Après le Niger, c'est au tour de la Mauritanie de venir «s'expliquer» à Alger sur ses choix politiques. Le président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika, et le président du Conseil militaire pour la justice et la démocratie (Cmjd) en Mauritanie, le colonel Ely Ould Mohamed Vall, ont eu dimanche au siège de la présidence de la République, un entretien en tête-à-tête. Le colonel Ould Mohamed Vall, qui est arrivé samedi à Alger pour une visite officielle de deux jours à l'invitation du président Bouteflika, a eu ainsi l'occasion de voir de près la position officielle de l'Algérie vis-à-vis de ses choix politiques, opérés depuis août 2005, c'est-à-dire depuis le putsch militaire qui a mené à destituer l'ancien président Mouâwiya Ould Sid Ahmed Taya. On s'en souvient, à l'époque, le président du Cmjd s'est lancé dans une série de mesures politiques curieuses dont la réunion avec les ambassades des pays qu'il considérait majeurs, les Etats-Unis, la France, la Russie et Israël, au moment où il était confronté à une non-reconnaissance des pays arabes et ceux de l'Union africaine, dont le principe est de ne pas reconnaître les régimes issus de coups d'Etat. Par la suite, Alger s'était aligné sur le choix du peuple mauritanien pour son nouveau président, dont les mesures politiques d'urgence ont eu l'effet de le faire entourer d'un large consensus et de le créditer d'une volonté réelle de démocratiser son pays. La Mauritanie cherche, de façon méthodique, et en premier lieu, à s'intégrer, économiquement, dans l'espace maghrébin. Pour le moment, donc, Alger reste assez pragmatique pour reconnaître que Vall reste quand même une pièce incontournable du dossier du Sahara occidental, au moment où les tiraillements au sein de l'ONU à ce propos se font sentir. Hormis l'épineux dossier du Sahara, le pétrole fait aussi partie des soucis algéro-mauritaniens. Il y a quelques mois, lors de la visite du Premier ministre algérien le 15 mars à Nouakchott, dans le cadre de la réunion de la Grande commission mixte, 9 accords ont été signés entre les 2 pays. Le plus important concerne le secteur de l'énergie, puisque la Sonatrach s'intéresserait sérieusement au pétrole mauritanien au niveau de la prospection off shore et on shore. L'entreprise algérienne avait signé un protocole avec son homologue mauritanienne, la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH), pour l'exploitation et le transport du pétrole et du gaz mauritaniens. En outre, Naftec Mauritanie, spécialisée dans la distribution du pétrole et filiale de la Sonatrach, avec 22% du marché mauritanien, envisage de construire de nouvelles stations-service afin d'élargir sa part de marché. Une route à trois voies entre Choum en Mauritanie et Tindouf en Algérie, sera construite et financée en partie par l'Algérie, d'où la rencontre hier entre Vall et Ouyahia, et à laquelle était convié aussi le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul. A noter aussi que c'est la société nationale tunisienne Etap qui conseille techniquement la SMH, dans l'exploitation du pétrole mauritanien. L'Etap n'étant pas pour le moment intéressée par l'exploration ou l'exploitation. Le troisième volet des discussions entre Alger et Nouakchott, a trait au terrorisme qui semble s'insinuer dans la bande du Sahel depuis quelques années. A quelques semaines du putsch militaire du 3-8, le Gspc algérien aidé par les Cavaliers du changement, un groupe armé d'opposition, d'obédience islamiste djihadiste, avait lancé une attaque meurtrière contre une caserne militaire de Lemgheity, à 400 km de Zouérate, aux frontières algéro-mauritaniennes. L'attaque avait été imputée au Gspc, et le gouvernement Ould Taya avait parlé de 150 hommes qui auraient perpétré l'attaque sanglante du début juin 2005, et qui a fait 18 morts et 20 blessés parmi les soldats mauritaniens.L'Algérie avait été directement visée d'être le couloir de transit de ces 150 hommes l'équivalent d'une compagnie et demie. La confirmation par le Gspc de l'attaque sur son site Internet ajouta foi aux allégations officielles, alors que tout le monde sait qu'il était devenu de l'ordre de l'invraisemblable de parler de 150 hommes se déplaçant dans le Sahara algérien vers Zouérate. Par la suite, les islamistes mauritaniens libérés ont parlé de manipulation et ont confirmé l'attaque lancée par les islamistes mauritaniens, aidés par les éléments du Gspc. Cependant tout ce magma avait déjà motivé la présence américaine dans les parages, et pour longtemps, au motif d'une présence d' islamistes qui auraient des liens directs avec Al Qaîda, et qui pourraient agir à partir du Sahel comme une rampe de lancement pour viser l'Europe et les Etats-Unis.