La dernière sortie du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, appelant le Maroc et le Front Polisario à ne pas bloquer la désignation d'un envoyé personnel, a tout du tamis qui voudrait masquer le soleil. Personne n'est, en effet, mieux placé que lui pour savoir que, sur les 13 postulants qu'il a proposés, depuis la démission forcée de l'ancien président allemand Horst Kohler, dégoûté par les manoeuvres du Makhzen, celui-ci en a purement et simplement refusé 10! Que les diplomates du palais, accrédités aux Nations unies, prétendent effrontément qu'il n'y a eu qu'un seul refus, cela ne mérite aucun commentaire. Mais l'opinion internationale a le droit de savoir qui est qui et qui fait quoi. Depuis des décennies, le royaume marocain multiplie les manoeuvres dilatoires pour maintenir le fait accompli. Pendant ce temps, l'exploitation forcenée des richesses du Sahara occidental va bon train, au grand profit du roi, du Makhzen et des pays qui les soutiennent plus ou moins ouvertement. Le statu quo que déplore le secrétaire général de l'ONU est un atout dont Rabat use tant que l'impunité lui est assurée au niveau du Conseil de sécurité qui, étrangement, semble se complaire à laisser perdurer la situation. Réagissant à l'appel de la nouvelle administration américaine, Guterres dit enfin juger essentielle la relance du processus de paix au Sahara occidental en appelant à accepter le prochain candidat qu'il compte proposer au poste d'envoyé personnel. Nul doute que le royaume marocain et son mentor au sein du Conseil de sécurité ont d'ores et déjà commencé à fourbir les armes pour faire capoter l'initiative, alors que les regards sont pour l'instant tournés vers la Cour de justice européenne (CJUE) qui doit statuer sur l'exploitation illégale du phosphate et des richesses marines du Sahara occidental par le Maroc et ses partenaires européens, au mépris du droit international. Pourtant, il y a urgence à ce que le Conseil de sécurité sorte, enfin, de sa torpeur, et dise haut et fort à la partie qui s'acharne à mettre des bâtons dans les roues de la Minurso, des décennies durant, que le temps est venu de se mettre sérieusement à la table des négociations. La preuve est là qui remonte à deux mois, à peine, lorsque le SG de l'ONU a proposé Staffan de Mistura comme envoyé personnel pour le Sahara occidental. Une proposition aussitôt acceptée par le Front Polisario mais vite refusée par le royaume marocain qui signifie, de ce fait, que le seul bon envoyé personnel de l'ONU sera celui qui adhère fiévreusement à sa thèse farfelue! Le Makhzen, dans son arrogance et sa stratégie du chantage, a même eu l'audace de fixer des conditions préalables au choix d'un envoyé personnel, excluant les pays scandinaves, l'Espagne, l'Australie et bien d'autres qu'il soupçonne de ne pas partager sa politique expansionniste. Il est heureux que le SG de l'ONU ait fait sa déclaration en Espagne, puissance administrante du Sahara occidental selon le droit international et membre du Groupe des amis de la RASD au sein du Conseil de sécurité de l'ONU. Madrid est ainsi appelé à assumer sa responsabilité juridique, politique et historique en faveur de la démarche onusienne que soutient activement l'Union africaine pour en finir avec la dernière colonie encore présente dans le continent africain.