La justice militaire disposait visiblement d'assez de preuves pour condamner Saïd Bouteflika, Toufik, Tartag et Hanoune. L'enregistrement de la fameuse rencontre où ont été établis les faits que leur reproche le tribunal militaire, mais également la nature même du lieu, considéré par le tribunal d'«enceinte militaire, la résidence Dar El Afia», dans un communiqué rendu public, hier. Les accusés étaient confrontés à une preuve matérielle, qui a sans doute pesé lourdement sur le verdict prononcé par le président du tribunal militaire de Blida. Même si le communiqué en question n'est pas revenu en détail sur le déroulé du procès, il est entendu que la pièce présentée par l'accusation et les témoignages entendus dans l'enceinte du tribunal semblent avoir eu un effet déterminant sur le cours des débats et des délibérations. De fait, depuis hier, donc, on ne parle plus d'accusés, la justice a tranché, les têtes de la «bande» ont été jugées, et sont coupables des faits qu'on leur reproche. Le procès de Saïd Bouteflika, Tartag, Toufik et Louisa Hanoune, poursuivis pour « complot contre l'Etat pour le changement du régime», qui a débuté ce lundi 23 septembre, s'est achevé tard dans la soirée du mardi à mercredi. Le tribunal a condamné les quatre accusés à 15 ans de prison ferme, tandis que les accusés absents, en l'occurrence, Khaled Nezzar , Lotfi Nezzar et Farid Benhamdine ont été jugés par contumace à 20 ans de prison ferme. Dans ce sens, le communiqué du tribunal militaire de Blida, précise que «avant la clôture de l'audience, le président du tribunal a, conformément à la loi, averti les condamnés qu'ils avaient le droit d'interjeter appel de la sentence devant la Cour militaire d'appel, dans un délai de 10 jours qui suivent le prononcé du jugement. L'audience du tribunal militaire de Blida s'est déroulée dans le strict respect des règles du Code de justice militaire et du Code de procédure pénale et tous les droits et toutes les garanties pour un procès juste et équitable ont été observés.» Pour Me Khaled Berghol, avocat de Athmane Tartag contacté au téléphone « le verdict est lourd et au vu des charges retenues contre les accusés, et le réquisitoire du procureur, le collectif des avocats ne s'attendait pas à ce verdict. Ceci dit, les accusés ont décidé de faire appel». De son côté, l'avocat de Louisa Hanoune, Me Boudjemaâ Ghechir confirme cette option. «Evidemment, nous allons faire appel. Nous ne sommes pas satisfaits du verdict, car ce qu'elle fait entre dans le cadre de son activité politique. Elle n'a pas dévié de sa mission et n'a fait qu'exprimer son avis devant le conseiller du président Bouteflika.» Par ailleurs, Me Farouk Ksentini avocat du général Toufik a estimé que «la peine de 15 ans dont a écopé ce mercredi l'ancien chef du DRS, est exagérée et nous allons faire appel sous 10 jours». Cela étant, à l'ouverture du procès que tous les Algériens attendaient, l'audience a été marquée par le mutisme de Saïd Bouteflika qui avait refusé de répondre aux questions du juge, sous prétexte que des documents ajoutés à son dossier, n'ont pas été consultés par la défense, alors que Athmane Tartag, et le général Toufik ont refusé de comparaître devant le juge. Ce à quoi le juge a tenu, dans le respect des règles de la justice, de rappeler aux accusés, que leur refus de comparaître n'empêcherait pas leur jugement. Suite à quoi, la défense avait misé sur la stratégie du report du procès, avançant les arguments de l'état de santé de Louisa Hanoune et de Toufik, mais c'était sans compter sur la clairvoyance de la justice qui a fait procéder à une visite médicale effectuée par des médecins militaires avant de refuser cette requête, au même titre qu'elle a refusé la demande de la défense pour le transfert du procès sur un tribunal civil. Au 2e jour du procès, les choses se sont accélérées, avec les aveux du général Toufik, confirmant sa présence à la fameuse réunion du 27 mars, indiquant que celle-ci visait à proposer à l'ex-président Liamine Zeroual de mener une période de transition. Suite à quoi, la séance de l'après-midi du 2e jour du procès a été consacrée à la comparution devant les juges, de Louisa Hanoune, des chauffeurs qui ont conduit les personnalités au lieu de la rencontre et des techniciens qui ont assuré l'enregistrement de cette dernière. S'en est suivi tard dans la nuit de mardi, les plaidoiries des avocats et le réquisitoire du procureur qui avait demandé une peine de réclusion criminelle de 20 ans pour les quatre accusés, pour finalement laisser place aux délibérations de la cour, qui ont abouti au verdict rendu public hier.