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La Tunisie séduit toujours les Algériens
MÊME SI ON NE SE BOUSCULE PAS AUX PORTES DE CARTHAGE
Publié dans L'Expression le 07 - 08 - 2018

En dépit des taxes, hausse des prix et «le couvre-feu» imposé par certains hôtels en Tunisie, aux touristes algériens, ces derniers ne semblent pas détourner la tête de cette destination pour passer leurs vacances.
Embouteillage aux portes est de l'Algérie. Les postes frontaliers avec la Tunisie, d'Oum T'boul et El-Ayoun, Lahdada et Bouchebka sont submergés de touristes algériens en partance vers les stations balnéaires de Hammamet El Yasmine, Sousse et Djerba entre autres. Sur place l'affluence est bien visible, en témoignent les longues chaînes de voitures attendant d'accomplir les formalités de passage en Tunisie. Une attente qui peut durer plusieurs heures des deux côtés. Les plaques d'immatriculation de toutes les wilayas du pays, en disent long sur l'affluence des Algériens sur ce pays voisin. Ce rush s'explique par la volonté de rattraper des vacances perturbées par les examens de fin d'année. Poste frontalier d'Oum T'boul, 4 août 2018. Il est 10h30 et déjà une file importante de voitures immatriculées de plusieurs wilayas du pays et de l'étranger sont en attente devant les locaux de la police des frontières et des douanes algériennes. La procédure est la même dans tous les postes de contrôle algériens.
Les douanes algériennes à pied d'oeuvre
Pour mieux gérer le flux vers la Tunisie, durant la période estivale, la direction générale des douanes algériennes a renforcé les équipes dans tous les postes frontaliers, avec la Tunisie. Tous les postes travaillent 24h/24h. Il faut signaler que les 70% des touristes algériens empruntent le poste d'Oum T'boul «Cela représente souvent une grande pression sur les agents des douanes et de la PAF», nous a indiqué un douanier. «Par moments, on oriente certains passagers vers d'autres postes comme celui d'El Ayoun, à El-Kala, pour équilibrer un peu le flux», a cexpliqué le même douanier. En dépit des grands moyens humains et matériels dont sont dotés les postes de contrôle dans ces zones frontalières, il demeure, néanmoins que, la pression du flux reste insoutenable, notamment durant les fortes chaleurs. Il faut dire que la haute saison draine près de 5000 à 8000 passagers/J et 2500 à 3000 véhicules par poste. Bien que la tâche ne soit pas des moindres, pour les éléments des douanes et ceux de la PAF, le travail se fait, comme il se doit. Contrôle assisté, vérification de papiers, passage à la douane et c'est fait. Bien qu'il y ait une grande file, la vérification de papiers est rapide. Notons que Oum T'boul est le poste frontalier algérien le plus fréquenté de la zone est du pays. Ce père de famille nous dit qu'il est là, depuis trois heures du matin, et il est 11 heures, il vient tout juste d'accomplir les formalités de passage. «Il va falloir attendre encore plus de l'autre côté de la frontière, avant d'arriver à Tunis-ville», a déploré notre interlocuteur. Les sempiternelles attentes semblent être le désagrément dans tous les postes de contrôle des deux côtés des frontières. Puisque les Tunisiens entrant en Algérie, doivent passer par ces mêmes points de contrôle et accomplir les mêmes procédures douanières, dispensées par les services de douanes et de la PAF algérienne. Dans ce sens, il y a lieu de noter qu'ils sont entre 1100 et 1300 voitures à passer les frontières algériennes, et 10.000 à 12.000 Tunisiens à franchir chaque semaine les postes frontaliers est du pays. La plupart font leurs emplettes en vaisselle, vêtements, alimentation générale et autres produits de large consommation, dans les espaces commerciaux des différentes villes de l'Est du pays, El-Eulma, Tadjenanet, Annaba et El-Tarf, notamment. Et bien entendu, ils repartent avec le plein de carburant. Mais si certains Tunisiens font du tourisme commercial, d'autres font du vrai tourisme, pour découvrir le pays de El Amir Abdelkader, de Zabana, de Yemma Gouraya, entre autres. Contrairement aux Algériens qui, depuis des années déjà, ont fait de la Tunisie, leur première destination, aux fins de jouir des prestations qu'ils ne trouvent pas chez eux. Ce qui explique le flux grandissant d'année en année. Les chiffres enregistrés en cette période seraient de l'ordre de 5000 jusqu'à 8000 touristes / j. La journée du 1er août a enregistré 11.700 passagers. Contrairement à l'année dernière, où il a été enregistré à la même période entre 7000 et 10.000 touristes algérien/j, avec quelque 13.000 passagers.
Les raisons du recul du flux
Pour le Tunisien Chérif Samadhi, expert en tourisme, le nombre de touristes algériens à quelque peu diminué, d'une part, après, la prétendue mésaventure vécue par certaines familles algériennes en Tunisie. L'incident a été, rappelons-le, démenti par la Fédération tunisienne de l'hôtellerie. Et d'autre part, selon notre expert, le recul du flux des Algériens est dû entre autres, à l'augmentation de 30% des tarifs des prestations hôtelières tunisiennes, la cherté de la vie, la dévaluation du dinar tunisien. Au-delà de ces propos, c'est la place des touristes algériens, par rapport au tourisme haut de gamme. Comme expliqué par Naoufel Jdidi, responsable d'une agence de voyage à Sousse.
Le retour des tour-opérateurs
La stabilité de la situation sécuritaire semble favoriser le retour en force des touristes étrangers en Tunisie. C'est pourquoi les Algériens n'ont pas leur place dans les hôtels haut de gamme. Ces tour-opérateurs (TO) européens:français, allemands, anglais et américains, en plus avec l'émergence de deux marchés qui sont la Russie et la Chine, cela représente un potentiel touristique pour la Tunisie dont, l'économie nationale se base à 80% de la rente de se secteur, le tourisme en l'occurrence. Une équation à l'origine de l'augmentation considérable des prix dans les structures hôtelières. Pour 45% de flux de touristes français et 42% de touristes allemands, auxquels s'ajoutent les Russes avec 53% et les Chinois avec 46%, les Algériens ne font pas le poids, même dans les hôtels à trois et quatre étoiles.
Forte concurrence des agences de voyages
Cette concurrence, du moins du côté des tour-opérateurs est le résultat de traditions liant ces dernières à la Tunisie. Ces traditions encrées dans le temps et dans l'espace entre les deux parties ont fait en sorte que les Tunisiens préfèrent récupérer leurs clients, les TO en leur vendant en priorité leurs produits. Car, faut-il le noter, et comparativement à ces traditionnels clients, les TO en l'occurrence, les agences de voyages algériennes ne commercialisent que 1000 à 3000 touristes. Un nombre qui ne peut en aucun cas rivaliser devant ceux des TO. Ces derniers qui, selon plusieurs responsables d'hôtels tunisiens, achètent des packs en inclusive, pour toute l'année. «Le pack compte des milliers de lits de 100.000 à 450.000 /ans, tout le long de l'année», nous dira, un responsable de l'Orient palace à Sousse. Et c'est là, la notion du tourisme pour les Tunisiens dont la vision a une portée à long terme. Car, faut-il noter, les Algériens sont des touristes de la haute saison et non des quatre saisons, comme c'est le cas de ceux générés par les TO. Par ailleurs, si un grand nombre de touristes algériens ont boudé le pays voisin, ce n'est pas uniquement, du fait de la politique de commercialisation du produit, soumise au principe de l'offre et la demande, mais c'est aussi à cause de certaines mesures imposées dans certains hôtels. Comme l'augmentation de 30% des tarifs du séjour et la limitation des heures de retour à l'hôtel. «On est obligé de rentrer à l'hôtel avant 23 heures», nous confie ce père de famille. «C'est un vrai ' couvre feu'' qu'on nous impose dans cet hôtel à Tunis ville», nous confie ce touriste algérien originaire de Bouira.
Les Algériens ne sont pas boudés
Bien au contraire, les Algériens ont leur place dans le tourisme tunisien, comme c'est le constat dans plusieurs villes de ce pays voisin. Ils sont les biensvenus là où ils vont. De Hammamet jusqu'à Sousse en passant par Monastir et Djerba, les touristes algériens sont bel et bien présents. Certes, la baisse du nombre de touristes algériens à se rendre en Tunisie en cet été 2018 est de l'ordre de 20 à 25%. Comparativement à l'année dernière, où, plus le nombre d'Algériens ayant passé leurs vacances en Tunisie a franchi la barre des 70%. Cette baisse de flux des Algériens sur la Tunisie, a, tout de même occasionné des pertes à hauteur de 300 à 350 millions d'euros. Néanmoins, et selon les estimations de l'Office tunisien du tourisme (OTT) quelque 2,5 millions de touristes algériens devraient séjourner en Tunisie cette année. La baisse du flux d'Algériens sur le pays voisin, s'explique selon plusieurs acteurs du tourisme, du côté des deux frontières par, d'une part, les résultats des examens de fin d'année, le bac et les inscriptions à l'université, et d'autre part, l'approche de l'Aïd El Adha, prévu cette année le 22 du mois en cours. Deux événements qui ont quelque peu retardé le départ des Algériens vers la Tunisie, et aussi écourté, les séjours de certains. S'agissant du soi-disant incident du refoulement des familles algériennes par les hôteliers tunisiens, la question a été démentie à l'unanimité, tant par les responsables du pays voisin, que par les touristes algériens rencontrés. «Il s'agissait d'un malentendu qui a aussitôt été réglé et pris en charge. Il n'était pas question d'hostilité encore moins de discrimination», nous dit-on. Si Hasnaoui, est un habitué de la ville de Sousse, à bord de son véhicule immatriculé à Ain M'lila, rencontré à la sortie de la PAF, semble bien satisfait de ses vacances: «Pas mal, oui, j'ai passé un mois sur l'île de Djerba, on a été bien traité, juste qu'ils considèrent les touristes comme des pigeons, ils tentent par tous les moyens de vous soustraire de l'argent», a lancé avec un grand sourire le sexagénaire.
Qu'en pensent les Tunisiens?
Quant au bon nombre de Tunisiens et d'Algériens apostrophés sur les touristes algériens, la majorité a d'emblée, évoqué les liens de voisinage, de fraternité et de solidarité. «Nous sommes liés par les rapports de rapprochement sociaux, religieux, du voisinage avec l'Algérie», nous ont dit les uns. D'autres se sont rappelés l'élan de solidarité et de soutien surtout, lors des attaques terroristes perpétrées en Tunisie. «Le peuple algérien a toujours été au côté du peuple tunisien, après les attentats terroristes qui ont ciblé Sousse et Bardo. Des attentats qui rappelons-le, ont fait plusieurs morts et blessés parmi des touristes étrangers, se trouvant sur les lieux. Ces drames ont été le coup de grâce porté au tourisme en Tunisie», ont fait savoir plusieurs Tunisiens. Ces derniers ont vivement salué le courage des Algériens. «Les touristes algériens ont défié les ordres et menaces des terroristes et sont venus par milliers faire du tourisme en Tunisie, cet élan de solidarité, restera à jamais gravé dans la mémoire des Tunisiens», a estimé Mounder, dont les propos s'alignent avec tant d'autres Tunisiens. Ces derniers estimant à leur juste valeur, les potentiels touristiques de l'Algérie, le touriste algérien choisit de passer ses vacances en Tunisie et fait beaucoup de dépenses pour, aider le tourisme tunisien à remonter la pente. Ces Tunisiens et d'autres rencontrés à Annaba, voient en les touristes algériens, non pas des hôtes bienvenus, mais des amis et frères proches. «Les Algériens en Tunisie ont la même place que nous en Algérie. Nous faisons des allers et retours en Algérie, notamment dans cette belle ville de Annaba, où l'on se sent chez nous», a ajouté Mounder. Alors qui a dit que les Algériens boudent la Tunisie? La réponse à cette question se trouve au bout des files d'attente des véhicules, venus des quatre coins du pays à destination du pays de Carthage. Car, cette destination fait toujours rêver les Algériens.


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