Quel que soit le verdict des urnes, il demeure que la participation en elle-même constitue une prise de position hautement politique. Près de 18 millions d'électeurs sont appelés à se prononcer, demain, sur le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale. Après une campagne électorale, pleine, mais différemment appréciée par la rue et la classe politique algérienne, l'heure décisive est donc arrivée. Le manque de débat autour du document, et la marginalisation des voix discordantes sont les faits majeurs ayant marqué les quarante jours de campagne. Cependant, si l'objectif de l'initiative présidentielle est le rétablissement de la paix, il reste que l'enjeu du scrutin est le taux de participation. Ainsi quel que soit le «verdict» des urnes, il demeure que la participation en elle-même constitue une prise de position hautement politique, par rapport à la réconciliation nationale. C'est aussi un baromètre déterminant de la cote de popularité du chef de l'Etat, qui après le plébiscite d'avril 2004, a besoin d'une confirmation. L'objectif étant de briguer un troisième mandat après la révision de la Constitution dans ce sens. Il est clair que tous les Algériens aspirent à la paix et à la stabilité, mais la question est d'une telle gravité, que toute option serait embarrassante. «Vous êtes appelés à faire un choix difficile», reconnaît le chef de l'Etat lors du meeting animé, lundi dernier, à l'hôtel Aurassi. Abdelaziz Bouteflika qui reconnaît la délicatesse du rendez-vous électoral de ce jeudi, «confie» désormais son projet au peuple. «Vous êtes libres de voter pour ou contre la charte pour la paix et la réconciliation nationale», asséna-t-il devant un parterre composé de jeunes, de familles victimes du terrorisme, de disparus et même d'anciens terroristes, comme les «émirs» de l'AIS de Chlef et de Relizane. Par ailleurs, le taux de participation au référendum dépend de plusieurs facteurs objectifs: le degré de pénétration de la campagne de sensibilisation au sein des différentes franges de la société, l'attitude de l'électorat en Kabylie, après les déclarations de Bouteflika à Constantine, et enfin l'option que prendrait la fameuse majorité silencieuse, qui, pour une raison ou une autre, boude les urnes à chaque rendez-vous électoral. Aussi, et dans ses discours de campagne comptant pour la charte pour la paix et la réconciliation nationale, Bouteflika n'a pas manqué de faire un clin d'oeil en direction de l'électorat féminin. Il a, d'autre part, appelé la femme algérienne à «inciter les hommes, leur époux, leur père et leurs fils, à la paix et à voter oui pour la réconciliation nationale». Après avoir été à l'avant-garde du combat libérateur, et de la lutte contre l'obscurantisme et l'extrémisme, ne cesse de rappeler le chef de l'Etat, la femme algérienne jouera un rôle déterminant lors de ce référendum. Toutefois, Il y a aussi un élément capital susceptible d'orienter l'électorat. C'est l'image que se font les Algériens des élections, souvent assimilées à des «parodies». Les fraudes successives, notamment au milieu des années 90 ont sérieusement entamé la crédibilité des opérations électorales. Pour preuve, les commissions d'enquête parlementaires installées pour élucider la fraude «massive» enregistrée en 1997, lors des élections législatives et locales, sommeillent toujours dans les tiroirs. Cependant, il est difficile de «parier» sur le niveau du taux de participation, sachant qu'il n'existe pas en Algérie un institut de sondage crédible à même de prendre le pouls de l'électorat et partant, anticiper sur le taux de participation approximatif. Ce qui est sûr, c'est qu'à l'exception de la Kabylie et de la capitale où le taux de participation est par tradition faible ou moyen, les régions de l'intérieur du pays enregistreront des taux de participation record, à l'image des régions de l'extrême-sud et est du pays.