La reconnaissance de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara occidental par l'ancien président américain, Donald Trump, le 10 décembre dernier, «n'a pas de sens» et a eu un «impact négatif», a déclaré jeudi Robert Malley, président de l'International Crisis Group. «La reconnaissance d'une souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en échange d'une normalisation entre le Maroc et Israël, cela n'a pas de sens et cela a un impact négatif sur ce dossier», a affirmé l'expert, dans un entretien accordé à France Culture relatif au bilan du mandat de Donald Trump. Robert Malley, qui a été conseiller auprès des présidents américains Barack Obama et Bill Clinton, a assuré que «le président Trump s'est distingué par sa politique du troc, une sorte de marchandage permanent où les transactions sont faites, non pas sur le plan des valeurs mais sur le plan des intérêts matériels». «Il a donc pu faire énormément de mal simplement parce qu'il a privilégié ce qui est à son bénéfice personnel, au bénéfice de tous ceux qui l'entourent, au mépris de toutes les valeurs, des normes, des alliances internationales des Etats-Unis, de la stabilité à travers le monde», a ajouté Robert Malley. Concernant la région du Moyen-Orient, le bilan de Trump a été «globalement négatif parce qu'il a contribué à exacerber, à renforcer la polarisation dans la région. D'abord, il a pris part au dossier israélo-palestinien en étant à 100% du côté israélien», note l'ancien conseiller à la Maison-Blanche. Il fera remarquer que Trump a réussi à pousser quatre pays arabes à normaliser leurs relations avec l'entité sioniste mais «il l'a fait en payant des prix qui, à notre sens, ont été parfois excessifs». De manière générale, relève l'expert, Donald Trump a endommagé l'image des Etats-Unis semant le doute sur sa capacité à respecter ses engagements. Un «héritage» difficile à effacer par l'administration Biden, estime-t-il. Le changement de position vis-à-vis du dossier sahraoui en dépit de l'alignement des Etats-Unis sur les résolutions de l'ONU prévoyant un référendum d'autodétermination, la sortie de l'accord de Paris sur le climat et l'annulation de la participation américaine aux accords de désarmement de l'Iran sont autant de revirements opérés par le 45ème président des Etats-Unis. «Les pays qui vont traiter avec les Etats-Unis vont toujours se poser cette question: les engagements américains, les engagements du président des Etats-Unis, durent-ils plus d'un ou deux mandats?», dira-t-il. «La perte de la réputation de fiabilité des Etats-Unis coûte cher. Et je ne sais pas si le président Biden pourra y remédier parce que personne ne sait si, dans quatre ans ou huit ans, on n'aura pas un président Trump bis, que ce soit lui-même ou un de ses successeurs, pratiquant la même politique», conclut Robert Malley. Dans son audition, jeudi dernier, par le sénateur James Inhofe, président de la commission Défense et fervent défenseur de la cause sahraouie, le nouveau ministre de la Défense, le général à la retraite Lloyd Austin, premier noir à occuper le poste de chef du Pentagone, a affirmé que le dossier du Sahara occidental «va être examiné de près» pour y apporter une «réponse détaillée». James Inhofe, sénateur de l'Oklahoma, avait dénoncé, dans les termes les plus durs, la décision de Trump et il a demandé à la nouvelle administration Biden de «préserver la cohérence observée sur ce dossier depuis trois décennies».