Après avoir parcouru l'ouvrage du général Aussaresses récemment paru dans votre maison d'édition, j'ai constaté, à ma grande surprise, une confusion regrettable entre le bachagha Boualem connu pour être un collaborateur de l'armée française dans le Chelif et mon regretté père l'honorable bachagha Boutaleb. Cette erreur se trouve à la page 133 note 1: il est dit à tort dans cette note que l'aspirant Maillot «a été exécuté par des harkis du bachagha Boutaleb». Or le bachagha Boutaleb, mon père, a été un résistant connu des autorités françaises et du chef de résistance FLN à Alger (Zone autonome d'Alger), comme le montrent les témoignages d'auteurs français, d'une part, et du chef de la résistance FLN à Alger, d'autre part. Texte contesté: «Officier français (l'aspirant Maillot), membre du Parti communiste qui avait volé des armes pour les remettre au FLN. Il avait été exécuté par des harkis du bachagha Boutaleb alors qu'il effectuait une livraison». (P.133 note1) Témoignages contestant cette allégation 1. Claude Paillat, Deuxième dossier secret de l'Algérie, éd. Les presses de la cité, Paris 1962, p. 350, 38 «Il en va ainsi du bachagha Boutaleb, personnalité musulmane bien connue qui raconte aux officiers une étonnante aventure. A la suite d'un entretien avec Abane Ramdane qui se cache dans Alger, le bachagha s'est rendu auprès de Lacoste et lui a déclaré que: «La seule solution du problème algérien résidait dans la négociation»[...] (le bachagha Boutaleb) prend contact avec le colonel FLN Ben M'hidi. Mais ce dernier ne se montre guère compréhensif: il n'est pas question, dit-il à Boutaleb, de faire confiance à l'actuel gouvernement français. Quant à Ben Bella, il n'a aucune autorité suffisante pour arrêter les hostilités. Néanmoins, il accepterait éventuellement de rencontrer M.Paye.[...] Les contacts de M.Boutaleb auraient pu se poursuivre longtemps si les hommes de Massu n'avaient découvert chez le bachagha la cachette où s'abritait Ben M'hidi...en compagnie d'un stock de bombes.» (P. 350-351). Lacoste reste optimiste. Au gouvernement, il indique que «200 tueurs authentiques ont été éliminés à Alger». Sur 17 membres, précise-t-il, le Comité national de la rébellion en a perdu 9. Sur 5 participants au CCE, 2 ont été mis hors d'état de nuire. En même temps, signale le ministre, on a découvert que des anciens élus ou bourgeois musulmans «étaient en fait des agents du FLN» tel le bachagha Boutaleb. (P. 382). 2. Général Massu, la Vraie Bataille d'Alger, ed Du Rocher, Monaco 1997. Deuxième audition de Yacef Saâdi Question du lieutenant colonel Marey: Le bachagha Boutaleb chez lequel des bombes et de l'armement ont été découverts a déclaré au tribunal qui le jugeait qu'il ignorait la présence de cet armement dans cette maison. Dites-nous si cela est vrai? Réponse de Y. Saâdi: «J'avais été hébergé par le bachagha Boutaleb qui a accepté par la suite de recevoir Ben M'hidi chez lui. Nous avons entrepris une cachette à son domicile et nous avons déposé à son insu les armes et les bombes qui s'y trouvaient, ceci pendant son absence, alors qu'il était en France». (P.296) 3- Témoignage du chef de la résistance FLN à Alger (Zone autonome d'Alger), Yacef Saâdi, La Bataille d'Alger, ed. Laphomic, Alger, 1986. «A Alger, il y en eut un - [notable], un bachagha dont l'évolution pendant la guerre mérite d'être signalée tant ses activités s'étaient intimement imbriquées dans celle de la Zone autonome d'Alger. Il s'appelait Boutaleb Abdelkader...Il affectionnait particulièrement sa grande maison de l'avenue Kléber à la Casbah. Au début de la guerre, nous ne savions pas pourquoi il persistait à rester au milieu d'une forte concentration populaire dont il n'ignorait pas la sympathie à l'égard du FLN. Les habitants le tenaient en grande estime. Ses proches voisins le respectaient. On disait qu'il était bon. Il ne ressemblait pas aux autres, au bachagha Aït-Ali, ce féal invétéré...Dans l'enceinte de la vieille ville, Boutaleb était connu pour sa piété et l'élan de générosité auquel il sacrifiait spontanément... Boutaleb avait su préserver l'estime qu'il inspirait à quelques mandatés européens...il semblait avoir pris une sérieuse option pour le milieu populaire, alors que disposant d'une autre résidence à Bouzaréah, il aurait pu se passer de notre mitoyenneté... Je me hasardai pour le mettre à l'épreuve à lui confier deux fidaïs à héberger. Puis deux autres... Je décidai de le rencon-trer personnellement et d'élire domicile chez lui avec Ali la Pointe, Alilou et Petit Omar. Nous rejoignirent ensuite Ben M'hidi que je lui présentais comme un simple militant - puis Ramel, Debbih Chérif, Hassiba Ben Bouali, Zohra Drif, etc. La maison était vaste... il mit tout cela à notre disposition...Eminemment bien informé, il devint une source de renseignements précieux pour l'organisation». (P. 367-370). En conséquence, je vous serais très obligé de rectifier l'erreur que je viens de signaler. Vous comprendrez, sans difficulté je l'espère, la raison de ma démarche, il s'agit d'une atteinte à l'honneur de mon père que rien ne justifie. Je souhaite vivement que la rectification soit faite le plus tôt possible dans la présente édition. Vous voudriez bien me tenir informé de la suite que vous réserverez à ma demande. Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance de ma parfaite considération. Boutaleb Mohamed Président de la Fondation Emir Abdelkader