Trois cents personnalités en France ont signé un «virulent manifeste contre le nouvel antisémitisme», dénonçant une «radicalisation islamiste», soi-disant soutenue par un «silence médiatique», et une «épuration ethnique à bas bruit» dans certains quartiers périphériques de Paris. Le texte est paru dimanche dans le quotidien Le Parisien. «Nous demandons que la lutte contre cette faillite démocratique qu'est l'antisémitisme devienne cause nationale avant qu'il ne soit trop tard. Avant que la France ne soit plus la France», peut-on lire dans ce manifeste signé par des personnalités politiques de droite comme de gauche (l'ancien président Sarkozy, le chef des Républicains Laurent Wauquiez, les ex-Premiers ministres Jean-Pierre Raffarin et...Manuel Valls, l'ancien maire socialiste, Bertrand Delanoë...), des artistes (Charles Aznavour, Gérard Depardieu...), des intellectuels, des responsables cultuels juifs, musulmans et catholiques. Prenant prétexte de quelques faits intervenus en 2006, 2012, 2015 et 2017, les auteurs lancent une opération concoctée depuis des mois, afin de parer à tout comportement antisioniste qui devient, sur la base d'une stigmatisation légitime de l'antisémitisme, un délit passible de la loi et donc sévèrement réprimé. Ils sont parfaitement convaincus que pour mettre un frein définitif à toute critique contre les exactions israéliennes et la politique ignominieuse de Benjamin Netanyahu, la diabolisation des personnes et des idées antisionistes passe immanquablement par celle des coupables d'antisémitisme, même et y compris s'ils sont eux-mêmes des sémites! Et pour y parvenir, tous les moyens sont bons, comme cet argument selon lequel «dix pour cent des citoyens juifs d'Ile de France -c'est-à-dire environ 50.000 personnes- ont récemment été contraints de déménager parce qu'ils n'étaient plus en sécurité dans certaines cités et parce que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l'école de la République». A les croire, la France serait en proie à «une épuration ethnique», quelques décennies seulement après Vichy, et il ne reste plus qu'un petit pas à franchir pour lui réclamer des «indemnisations» tout aussi légitimes, à l'instar de ce qui vient d'advenir récemment en Allemagne. La «terreur d'un antisémitisme meurtrier» se répand, provocant à la fois la condamnation populaire et un silence médiatique» qu'il faudrait rompre à tout prix, clament les signataires qui martèlent bruyamment que «la radicalisation islamiste véhicule l'antisémitisme», tandis qu'elle est «considérée par une partie des élites françaises comme l'expression d'une révolte sociale». Dans la foulée, sont prises à la gorge l'extrême droite et une partie de la gauche radicale, coupables de «transformer les bourreaux des juifs en victimes de la société». Mais pas seulement puisque, enhardis par le «combat de leur vie», les initiateurs du manifeste attribuent clairement le «nouvel antisémitisme» à une communauté particulière des quartiers populaires, «sous l'effet d'un islam identitaire, voire radical». Et d'exiger du même coup que «les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés de caducité par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l'antisémitisme catholique aboli par (le concile) Vatican II, afin qu'aucun croyant ne puisse s'appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime». Comme si le texte sacré pouvait avoir une quelconque responsabilité dans les interprétations abusives des «égarés» que des puissances néocoloniales instrumentalisent, avant de les jeter aux orties, une fois leur mission de destruction massive achevée. S'il n'y avait que les motivations politiques derrière cette sortie tapageuse qui s'en prend à des médias pourtant dociles, et même serviles dans ce domaine, on pourrait croire à l'innocence des intentions. Mais, tandis que les soldats israéliens s'amusent à tirer les jeunes Palestiniens comme des lapins, chaque vendredi, le fait que même Richard Wagner soit taxé, plus d'un siècle après sa mort, d'antisémitisme exacerbé constitue un signe de la démesure affichée ouvertement par les zélateurs et les vigiles du sionisme.