Les réactions n'ont pas tardé, à l'annonce par l'Algérie, de la rupture de ses relations diplomatiques avec le Maroc. La France, les émirats arabes unis, la Ligue arabe, les Nations unies... L'Arabie saoudite et l'Egypte n'ont pas été en reste et ne se sont pas limitées aux communiqués d'usage. Ces démarches s'apparentent à une médiation visiblement sollicitée par Rabat qui ne s'attendait pas à la réaction cinglante d'Alger. Une série de provocations ont fait déborder le vase. Le Makhzen a été jusqu'à attenter à la stabilité du pays en provoquant des incendies qui ont fait 90 victimes, fomenté un cruel assassinat du jeune Djamel Bensmaïl et créé un grave précédent dans l'Histoire du Monde arabe en permettant à un officiel israélien de menacer l'Algérie à partir du sol marocain. Inédit depuis la création d'Israël en 1948. Le Maroc doit comprendre que la seule demande de médiation ne conduit pas automatiquement à la fin de la brouille. Les conditions qui ont mené à la crise doivent disparaître. L'Algérie est en droit d'exiger des garanties sérieuses sur la fin des agressions. Mais que vaut la parole marocaine et que vaut son engagement? La question est de mise, lorsqu'on sait les turpitudes du Palais royal. Au contraire de Rabat, il faut dire que dans cet épisode algéro-marocain, Alger a reçu un soutien clair de la part de la société civile, des partis politiques et du peuple et de nombreuses capitales. Leurs ministres des Affaires étrangères respectifs, ont appelé le chef de la diplomatie algérienne dans la foulée de cet événement qui a pris de court. Que disent-ils? «J'ai reçu un appel téléphonique de mon frère, Son Altesse l'émir Fayçal Ben Farhane Ben Abdallah Al-Saoud, durant lequel nous avons évoqué les relations bilatérales fraternelles et échangé les vues sur des questions régionales et internationales d'intérêt commun», a écrit Ramtane Lamamra sur Twitter avant d'enchaîner: «J'ai reçu un appel téléphonique de mon frère, Sameh Shoukry, ministre des Affaires étrangères de la République arabe d'Egypte durant lequel nous avons examiné les derniers développements sur la scène maghrébine et les moyens de renforcer l'action arabe commune.» S'il a été question de relations bilatérales et d'échanges de vues sur des questions d'intérêt commun, il faut souligner que les derniers développements de la situation sur la scène maghrébine, de la rupture des relations diplomatiques entre l'Algérie et le royaume du Maroc, a été inévitablement au coeur des discussions. Les appels téléphoniques reçus par le chef de la diplomatie algérienne laissent entendre, en effet, que des tentatives de médiation, qu'une mission de bons offices se dessine. Se dirige-t-on vers un axe Ryadh-Le Caire? Les deux coups de fil qui se sont succédé, en peu d'intervalle, en provenance de ces deux capitales, le laissent supposer en tout cas. Le ministre des Affaires étrangères saoudien, Fayçal Ben Farhane, a annoncé dans deux tweets quasi simultanés, vendredi 27 août, avoir eu des entretiens téléphoniques avec ses homologues algérien et marocain, rapportent des médias marocains qui indiquent que selon l'agence de presse saoudienne, «SPA», le chef de la diplomatie saoudienne, le prince Fayçal Ben Farhane Al Saoud, s'est entretenu au téléphone avec ses deux homologues marocain, Nasser Bourita, et algérien, Ramtane Lamamra. Si tel est le cas, il n'est pas exclu que le ministre des Affaires étrangères égyptien, Sameh Shoukry ait procédé de la même manière. Trop tôt, cependant, pour y voir une action concertée entre ces deux puissances du Monde arabe. Il faut rappeler que l'Arabie saoudite fut l'un des tout premiers pays à réagir à l'annonce de la rupture des relations entre l'Algérie et le Maroc. Le Royaume d'Arabie saoudite avait exprimé ses regrets «pour l'évolution des relations entre les frères du royaume du Maroc et de la République algérienne démocratique et populaire». Le patron de la diplomatie saoudienne avait, en ce sens, fait part de «l'espoir du Royaume de voir se rétablir les relations entre les deux pays dans les meilleurs délais». Ce qui est loin d'être acquis. Le Maroc a franchi le Rubicon, creusé un peu plus le fossé qui le sépare de la paix, en oeuvrant ouvertement à la scission de l'Algérie, par le droit à l'autodétermination de la Kabylie. Si l'on ajoute à cette entreprise funeste, les velléités d'annexion de certains territoires du Sud (Tindouf, Béchar) ainsi que la profanation de l'emblème national du consulat de Casablanca par un membre des «Jeunesses royalistes», le jour où l'Algérie célébrait le 59e anniversaire du déclenchement de sa Révolution, sans que le Maroc ne présente d'excuses officielles, on aura compris qu'il n'y aura pas de place pour la paix.