Alors qu'un avis d'appel d'offres international est sur le point d'être lancé Dans la rue, les cafés et les différents endroits et lieux publics, les Constantinois abordent quotidiennement des sujets liés à la société, à la politique et à l'économie. On parle du président et de son retour au pays, de la délinquance et l'insécurité, des lois sur la corruption, mais aussi de ce projet relatif à la réalisation d'un tramway qui a suscité une «polémique extraordinaire». Un projet qui est sur le point d'être réalisé au détriment de la prison d'El Koudiat et du groupement de la Gendarmerie nationale. En effet, l'étude semble pratiquement achevée par le bureau d'études français auquel a été confié le projet «Pamagalesky», et un avis d'appel d'offres international ne tardera pas à être lancé pour l'exécution des travaux. Selon des sources sûres, le montage financier dépendra du ministère des Transports et de l'APC de Constantine, sachant que le projet a bénéficié d'une autorisation de programme (AP) sur le sectoriel. Les mêmes sources ont précisé que ce projet est appelé à desservir toute la partie haute de la ville des Ponts pouvant permettre la résolution d'importants problèmes de transport urbain. Le projet est également appelé à couvrir une zone regroupant près du quart de la population de Constantine grâce à un moyen de transport adapté à la configuration de cette zone. Mais si les autorités locales sont favorables à ce projet, nombreux sont les opposants qui continuent de militer pour sauver le centre pénitencier d'El Koudiat surtout, et du groupe de la Gendarmerie nationale du fait de l'importance historique de ces sites. On se rappelle que dans une lettre d'opposition adressée au premier magistrat du pays, des associations à caractère culturel telles que l'Association pour la défense du Vieux-Rocher, il est revendiqué l'intervention du président. Les opposants, comme beaucoup de Constantinois, considèrent que cette lancée, qualifiée de préméditée, n'est pas le fruit du hasard et est loin d'être «innocente». C'est une lancée «criminelle» qui ne vise en fait qu'à anéantir l'histoire de toute une nation. Les autorités locales dont le P/APW, savent que le centre pénitencier d'El Koudiat est une infrastructure «historique» qui a été classée «patrimoine» en 1992. C'est là aussi où l'armée française détenait les moudjahidine les plus connus tels que Ben M'hidi, Ben Boulaïd et Boussouf. Ce fut le centre également où beaucoup d'entre eux ont été exécutés à la guillotine et où beaucoup avaient vécu les pires tortures et châtiments. Effacer ce centre, c'est effacer la mémoire de nos ancêtres, a estimé l'association. La disparition de la prison d'El Koudiat, c'est aussi la disparition de cette «tache noire» de l'histoire de la République française, laquelle cherche par tous les moyens, contre vents et marées, à se débarrasser de ce qu'on a qualifié «de complexe des Français». Les opposants et à leur tête l'Association pour la défense du Vieux-Rocher déclarent: «Le projet confié par hasard à un bureau d'études français, cache une ´´arrière-pensée politique´´ lourde de conséquences et aux visées sournoises qui dissimule l'envie ambitieuse de la République française de détruire un symbole de la révolution algérienne.» Sur les pages de la guerre de Libération, la prison, d'El Koudiat faut-il encore le rappeler, est le témoin incontournable de l'exécution d'un jeune de 19 ans par l'armée française. Elle est aussi le témoin de «l'évasion» historique du chahid Ben Boulaïd. Les opposants s'interrogent sur la complicité des autorités locales à vouloir exécuter un projet qui vise tout simplement à détruire un patrimoine historique. Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que l'ex-wali de Constantine, M.Sekrane, actuellement wali d'Oran, n'était pas favorable à ce projet. Il avait déclaré quelque temps avant sa nomination à la tête de l'exécutif de la wilaya d'Oran: «La prison d'El Koudiat et le groupement de la gendarmerie ne seront pas démolis.» S'exprimant contre cet avis, le P/APW insiste sur la question de la démolition estimant que le projet de tramway est une véritable révolution pour la ville des Ponts. Le P/APW, défendant son point de vue, avait dans un point de presse déclaré: «Le groupement de la Gendarmerie nationale ne peut pas demeurer à l'endroit actuel, puisque d'ici 2010 le groupement régional de cette institution sera transféré à la nouvelle ville Ali-Mendjeli.» Pour la prison, qui représente un symbole de l'histoire de la révolution algérienne, le FLNiste (P/APW) qui avait épaulé la candidature d'Ali Benflis lors des dernières élections présidentielles du 8 avril 2004, propose: «On pourrait élever une stèle pour le chahid Mostefa Ben Boulaïd pour finir avec la revendication ´´historique´´. Cette déclaration n'est guère appréciée par beaucoup de Constantinois, car «en finir avec la revendication historique» ne sera pas chose facile, car vouloir faire de la révolution algérienne un coup d'épée dans l'eau et un fait insignifiant serait un crime total. Les opposants, qui ne comptent pas se laisser faire, soulignent que ce projet a même porté atteinte à la République et tend à raser une partie de la mémoire collective. Par devoir à la mémoire collective, le centre pénitentiaire d'El Koudiat est considéré par beaucoup comme un document et un livre ouvert où sont gravés les douleurs et l'héroïsme des martyrs algériens. Pour les opposants, au lieu de détruire dans le but de desserrer l'étau et résoudre la crise du transport, pourquoi ne pas transférer les administrations. Ils (opposants) estiment qu'à présent, il est plus que nécessaire que l'on prenne l'exemple des «murs» et même des «Juifs» qui ont toujours tenu à préserver les symboles des crimes contre l'humanité que sont l'esclavage pour les Noirs et la torture pour les Juifs. Combien va coûter la démolition?, sachant que le coût de la réalisation du tramway est de 17,1 milliards de centimes. L'Etat dépensera beaucoup moins en transférant les administrations hors du centre-ville. Et c'est là une solution salutaire. De l'avis des experts, il est techniquement impossible du fait de la complexité de l'architecture du Vieux-Rocher, de réaliser un tel projet. La phase de sa faisabilité propose d'éliminer le corridor sud au détriment des zones est et nord. Le projet propose de détruire certaines propriétés privées, sachant que l'itinéraire allant dans la même direction est sur le tracé du quartier Boumedous long de 9 km, qui partant de la place des Martyrs emprunterait l'avenue Abane-Ramdane et le stade Ben Abdelmalek situé à côté d'une zone militaire, Boumerdès, Che Guevara, pour relier Zouaghi. Donc techniquement, selon les experts algériens, le projet serait une catastrophe. Les opposants en tout cas ne sont pas prêts à laisser libre cours aux ambitions de ceux qui veulent détruire des édifices historiques. Un appel de soutien a été lancé par les opposants pour sauvegarder le symbole historique. Logiquement, détruire le centre pénitentiaire d'El Koudiat et le groupement de la gendarmerie relève des ministères de la Défense et de la Justice qui n'ont pas dit leur «dernier mot».