Infatigable et doyen des militants des droits de l'homme, le célèbre avocat et moudjahid, Ali Yahia Abdennour, tire sa révérence. Il s'est éteint, hier, à l'âge de 100 ans. L' Algérie perd ainsi une des rares personnalités qui faisaient consensus autour de lui. Il a été de tous les combats tout au long de son parcours qui a débuté avec le Mouvement national. Il a rejoint la lutte armée pour l'indépendance du pays, rallié à feu Hocine Ait Ahmed en 1963, il a mené le combat pour les libertés et les droits de l'homme et a été un farouche opposant au régime de Bouteflika. Militant de la première heure, il fut plusieurs fois emprisonné pour son action politique. Sa carrière a été marquée par un engagement sans faille en faveur de la défense des droits de l'homme et un combat inflexible pour la promotion des libertés individuelles et collectives. Il est mort en laissant derrière lui un patrimoine très riche. Concernant sa fonction d'avocat, le défunt a défendu tout le monde. Il s'est constitué aussi bien avocat en faveur des communistes (militants de l'ex-Pags), dont feu Hachemi Chérif, des démocrates comme Saïd Sadi que des militants du FIS dissous. A ce sujet, il a toujours fait savoir qu'il défend non pas le projet politique, mais l'homme». Sur le plan politique, il s'est positionné contre l'arrêt du processus électoral de janvier 1992, et contre la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, mise en application en 2006. En 1995, il a participé, en sa qualité de président de la Laddh, à la «Plate-forme de Sant Egidio» ou contrat de Rome. Il a pris part, en 2011, à l'appel de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (Cncd). En plein Mouvement populaire du 22 février 2019, soit le 18 mai 2019, il appelle, conjointement avec Ahmed Taleb Ibrahimi et Rachid Benyelles, à lancer un dialogue entre l'armée et les représentants des manifestants pour mettre en place une transition politique. Le 15 octobre de la même année, Ali Yahia initie avec plusieurs autres personnalités un appel à des mesures d'apaisement, à l'ouverture démocratique, au départ des dignitaires du régime, ainsi qu'à la tenue de l'élection présidentielle après un dialogue. Il a publié plusieurs ouvrages, tels que Algérie: raisons et déraison d'une guerre, publié en 1996, et la dignité humaine en 2007, La crise berbère de 1949, Portrait de deux militants: Ouali Bennaï et Amar Ould-Hamouda, Quelle identité pour l'Algérie?, Lettre ouverte au système politique et au dernier pouvoir qu'il a engendré, Mon testament pour les libertés. Né en juillet 1921 à Aït Yahia (Tizi Ouzou), il a fait ses études primaires à Tizi Ouzou et ses études secondaires à Médéa. En 1943, il fut mobilisé comme beaucoup d'Algériens par les Alliés. Il a rejoint en 1945 les rangs du Parti du peuple algérien (PPA-Mtld), qu'il quitta en 1949 après la crise berbériste. Il a rejoint le FLN en 1955. Il fut arrêté, en 1956, en sa qualité de membre du syndicat des enseignants après la grève à laquelle avait appelé le Front de Libération nationale (FLN). Remis en liberté en 1961, il devient secrétaire général de l'Ugta. Après l'indépendance, il fut élu membre de l'Assemblée constituante et rejoint le FFS en 1963. En 1965, il a été nommé ministre des Travaux publics puis ministre de l'Agriculture avant de démissionner de son poste en 1968. Après des études de droit, il a commencé en 1983 à exercer la profession d'avocat et fonda en 1985 la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh) reconnue officiellement en 1989. Il sera enterré, aujourd'hui, à Ben Aknoun.