«Nous sommes aux portes d'une catastrophe sanitaire.» C'est avec ces mots forts que le porte-parole du Comité scientifique de suivi de l'évolution du coronavirus s'est adressé aux membres de la Commission nationale de la fetwa. En effet, Djamel Fourar s'est réuni, lundi dernier, avec cette commission relevant du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs pour discuter de la situation sanitaire actuelle, leur demandant une plus grande implication dans la sensibilisation de la population. Le docteur Fourar s'inquiète, notamment des conséquences de l'Aïd sur un rebond de l'épidémie. Il faut dire que cette fête religieuse qui est un grand moment de regroupement familial risque de se transformer en un véritable «suicide collectif». La situation sanitaire actuelle étant explosive, cela pourrait entraîner une circulation rapide du virus. Surtout que l'on sait bien que cette période est propice aux bises et autres accolades. On a pu le constater avec l'Aïd El Fitr». Malgré le confinement total de deux jours, certains l'ont «célébré» le week-end d'après entraînant une recrudescence de l'épidémie. On subit encore les conséquences de ce relâchement avec des cas qui ont triplé en quelques semaines. Djamel Fourar a ainsi relevé certains cas de non-respect des gestes barrières durant l'Aïd El Fitr. «D'où l'augmentation des cas confirmés», a-t-il soutenu. Pour dire comment ce petit moment de joie et de retrouvailles familiales pourrait vite se transformer en un véritable drame. Des voix se sont élevées, dans ce sens, pour demander la suppression de l'Aïd El Adha. Une décision difficile pour les Algériens très attachés à cette tradition. Seule, une «fetwa» pourrait les convaincre d'y renoncer et faire passer la pilule comme cela a été le cas avec la fermeture des mosquées. D'où l'importance de ce rendez-vous où le docteur Fourar a bien expliqué aux présents la situation sanitaire et le risque que l'Aïd pourrait entraîner sur la santé publique. Comme sont, d'ailleurs, en train de le faire les mariages qui continuent de se tenir de façon normale, malgré les interdictions décidées par les autorités. Les spécialistes sont unanimes sur leur rôle dans la propagation du Covid-19. Les appels pour mettre fin à ces «massacres» se multiplient. Mais la sensibilisation et les sanctions n'ont pour le moment rien donné. Les autorités veulent jouer sur la corde sensible qu'est la religion. D'où l'importance de ce rendez-vous où il a été demandé aux imams d'insister sur les dangers de tels événements, tout en rappelant à l'ordre certains d'entre eux qui sont toujours récalcitrants sur la question. Pour preuve des «Fatiha» (mariages religieux) continuent à se faire clandestinement. Les autorités sanitaires veulent donc impliquer directement les autorités religieuses de ce combat contre cet ennemi invisible. «Cette rencontre a pour but le renforcement des mesures préventives face au nouveau coronavirus (Covid-19) durant la saison estivale et en prévision des prochaines occasions sociales et religieuses dont les fêtes et l'Aïd el Adha», l'a bien affirmé le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Youcef Belmehdi. «Elle s'inscrit dans le cadre d'une action de coordination entre les deux secteurs au titre de la coopération gouvernementale intersectorielle visant la consolidation des dispositions de prévention et des mesures de sensibilisation face à la propagation de la pandémie de Covid-19», a- t-il insisté montrant que son département est désormais une partie importante de la stratégie de la lutte contre le Covid-19. Il annonce même que d'autres mesures vont suivre très prochainement. D'importantes décisions devraient suivre lors des prochains rendez-vous, particulièrement si la situation épidémique ne s'est pas améliorée. En attendant, les imams, au même titre que la société civile devraient, être mobilisés pour sensibiliser les citoyens sur le respect des mesures barrières. Un apport qui n'est pas des moindres si l'on connaît l'écho et l'influence qu'ils ont dans la société. L'exemple le plus frappant est celui de l'imam de Sétif qui a appelé la population locale à faire preuve de conscience et arrêter de jouer avec les vies humaines à cause «d'un café ou une partie de dominos». La vidéo de cet appel à véritablement fait le «buzz» en étant partagée des milliers de fois sur les réseaux sociaux. Ce qui est une preuve de plus de l'importance que les gens accordent à la religion dans l'action entreprise pour freiner le coronavirus. Tout le monde doit donc s'impliquer, sinon il ne nous restera qu'à prier pour que les Algériens ne soient pas décimés...