Le syndicat des joueurs de football espagnol n´a pas réagi aux insultes racistes dont a été victime Eto´o. Les footballeurs africains évoluant en Europe pourraient se mettre en grève pour une durée indéterminée. C'est ce qui ressort d'une déclaration de responsables de l'Union des footballeurs professionnels africains que préside l'Algérien Mourad Mazar. Ce dernier, accompagné du Camerounais Roger Milla, était hier soir à Barcelone pour assister au match de Coupe d'Europe FC Barcelone- FC Chelsea et pour apporter son soutien au joueur camerounais du club catalan, Samuel Eto'o. Ce dernier avait, récemment, été victime lors d'un match qui a opposé son club à celui de Saragosse de cris à caractère raciste de la part des supporters du club second nommé. Eto'o, en plein match avait, alors, voulu quitter le terrain. Mais l'arbitre et ses coéquipiers avaient réussi à le faire revenir sur sa décision. Par la suite, même après avoir reçu la réprobation de l'ensemble de la famille du football espagnol, le club de Saragosse avait été condamné à payer une amende de 9000 euros, une somme ridicule pour ce club professionnel. Eto'o s'attendait à voir cette équipe subir une interdiction de recevoir ses adversaires hors de ses bases pendant, au moins, un an. La Fédération espagnole de football rechigne à sanctionner lourdement les clubs estimant qu'ils n'ont pas à payer pour les écarts de conduite de leurs supporters. Mais elle ne fait rien pour juguler ce mal profond qui jette l'anathème sur son football. C'est la même chose pour les Italiens, eux aussi, pris à la gorge par les débordements à caractère raciste sur fond d'un retour sur scène du fascisme à la mode mussolinienne. L'épisode du joueur ivoirien de Messine, Marc Zoro, a été édifiant sur la question. Lors d'un match contre l'Inter Milan, Zoro, en pleurs parce que excédé par les cris racistes dont il était victime a pris le ballon dans ses mains et a arrêté le match. Cela pour signifier à l'arbitre qu'il quittait le terrain. Ce dernier, aidé par les coéquipiers de Zoro et surtout par le joueur brésilien de l'Inter, un noir lui aussi, Adriano avait fini par lui faire terminer le match. Et d'autres exemples, il y en a eu comme avec le joueur malien Lamine Sissoko, joueur du Liverpool FC, qui, la saison dernière, dans un match de ligue des champions européens, avait accusé le joueur serbe Nenad Jestrovic du RSC Anderlecht d'avoir tenu des propos racistes à son encontre. L'arbitre, M.Nielsen était juste à côté de la scène et avait tout entendu. Il avait, donc, tout décrit dans son rapport puisqu'il avait exclu le joueur serbe pour cette attitude. Or, après que l'UEFA eut suspendu Jestrovic pour trois matches, (son club s'était contenté d'une petite sanction financière), la chambre du Conseil européen l'avait relaxé... faute de preuves. Le racisme ne touche pas que les Africains mais tous les joueurs noirs même ceux qui bénéficient de la nationalité d'un pays de l'Union européenne. Ainsi, le Français Marcel Desailly reconnaissait que lors d'un match, le bulgare Hristo Stoichov n'avait pas cessé de l'«abreuver» d'insultes racistes. Thierry Henry a lui aussi fait part d'entraîneurs qui s'égaraient comme avec le sélectionneur Luis Aragones, alors entraîneur du FC Valence, avait dit à ses joueurs: «Vous n'allez pas vous faire humilier par ce nègre de m...». Au finish, Aragones n'avait eu qu'une petite amende à payer. Mais Henry n'apporte pas le soutien dont ont besoin tous ceux qui luttent contre le racisme. Questionné sur le thème et sur la possibilité de le voir quitter le terrain, le Français d'Arsenal a répondu «que ce ne serait pas correct pour le football de le faire». Pour un joueur noir qui gagne autant d'argent et qui n'a plus de souci à se faire pour son avenir, cette réponse manque de dignité et Zoro qui n'a ni son statut ni sa renommée et qui gagne une misère lui démontre que cette dignité se défend en sortant du terrain, au risque de mettre sa carrière sportive en danger et non pas en acceptant d'y rester après avoir été traité de «nègre de m...». L'Union des footballeurs professionnels africains fait état de sa très désagréable surprise de voir le syndicat de joueurs professionnels du championnat d'Espagne ne pas réagir après ce qu'a subi Eto'o. Suite à cela, l'UEFA et toutes les fédérations qui lui sont affiliées, n'ont eu qu'une réaction timide face à de tels actes hautement condamnables. C'est pourquoi les deux responsables du syndicat africain vont être reçus par ceux de la Fédération espagnole auxquels ils feront part de leurs regrets de voir les clubs incriminés si petitement sanctionnés. Dans le cas où les réponses qu'ils obtiennent ne sont pas satisfaisantes, un recours à la grève des joueurs professionnels africains évoluant dans les championnats européens est du domaine du possible. Ce serait là une arme qui ferait certainement bouger les responsables européens au premier desquels les personnalités politiques.