Jamais deux sans trois. Abdelaziz Djerad semble y croire fortement, raison pour laquelle il laisse germer, en lui, cette ambition d'être à la tête du troisième gouvernement d'Abdelmadjid Tebboune. Le Premier ministre partant devra, dans les jours à venir, présenter la démission de son équipe gouvernementale. Un acte qui trouve son fondement dans la coutume constitutionnelle et devra intervenir juste avant l'installation de la prochaine Assemblée populaire nationale afin de permettre au président de la République de nommer un nouveau chef de l'exécutif, communément choisi parmi la majorité parlementaire. Avec l'annonce des résultats provisoires du scrutin du 12 juin dernier et la victoire des partis qui se reconnaissent dans le programme du chef de l'Etat, il est maintenant établi que la neuvième législature verra la naissance d'une majorité présidentielle et qu'Abdelmadjid Tebboune aura à nommer un Premier ministre, comme le prévoit la Constitution. Il pourra, tout autant, reconduire l'actuel et c'est sûrement cette éventualité qui encourage Abdelaziz Djerad à ne pas refouler ses ambitions. Ce désir, le docteur d'Etat semble l'exprimer à travers la déclaration qu'il vient de publier sur le site du Premier ministère accompagnant le mise en ligne d'un document de 200 pages, présentant le plan de relance économique 2020-2024. Certes, Abdelaziz Djerad n'a fait que dresser son constat sur l'économie algérienne fortement dépendante des prix des hydrocarbures. Il a posé la problématique de la mobilisation des ressources financières, la nécessité d'une diversification des sources de financement ou encore insister sur la libération des contraintes bureaucratiques. Mais pourquoi maintenant? Que cache le timing choisi pour la publication de ce plan de relance économique qui s'établit sur les trois prochaines années? La déclaration du Premier ministre sortant intervient à un moment d'entracte. Le gouvernement, depuis le début de la campagne électorale, observe un «confinement» politique. Une mesure préventive exigée par la loi en vue d'éviter toute déclaration à même d'influer le déroulement de la campagne électorale. La loi électorale stipule bien dans son article 83, qu'il est strictement interdit d'utiliser les biens et les moyens appartenant à une personne morale privée ou publique ou tout autre structure étatique à des fins de campagne électorale. Il était donc tout à fait normal que les ministres observent «un silence politique». Certes, la campagne s'est terminée, mais c'est le clap de la fin pour le gouvernement lui-même! En plus de cela, actuellement et après l'organisation des législatives, tous les yeux restent braqués sur le Conseil constitutionnel qui devra proclamer d'ici la fin de la semaine, les résultats définitfs de ce rendez-vous électoral. Les tractations et le jeu des alliances qui devront se dérouler dans les coulisses du palais Zighoud Youcef suscitent le grand intérêt. Et c'est surtout la nomination du prochain gouvernement et les scénarii de sa combinaison entre technocrates, personnalités de la société civile et cadres politiques qui constituent l'actualité croustillante des jours à venir. Pourquoi donc avoir opté de publier le plan de relance économique à ce moment précis? Est-ce justement pour se mettre dans la lumière et mettre en exergue le travail déjà accompli durant les 18 derniers mois? Ou est-ce également une façon d'exprimer sa disponibilité à poursuivre le chantier des réformes qu'il a entamé? Cela semble bien être le cas, sinon quelle urgence y avait-il à publier ce plan de relance dont les contours ont été fixés, en août dernier, par le président Tebboune? Et la question est de savoir quelle réponse va avoir l'offre de service d'Abdelaziz Djerad? Face à une situation économique complexe, amoindrie par la chute brutale des prix de pétrole et une crise sanitaire mondiale inédite, le Premier ministre sortant avait accusé une faible célérité dans l'exécution de la feuille de route que lui a tracée le président. Ce qui lui avait valu une remontrance publique d'Abdelmadjid Tebboune, à son retour d'Allemagne. Mais depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et l'homme a peut-être réussi à convaincre.