La population est appelée à départager les rivalités. La région de Kabylie vivra aujourd'hui une journée électorale très particulière car pleine d'enseignements aussi bien pour la classe politique que pour les citoyens. Au-delà de l'impossible consensus qui continue toujours à miner cette région, la journée d'aujourd'hui se présente comme un véritable test de popularité pour les uns et les autres. A ce titre, la population est appelée à départager les rivalités quant au projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale. La journée d'aujourd'hui traduira aussi et une fois de plus la dispersion des rangs des acteurs politiques de la région. Entre ceux qui appellent au boycott, ceux qui poussent au vote négatif et les archs qui optent, depuis hier, pour une grève générale, il est heureux de constater la sauvegarde du caractère pacifique puisqu'aucun mot n'est soufflé par rapport au traditionnel rejet des rendez-vous électoraux dont les conséquences sont toujours vivaces dans les quatre coins de la région. Et c'est là l'essentiel de l'évolution de la situation politique de cette région meurtrie par quatre années de crise. Une évolution qui aurait pu être encore plus positive n'eut été la sortie pour le moins inattendue du président de la République, à partir de Constantine, quant au statut final de tamazight. Une position qui a fait sortir les archs - affectant ce qui leur reste de représentativité - de leur réserve pour appeler, à l'issue d'une nuit de concertation à Béjaïa, à une grève générale le jour du scrutin. Plus que ça, il faut noter la course électorale qui se cache derrière ces appels diamétralement opposés. Dans tout ce magma de positions, qui dénotent certes une vitalité politique de la région, il y a lieu de relever que ce rendez-vous est vu par toute la classe politique comme un examen qui déterminera la force des uns et des autres avant le rendez-vous des partielles prévu pour le 24 novembre. En fait, toutes les chances des partis qui ont déjà montré leur intention de participer aux locales partielles résident dans les résultats dont accouchera le rendez-vous d'aujourd'hui. Toute cette «agitation» politicienne se déroule cependant dans l'indifférence totale d'une majorité silencieuse qui ne manquera pas de dire son mot d'une façon ou d'une autre le jour du vote. Autant le FFS et le RCD, deux formations politiques fortement malmenées ces quatre dernières années, ont perdu de leur influence sur les populations d'une région qui était à un moment leur bastion, autant les archs n'ont fait que s'éloigner, progressivement et irrémédiablement, de leur base pour cause de divisions et de faux-fuyants. Un schéma qui traduit le renversement de vapeur au profit des positions prônant la paix et la démocratie du président de la République. Dans ce camp, le RND, le FLN, le PT et à un degré moindre les partis islamistes, ont le vent en poupe. La campagne électorale pour le référendum les a amplement revigorés sur le sujet au point de voir gros concernant les partielles. Le plein fait par Mme Hanoune, Belkhadem et le SG de l'ONM soit la tendance soutenant le projet de Bouteflika, ne sont que quelques éléments qui démontrent au-delà de l'attachement des Kabyles à la paix et à la sérénité, le retour de manivelle en faveur des partis sus-nommés. Même les archs, qui font de la question de la langue leur cheval de bataille, semblent opter pour la prudence. L'appel à la grève laisse en effet un large choix aux électeurs dans leur option le jour «J». Cet appel à la grève ne traduit en effet que le mécontentement des archs quant à ce qu'ils considèrent comme «une volte-face du pouvoir par rapport aux conclusions auxquelles aurait, selon eux, abouti le dialogue de mise en oeuvre de la plate-forme d'El-Kseur entamé depuis le mois de janvier 2005». Comme il cache également les craintes et les hésitations des animateurs de l'absence de suivi des citoyens. C'est pourquoi, expliquent certains observateurs, ce choix du juste milieu. C'est donc loin de la violence et dans un esprit pacifique que la Kabylie abordera aujourd'hui le scrutin référendaire portant sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Il est encore trop tôt pour espérer une expression massive mais le vote aura lieu si l'on considère le schéma politique actuel. Au-delà de la sérénité retrouvée, il faut souligner la réhabilitation du politique. C'est là toute l'évolution positive à noter de la situation politique en Kabylie.