Les nouvelles demandes lorsqu'elles ne sont pas rejetées, ouvrent droit à un visa d'une durée d'un mois uniquement Pour préserver leurs intérêts, protéger leurs pays du flux migratoire et imposer leurs marchandises sur son marché, les Européens font pression sur l'Algérie en réduisant le nombre de visas octroyés. «Le visa n'est pas un projet de vie» a déclaré Emmanuel Macron lors de sa visite, l'année dernière en Algérie et le président français a raison. Mais le visa peut-être un projet pour des vacances, pour une visite familiale, des études ou encore pour les affaires. Les Algériens ne demandent pas le visa uniquement pour prendre la tangente et surtout quand il s'agit de la France. Un pays dont la proximité historique fait qu'il n'y a pas une famille algérienne qui n'a pas un de ses membres installé dans l'Hexagone. En plus de la présence de plus de 5 millions d'Algériens en France, il y a aussi les voeux exprimés à maintes reprises par les autorités des deux pays à renforcer le partenariat d'exception. Ce qui implique une coopération économique intense nécessitant un déplacement permanent des hommes d'affaires entre les deux rives. Or, ces derniers mois, et au lieu de faciliter l'octroi des visas, la France fait dans la restriction. Après avoir compliqué la procédure, le consulat général a réduit considérablement la durée du visa Schengen. Ceux qui, habituellement, obtenaient des visas de circulation longue durée dont la validité allait jusqu'à 5 ans, n'ont plus droit qu'à 6 mois de validité. Les nouvelles demandes lorsqu'elles ne sont pas rejetées, ouvrent droit à un visa d'une durée d'un mois uniquement. Pour quelle raison la France a-t-elle décidé d'appliquer des mesures aussi restrictives envers les Algériens? En fait, outre la France, les restrictions constatées dans l'octroi des visas pour les ressortissants algériens, concernent la majorité des pays de l'Union européenne. Ce qui confirme donc qu'il s'agit là d'une politique commune et d'une décision prise de concert. Abdelkader Messahel, le ministre des Affaires étrangères a expliqué cette situation par des «dépassements» que la diplomatie algérienne est en train de «gérer de manière à préserver la dignité humaine et la dignité des Algériens». Mais à bien voir, les raisons sont évidentes. L'Union européenne a pris des résolutions, l'année dernière, afin de contrer le flux de migrants qui arrivent dans l'espace Schengen. Parmi ces résolutions, il est question de restrictions sur le visa Schengen imposées à tous «les pays pourvoyeurs de migrants, y compris les pays transitaires, et qui n'acceptent pas les personnes expulsées à partir des pays de l'UE et membres de l'espace Schengen». Et c'est bien évidemment le cas de l'Algérie qui refuse la réadmission des personnes expulsées depuis l'UE à l'exception de ses propres enfants. Le Conseil européen a même prévu plusieurs autres clauses, visant l'implication directe des pays d'origine et de transit à qui on demande la mise en place de camps pour les migrants subsahariens. Une réédition avec les pays du Maghreb de leur expérience menée en 2016 avec la Turquie. Or, Alger a opposé un niet catégorique. Il n'est pas question de créer des camps de tri de migrants sur son sol. L'intransigeance de l'Algérie est l'une des raisons qui a poussé les pays de l'UE à appliquer une restriction dans l'octroi de visas pour les ressortissants algériens. Mais ce n'est pas la seule. L'autre raison est bien évidemment économique. La décision souveraine du pays de limiter les importations en raison de la crise économique, n'a pas été du goût des Européens qui ont vu ainsi leur part de marché se rétrécir. Ils ont d'ailleurs tenté de faire pression sur l'Algérie dont la réponse a été cassante. «L'Algérie ne se soumet à aucune partie, et ne consulte personne dans le but d'obéir à ses ordres (...). Nous ne recevons pas d'ordres de l'Union européenne (...)» avait déclaré Saïd Djellab, le ministre du Commerce à la suite des reproches de l'UE aux gestionnaires du pays de prendre les décisions qu'ils ont jugé adéquates à même de permettre le retour rapide à un équilibre financier et de mettre fin à la dépendance de l'économie nationale des recettes pétrolières. Et la France, autant que l'Europe, avec cependant une histoire en partage, reproche également à l'Algérie d'avoir, pour ne citer que ce cas, interdit l'importation de la pomme des Alpes. C'est donc pour préserver leurs intérêts, protéger leurs pays du flux migratoire et imposer leurs marchandises sur le marché algérien, les Européens font pression sur l'Algérie en réduisant le nombre de visas octroyés. Plus particulièrement la France qui reçoit l'essentiel des demandes de visas des Algériens. L'Algérie résistera-t-elle face à ces pressions? Trouvera-t-elle un moyen de riposte?