat répond favorablement à l'exigence des médecins résidents, il va, à ne pas en douter, léser ces citoyens. Ces derniers n'auront pas les mêmes droits d'accéder aux soins que leurs concitoyens des régions du nord. Autre question: le médecin, formé pendant 25 ans par son pays qui lui assure un enseignement gratuit, n'a-t-il pas des devoirs envers ce pays? Un devoir qui pourrait se traduire dans l'accomplissement du service civil. Au-delà de ce devoir envers la patrie, le médecin ne prête-t-il pas le serment de Hippocrate où il promet et jure «de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux». Ne s'engage-t-il pas également lors du serment «à donner mes soins à l'indigent et à quiconque me les demandera». Les médecins résidents refusent d'honorer leur engagement et s'obstinent autant que les enseignants grévistes. Mais il semble clair aujourd'hui que le temps des illusions est bien écoulé.