La Mission d'appui des Nations unies en Libye ( Manul ) a beau multiplier depuis des semaines les appels à une trêve humanitaire et au respect du cessez-le-feu conclu à Moscou, lors d'un entretien entre les présidents russe Vladimir Poutine et turc Recep Tayyip Erdogan, les combats n'ont jamais baissé d'intensité aux portes de Tripoli malgré la crainte d'une propagation de la pandémie de coronavirus. Pas plus tard que durant les dernières quarante-huit heures, l'armée autoproclamée nationale de Khalifa Haftar qui a perdu les villes stratégiques de Sorman et Sabratha a déclenché une pluie de roquettes sur la capitale, visant en priorité l'aéroport international de Mitiga ainsi que des installations hospitalières et scolaires. En vain, car l'opération déclenchée par le gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par l'ONU et dirigé par Fayez al Serraj a conféré un changement de la donne au cours de ces dernières journées. Baptisée « tempête de la paix », cette opération a inversé le rapport de force entre les deux protagonistes du conflit et les choses ont pris une toute autre tournure que celle escomptée par le maréchal Haftar. Désormais, il apparaît que le GNA a réellement pris l'avantage sur ses rivaux de l'est libyen grâce à la forte implication de la Turquie qui lui a fourni des centaines de drones de nouvelle génération. L'équation du ciel libyen a ainsi été transformée alors que, depuis avril 2019, Haftar et ses hommes contrôlaient l'espace aérien tout en multipliant les frappes aériennes sur Tripoli et ses installations civiles. Cet avantage ayant été perdu, l'armée nationale libyenne autoproclamée ploie, de plus en plus, sous les coups de boutoir des forces loyales au GNA, comme ce fut le cas, au début du mois, à Abou Grein où des dizaines d'officiers de haut rang ont péri, lors de frappes de drones guidés par Tripoli. On sait également que le centre d'opération de Syrte, une ville dont s'est emparé Haftar, voici deux mois, a été sérieusement pilonné. Après la prise des villes côtières précitées, les affrontements qui se déroulaient aux portes de la capitale se sont déplacés vers d'autres zones, signant le recul de l'ANL vers ses bases arrières, au fur et à mesure des frappes et des pertes subies. Les troupes de Haftar se dirigent vers la base d'al Watiya, ultime bastion à l'ouest du pays mais qui connaît à son tour d'intenses frappes de drones et un siège déjà établi. Après avoir desserré l'étau sur Tripoli, les forces du GNA ont ainsi mis fin aux attaques de l'ANL du côté de Zouara et Zawiya et sont parvenus devant la ville de Tarhouna qui représente une importante base arrière et un centre de ravitaillement crucial de l'ANL. Le but évident du GNA va être, désormais, de couper l'herbe sous les pieds de Haftar et de ses alliés de l'est (parlement et gouvernement non reconnu), en rejetant toute alternative politique ou pourparlers de paix, ainsi que vient de le faire, d'ailleurs, Fayez al Serraj. Autant dire que Haftar aura, alors, bien du mal à sortir indemne de son aventure