Un dossier qui continue d'alimenter la polémique La Fédération allemande de football a rejeté en bloc les accusations de racisme proférées par Mesut Özil qui a claqué avec fracas la porte de la sélection nationale, suscitant un profond émoi dans un pays en pleine interrogation sur l'intégration. «Nous rejetons catégoriquement le fait que la DFB soit associée au racisme, eu égard à ses représentants, ses salariés, ses clubs, les performances de millions de bénévoles à la base», dit la DFB dans un communiqué, assurant «regretter» la décision du champion du monde 2014 de ne plus jouer avec la Mannschaft. Le milieu de terrain d'origine turque, au centre d'une vive polémique depuis une photo en mai où il s'affiche avec le président turc Tayyip Recep Erdogan, n'a pas mâché ses mots à l'encontre du président de la DFB, Reinhard Grindel, un ancien député conservateur et pourfendeur durant sa carrière politique du multiculturalisme. «Aux yeux de Grindel et de ses soutiens, je suis Allemand quand nous gagnons, mais je suis un immigré quand nous perdons», a affirmé le joueur de 29 ans aux 23 buts en 92 sélections dimanche dans une longue lettre publiée en trois parties sur les réseaux sociaux. «Je ne suis toujours pas accepté dans la société», a plus largement dénoncé le joueur, né dans le bassin industriel de la Ruhr et dont le père turc est arrivé à l'âge de 2 ans en Allemagne. Le milieu de terrain peut se targuer néanmoins du soutien d'Angela Merkel qui avait posé avec lui en 2010 pour une poignée de main symbolique alors que l'équipe allemande s'ouvrait lentement à la diversité. «Mesut Özil est un joueur de foot qui a beaucoup fait pour l'équipe nationale», a dit lundi une porte-parole de la chancelière, il a «pris une décision qui doit être respectée». Son club anglais d'Arsenal lui a également exprimé sa solidarité en lançant sur Twitter: «Notre diversité est une grande partie de pourquoi nous sommes un club si particulier». Le joueur, qui est arrivé lundi à Singapour pour une tournée de promotion avec son club, est apparu tout sourire, manifestement soulagé après des semaines de polémique où une partie de la presse allemande, à commencer par le quotidien Bild, ne l'a guère épargné. Le journal a dénoncé lundi «une démission faite de jérémiades décousues» et lui reproche de soutenir «un despote» qui cherche à imposer une «dictature islamiste». Bild attaque aussi son niveau de jeu «lamentable» qui a participé à l'élimination humiliante de la Mannschaft en Russie. A l'extrême inverse, le ministre turc de la Justice, Abdulhamit Gul, louait sur Twitter le «but» d'Özil «contre le virus du fascisme». Certains journaux et politiques, tout en critiquant la virulence de sa démarche, relèvent que le racisme est un problème dans le pays. Car c'est un symbole de l'intégration qui part à l'heure où l'extrême droite connaît un essor sans précédent depuis 1945 avec le parti Alternative pour l'Allemagne (AfD). Le quotidien berlinois Tagesspiegel dénonce lui «l'ambiance populiste dans le pays. Le départ de Mesut Özil est une césure sportive, politique et sociétale». Le président de la communauté turque d'Allemagne, Gökay Sofuoglu, a jugé que «la diversité» de la Mannschaft était menacée alors qu'elle était jusqu'ici un «modèle». Le joueur qui n'a jamais caché sa foi musulmane est déjà depuis deux ans la cible favorite de l'AfD. Une cheffe de ce parti, Alice Weidel, a donc estimé lundi que Özil était «un exemple typique de l'échec de l'intégration des gens venant du monde turco-islamique».