L'échec de l'offensive lancée en avril 2019 par le maréchal Khalifa Haftar contre Tripoli et le gouvernement d'union nationale (GNA) reconnu par les Nations unies étant consommé, de nombreuses capitales suivent avec intérêt le processus de dialogue inter-libyen engagé par la cheffe adjointe de la Mission onusienne en Libye (Manul), Stéphanie Williams. Depuis un an, voire plus, elle s'efforce de conduire sur le chemin du dialogue politique les représentants des deux principaux camps antagonistes et force est de reconnaître que des progrès tangibles ont été enregistrés. Déjà, en octobre 2020, les négociateurs militaires du cadre 5+5 sont parvenus à un cessez-le-feu permanent dont on disait qu'il serait à l'image des précédents. Or, non seulement cet accord semble valide dans la durée mais il a déjà permis de rouvrir la route entre Tripoli et Syrte, ville stratégique qui a échappé de peu à une bataille sanglante entre les deux factions rivales. D'autres avancées sont également concrétisées, telles que la convocation des élections législatives et présidentielle pour la fin de l'année en cours. Si rien ne vient compromettre ces résolutions qui donnent du baume au coeur du peuple libyen, la solution politique de la crise pourra se dessiner dans les mois prochains. Mais, observent des chefs de tribus qui estiment biaisée la démarche de Stéphanie Williams en ce qui concerne le choix des interlocuteurs, le pays a besoin d'un changement profond des figures qui portent la responsabilité des affrontements meurtriers et de la porte ouverte aux ingérences étrangères, à travers lesquelles des charniers sont découverts à Tarhouna, une des bases opérées par les milices de Haftar. Toujours est-il que, cette semaine, des représentants de Tripoli et de Benghazi se sont rencontrés au Caire pour convenir de l'organisation d'un référendum sur la Constitution, préalable à la tenue des élections de décembre 2021. De nouveaux pourparlers inter-libyens sont d'ailleurs prévus, à ce titre, en Egypte également, courant février, pour fixer la «feuille de route pour le référendum et les élections», selon les autorités égyptiennes. Celles-ci ont surpris tout le monde, voici quinze jours, une délégation débarquant à Tripoli pour des discussions avec le GNA de Fayez al Serraj. L'Egypte qui avait porté à bout de bras Haftar et ses milices, partageant la démarche des Emirats et de certaines puissances occidentales, a ainsi anticipé la nouvelle conjoncture, soucieuse de protéger les intérêts de deux millions de travailleurs égyptiens ancrés dans la Libye voisine. De leur côté, les parlementaires poursuivent des discussions soutenues pour définir le processus de candidature aux sept postes dits «de souveraineté» du pays. Le but est de désigner, dans les plus brefs délais, les titulaires de ces postes stratégiques afin que le gouvernement exécutif, qui devrait être élu la semaine prochaine à Genève, puisse «collaborer aisément» avec les nouveaux dirigeants, selon une déclaration conjointe des deux délégations parlementaires réunies au Maroc. Les postes concernent de hautes instances libyennes telles que le gouverneur de la Banque centrale, le procureur général, les présidents de l'Autorité de contrôle administratif, de l'Instance nationale de lutte contre la corruption, de la Haute commission électorale libyenne et de la Cour suprême. Longtemps, ces postes ont été les prétextes à de farouches empoignades entre les deux autorités rivales de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque. Il appartiendra aux mem-bres du Parlement de Benghazi et au Conseil d'Etat de Tripoli de statuer sur les candidatures retenues, un gage de réussite consensuelle dont a impérativement besoin le futur Exécutif, attendu dans une semaine, à Genève.