Plus de deux années après le déclenchement de la révolution de Jasmin et malgré la vague de violences qui secoue ce pays, la Tunisie est, cette année encore, une des destinations privilégiées des Algériens... Au lendemain du mois de Ramadhan et des fêtes de l'Aïd, de nombreux touristes algériens ont pris la route des vacances en direction de la Tunisie, principalement vers Tabarka, la ville balnéaire la plus proche. Il va sans dire que Sousse et Hammamet, autres hauts lieux touristiques de ce pays voisin, attirent également les estivants nationaux. Le manque, voire l'absence de complexes touristiques dans les villes côtières de l'extrême Nord-Est en général expliquent en partie ce rush, selon beaucoup de personnes rencontrées, il y a quelques jours, au poste frontalier d'Oum T'boul. Celles-ci reconnaissent que leur choix est aussi motivé par le savoir-faire et le professionnalisme du personnel hôtelier des stations balnéaires de ce pays et surtout pour la quiétude qui caractérise ces lieux, ce qui n'est pas peu dire... Nos interlocuteurs du moment, des gens de Annaba voyageant en famille, indiquent que leur plan de vacances a failli être quelque peu chamboulé après l'assassinat, en plein milieu du mois de Ramadhan, du député de l'opposition Brahmi et notamment après l'attentat meurtrier ayant ciblé un groupe d'éléments des forces de sécurité sur les hauteurs du mont Chaâmbi, un massif du gouvernorat de Kasserine, situé à 300 km au sud-ouest de la capitale tunisienne. Des informations alarmantes avaient circulé suite à ces deux faits sanglants, affirmant dur comme fer que les villes touristiques tunisiennes sont devenues des zones à haut risque pour les étrangers et que, plus grave, une "chasse aux Algériens" aurait même eu lieu dans certains endroits. À la veille de l'Aïd el-Fitr, certains gérants d'agence de voyages, de Annaba notamment, avaient craint le pire pour leur activité lorsqu'ils ont eu écho que, pratiquement, la totalité des vacanciers locaux, ainsi que ceux de plusieurs wilayas de l'Est et du Centre, qui avaient programmé des vacances en Tunisie, seraient sur le point d'annuler leur booking prévu juste après le mois de Ramadhan. En fait, il n'en est rien, puisqu'aucune annulation n'a été formulée, et nous apprenons, qu'au contraire, des familles se bousculent aux portes des agences pour s'inscrire. Pour s'enquérir de la situation, il suffit de faire une balade de Annaba aux postes frontaliers d'Oum T'boul et El-Ayoun. Sur le chemin, il est loisible de constater que le flux automobile sur la RN 44, qui était pratiquement nul durant le mois de Ramadhan, a repris de plus belle, notamment à partir d'El-Kala et du chef-lieu de wilaya vers les postes frontaliers, dans les sens de l'aller et du retour. Fait inédit cette année, nous croisons presque autant de véhicules immatriculés dans les deux pays, alors que la tradition nous avait habitué au mouvement exclusif des véhicules algériens en pareille saison dans cette région. Dès son arrivée au village d'Oum T'boul, le visiteur est de prime abord choqué par la présence en force des cambistes, ces agents de change informels qui proposent à la vente et à l'achat : euro, dollar, dinar tunisien et autres devises étrangères, selon la nécessité du moment. Nous apprenons qu'ils font partie du quotidien du principal boulevard de la commune, depuis des années déjà. Ils ne cachent même pas leur activité, pourtant dans un créneau totalement illicite. Ils sont alignés tout le long de l'un des trottoirs du centre de cette localité, des liasses de billets de banque à la main et proposant à haute et intelligible voix "le change" à quiconque passe à leur hauteur. Une chose est sûre, les devises sont moins chères sur le marché informel que dans les banques. Mais attention, les transactions ne sont pas toujours évidentes ! Implanté sur les hauteurs de la zone boisée de Lahdada, ce poste grouille de monde à notre arrivée sur les lieux, vers 8h30. Des dizaines de véhicules font déjà la file dans les deux sens en attendant de se faire contrôler. Fort heureusement, des mesures relatives à l'amélioration des conditions d'accueil et de transit des passagers ont été prises par les services de la douane et de la Police des frontières (PAF) algériennes. L'inspecteur principal de visite de la douane fait état, à ce propos, de l'ouverture par ses services pour cette saison estivale d'un "couloir familles" et d'un "couloir vert" afin de faciliter le mouvement des passagers dans les deux sens. Le même responsable indique que depuis l'après-midi du 1er jour de l'Aïd, le mouvement des voyageurs s'est sensiblement accru, alors qu'il était pratiquement nul durant le mois sacré. "Une moyenne de 1 800 véhicules, dont plus de 1 000 immatriculés en Algérie et 600 en Tunisie, est enregistrée quotidiennement", affirme-t-il. Une fréquentation qui demeure toutefois en deçà de celle de l'été 2012, saison durant laquelle le trafic a atteint le pic de 4 000 véhicules/jour. Le responsable régional de la PAF affirme qu'aucune plainte n'a été enregistrée Notre virée sur les lieux a coïncidé avec la visite de Hichem Noubli, le chef du service régional de la Police algérienne des frontières (PAF), dont le siège est implanté à Souk-Ahras. Interrogé sur les informations faisant état d'agressions de touristes algériens, voire d'émigrés qui rentrent au pays via la Tunisie, l'officier de police a tenu à porter un démenti officiel aux rumeurs qui ont circulé à propos de la prétendue hostilité des Tunisiens envers les Algériens. Il s'est surtout montré rassurant sur la situation des milliers de touristes algériens qui ont choisi de passer leurs vacances en Tunisie. "Aucune plainte n'a été enregistrée ni déposée par des Algériens ou autres, durant ces deux derniers mois, aux différents postes terrestres frontaliers des wilayas d'El-Tarf, Souk-Ahras ou Tébessa", a-t-il affirmé. Notre interlocuteur a annoncé, par la même occasion, l'installation très prochaine de 4 boxes, chacun doté de deux guichets de contrôle au poste frontalier d'Oum T'boul, afin de traiter les passagers à l'intérieur même de leur véhicule et ainsi réduire les délais d'attente. Au poste commercial d'El-Ayoun, où le mouvement des voyageurs est limité, un des policiers nous signale qu'on est bien loin des 500 à 600 véhicules, principalement des poids lourds, et des 1 000 passages quotidiens entre visiteurs entrants et sortants des années écoulées. De plus, les éléments des Douanes algériennes et ceux de la PAF affirment que le mouvement des voyageurs est rare, voire inexistant la nuit, et ce, en raison de l'aspect sécuritaire qui prévaut en Tunisie. De son côté, M. Noubli a reconnu la baisse sensible du nombre de touristes algériens en Tunisie cette année, sans pour autant donner d'explications, estimant qu'il est encore tôt pour se prononcer sur cette question, la saison de pointe étant à peine entamée. B. B. Nom Adresse email