Face à cette recrudescence des demandes de titres de séjour, l'administration française a fait preuve d'une véritable volonté d'efficacité. Ainsi, les procédures dématérialisées se sont multipliées ces dernières années dans notre société avec l'évolution toujours fulgurante de la technologie. Les préfectures n'y ont pas échappé étant donné que l'obtention d'un rendez-vous pour obtenir un titre de séjour se fait désormais par Internet pour les étrangers. Cependant, le résultat ne semble pas être celui espéré. En effet, les dossiers en attente se font de plus en plus nombreux, laissant désoeuvrés les ressortissants étrangers en quête du fameux document. Le Code de justice administrative Le titre de séjour permet à un étranger de se voir reconnaître, par l'administration, le droit de pouvoir rester temporairement sur son sol. Ne pas en disposer engendrerait donc une situation frauduleuse, d'où la nécessité de s'en prémunir. Idrissa, ressortissant sénégalais de 33 ans, vient d'être reconduit dans son pays après 8 ans sur le sol français. N'ayant pas réussi à se procurer le fameux rendez-vous, ce dernier s'est vu basculer dans une situation irrégulière, faute de titre de séjour valable. Malheureusement, ce genre de cas ne fait pas figure d'exception en France. D'autres attendent parfois plusieurs mois avant de réussir, enfin à obtenir un rendez-vous. La procédure du référé «mesures utiles» quant à elle, a pour but de pallier les difficultés rencontrées lors des démarches administratives auprès de la préfecture. De façon concrète, le juge des référés saisi par le requérant étranger, devra enjoindre à l'administration de fixer une date de rendez-vous à ce dernier s'il se trouve dans une situation urgente, c'est-à-dire si son titre de séjour arrive à expiration et qu'il risque d'entrer dans une situation illégale susceptible d'entraîner une expulsion par exemple. Dans son arrêt du 10 juin 2020 (décision n° 435594) le Conseil d'Etat a, pour la première fois, délimité les conditions d'effectivité de cette procédure judiciaire. En l'espèce, après avoir rencontré de nombreux problèmes lors du dépôt de sa demande de titre de séjour, un étranger a sollicité le juge des référés du tribunal administratif pour ordonner au préfet du département de lui fixer un rendez-vous. Il a invoqué comme fondement l'article L. 521-3 du Code de justice administrative qui dispose que: «En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative.». Pour motiver sa demande, ce dernier a fourni plusieurs preuves de ses démarches: quatre captures d'écran datées du 13 au 18 septembre 2019. Le juge a rejeté sa demande dans une ordonnance du 11 octobre de la même année. Le requérant a alors formé un pourvoi en cassation pour faire valoir ses droits. Sous quelles conditions un étranger peut-il se prémunir de la procédure du référé «mesures utiles» s'il rencontre des difficultés lors de sa demande de titre de séjour via le site Internet de la préfecture? Les conditions du Conseil d'Etat La loi française a mis en place la procédure de «référé» dans le but de solutionner un litige qui demande une réponse urgente. Le «référé mesures utiles» a donc pour ambition d'éviter de façon urgente les situations dans lesquelles un étranger se retrouverait en situation irrégulière, à cause de son titre de séjour, donnant ainsi la possibilité à l'administration de prononcer des mesures d'éloignement comme l'obligation de quitter le territoire français inscrite à l'article L.511-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (ceseda), ou encore l'expulsion pure et simple. Dans son arrêt du 10 juin 2020 le Conseil d'Etat pose alors très clairement les conditions de validité de ce type de référé: l'étranger qui souhaite avoir un rendez-vous doit prouver dans un premier temps l'urgence de sa situation, sinon le «référé mesures utiles» ne peut pas jouer étant donné que telle est sa finalité, son essence même. Ensuite l'hypothèse où son rendez-vous ne peut être obtenu que par voie électronique: «Lorsque le rendez-vous ne peut être obtenu qu'en se connectant au site Internet de la préfecture.» Condition ici d'une prise de rendez-vous de façon dématérialisée uniquement, via le site Internet officiel de la préfecture. Enfin, «si l'étranger établit qu'il n'a pu obtenir une date de rendez-vous, malgré plusieurs tentatives n'ayant pas été effectuées la même semaine». Cette dernière condition est d'autant plus importante car elle a fait l'objet du rejet du pourvoi formé dans cet arrêt, le demandeur a effectué plusieurs tentatives la même semaine, à savoir du 13 au 18 septembre 2019. Il s'agira alors pour le requérant de prouver par tout moyen que cette condition a été respectée en démontrant que ses tentatives n'ont pas été enregistrées la même semaine. Telles sont les conditions de validité du référé «mesures utiles», si le requérant souhaite voir sa demande aboutir. Ainsi, pour faire jouer le «référé mesures utiles» et avoir la possibilité d'obtenir en urgence un rendez-vous il faut faire attention à bien entrer dans les limites de cette procédure sous peine d'en être éjectée. Le Conseil d'Etat rappelle formellement les prérogatives de l'administration: tout étranger a le droit de voir sa situation examinée conformément aux dispositions du ceseda et il lui incombe de plus de fixer au ressortissant étranger un rendez-vous afin de le recevoir en préfecture si son dossier est complet. En outre il reste tout à fait envisageable de saisir un juge pour solutionner un futur litige. Il n'est donc pas peine perdu d'obtenir le titre de séjour, il faudra simplement s'armer d'une grande patience, la mission n'est pas impossible.