Habituellement, on dit que «le linge sale se lave en famille». Or, cela ne semble pas s'appliquer au football algérien. Les scandales se suivent et sont révélés au grand public, repris par les médias et diffusés, ensuite, à grande échelle sur la Toile, faisant qu'ils prennent une autre proportion. Cela a été le cas, une fois de plus, jeudi dernier, lors des travaux de l'Assemblée générale ordinaire (AGO) de la Fédération algérienne de football (FAF), au Centre technique national (CTN) de Sidi Moussa, à Alger. Comme cela s'était passé 48 heures auparavant lors de l'AGO de la Ligue de football professionnel (LFP), les responsables qui dénonçaient «la gestion opaque» de la FAF ont fini par adopter les bilans moral et financier. Qualifiés depuis le temps de «b'ni oui, oui» (ceux qui adoptent tous les bilans, Ndlr), ces responsables ont prouvé, une fois de plus, qu'ils le sont, puisqu'aucun d'entre eux n'a osé évoquer les sujets d'actualité, notamment ceux liés à la corruption. Au moment d'approuver les deux bilans, le chapiteau ayant abrité les travaux de l'AG a été garni par la couleur verte, celle des papiers avec la mention «Oui». Quoi de plus beau comme verdict pour Kheïreddine Zetchi et ses collaborateurs, qui ont fini par sortir grands gagnants de cette journée. Seule personne ayant dénoncé ouvertement la gestion actuelle de la FAF et révélé plusieurs affaires scrabbleuses, n'est autre que Mohamed Raouraoua, qualifié de «bourreau de Zetchi». Ce que l'actuel vice-président de l'Union arabe de football a révélé reste, le moins que l'on puisse dire, grave. Très grave même, dans le sens où ces révélations, si elles s'avèrent vraies, mettront dans l'embarras son successeur, «imposé par l'ex-ministre de la Jeunesse et des Sports, El Hadi Ould Ali». Raouraoua a été interdit d'intervenir, sous prétexte que dans la demande qu'il a introduite pour prendre la parole, «il manquait l'objet de l'intervention». Mais cela ne l'a pas empêché de hausser le ton avant de quitter les lieux, en tirant sur tout le monde. Zetchi lui a fait rappeler que les AG en son temps (Raouraoua) ne duraient qu'une dizaine de minutes et que tout le monde votait «Oui» sans débattre. «Dans ce cas, tu es aussi un b'ni oui, oui», a lancé Raouraoua à Zetchi avant de sortir. En dehors du chapiteau se trouvaient les journalistes, dépêchés par leurs organes pour couvrir ces travaux. Mais en réalité, couvrir quoi? Selon le programme de la couverture médiatique publié par la FAF, les représentants des médias assisteront à l'ouverture des travaux, l'hymne national, la vérification du quorum, l'annonce de l'ordre du jour, la minute de silence à la mémoire des sportifs décédés en 2018 et la cérémonie de remise des médailles. Ceci, avant de quitter les lieux dès le début des travaux pour s'installer dans «un espace avec collation». Face à ces journalistes, Raouraoua est revenu sur l'«incident» qui a eu lieu avec le membre du Bureau fédéral, Amar Bahoul. «C'est un problème entre lui et moi. Oui, je n'ai pas serré la main à Bahloul. Je ne suis pas un hypocrite. La FAF n'avait pas à s'en mêler. Si je suis un cauchemar pour certains, cela est leur problème.», a-t-il dit. Et de révéler: «J'ai constaté un trou financier de 12 milliards de centimes par an, soit un milliard versé chaque mois à une partie inconnue, j'ai demandé des explications au comptable, mais c'est Zetchi qui intervient pour me dire que c'est versé à l'encadrement technique!». Raouraoua a laissé soupçonner, sans citer le nom, que cet argent est versé à l'ancien sélectionneur national, l'Espagnol Lucas Alcaraz, qui aurait eu gain de cause dans son affaire avec la FAF au niveau de la FIFA. Chose démentie par Zetchi lors de sa conférence de presse en indiquant que le dossier du technicien en question est toujours en cours de traitement au niveau de la FIFA. «Aussi, il faut savoir que nous n'avons déboursé aucun centime dans cette affaire mis à part ses salaires quand il était en poste», a-t-il affirmé. Raouraoua révélera encore un autre dossier: «Concernant le montant de 1.,9 million d'euros relatif au contrat signé avec l'équipementier Adidas pour l'Equipe nationale, c'est du pur mensonge. La FAF a traité avec un revendeur et non avec la maison mère, et je peux vous montrer une correspondance du DG d'Adidas pour le confirmer. Aucun équipementier ne propose 1,9 million d'euros par an. Le maillot dévoilé pour la CAN-2019 coûte 3 euros. C'est honteux! En plus, signer un contrat avec le constructeur automobile KIA pour un montant de 6 milliards de centimes par an, est ridicule.» Raouraoua, qui a indiqué qu'aucun contrat n'a été signé avec l'ENTV et Coca-Cola, a encore taclé Zetchi concernant l'annulation du projet de l'hôtel en question, et son remplacement par les centres de formation. «Les centres de formation sont du ressort des clubs et non de la Fédération», a-t-il précisé. Raouraoua a affirmé que ces dossiers n'auraient pas été dévoilés au grand public n'était-ce le fait de lui avoir interdit de parler lors des travaux de l'AG. «Ce n'est pas de mes habitudes de parler ainsi aux journalistes. Ce que j'avais à dire, j'aurais aimé le dire à l'AG face aux personnes concernées. Mais ces dernières n'ont pas le courage qu'il faut pour m'affronter», a regretté l'ancien patron de la FAF, accusé ensuite par Zetchi «de vouloir diviser la famille du football». La «guerre» entre les deux hommes est, pour ainsi dire, lancée et d'autre révélations de part et d'autre devraient intervenir dans les jours à venir. Wait and see...