«Quand l'islam va mal, la voix de la raison peine à se faire entendre». Cette synthèse fertile en idées est née d'un des ouvrages de Malek Chebel, un des nombreux intellectuels algériens qui ont réussi magistralement à poser les jalons d'une réflexion éclairée de l'islam au sein même de l'Occident libertaire, multiple et dominateur. Il était, lundi dernier, à Constantine où il a animé durant l'après-midi une conférence à l'université Mentouri intitulé «Pour un islam des lumières». C'est devant une assistance «appréciable» composée essentiellement d'étudiants en sciences islamiques, enseignants et hommes de lettres. L'auteur de L'Islam et la Raison a tenu, avant tout, à exprimer sa grande émotion d'être à Constantine et de préciser: «Ma visite était programmée bien avant la situation actuelle, c'est-à-dire avant l'affaire des caricatures.» Avant d'aborder le premier thème, il a aussi tenu à signaler: «En toute confidence, je ne parlerai ni d'Allah, ni du Prophète, ni du Coran, car je ne sais pas en parler et je n'ai pas cette vocation». Pour Malek Chebel, l'islam d'aujourd'hui est un islam des lumières et il sera porteur de progrès, comme il a toujours été porteur de civilisation. Selon lui, il est essentiel de redonner à la parole tout son sens et son poids pour que l'islam redevienne cette religion dynamique. Et surtout pour ne pas donner à ses ennemis des arguments pour le combattre. Pour Malek Chebel, il est plus que vital de redonner toute l'autorité à la parole et l'expression dans les pays arabes et musulmans. La riche diversité qu'incarne le monde musulman où les Arabes ne constituent qu'une minorité, doit être canalisée par la communication. «Il y a une nouvelle génération de jeunes musulmans qui arrive, a-t-il dit, et elle est avide de connaissances, on n'est pas assez équipé pour lui communiquer cette énergie». Globalement, la conférence a été axée autour de cette hypothèse: comment et dans quelles conditions transmettre la parole de l'islam. Pour Chebel, l'islam de demain sera davantage multiple. «On écoutera plus facilement un musulman un Arabe, qu'un musulman arabe» a-t-il conclu. Pour lui, ce qui pose problème, ce n'est nullement l'islam mais les musulmans appelés plus que par le passé à dépasser leurs contradictions et à s'adapter à la vitesse de l'Histoire.