Définitivement amarrées à de grand projets économiques structurants, l'Algérie et la Chine ont affiché bonne mine, cette semaine. C'est le cas de le dire avec la création d'une nouvelle société dénommée Algerian Chinese Fertilizers Company (Acfc), détenue à 56% par la partie algérienne et à 44% par la partie chinoise. 7 milliards de dollars ont été mis sur la table dans ce partenariat entre les groupes algériens Asmidal (filiale de Sonatrach) et Manal d'une part, et les sociétés chinoises Wuhuan et Tian, d'autre part. Ce projet minier intégré qui fait jubiler les spécialistes du domaine minier est magnifique à plus d'un titre. De plus il vient concrétiser sur le terrain les propos du président Abdelmadjid Tebboune, selon lesquels 2022 sera celle du décollage économique, ensuite, il signe la fin d'une situation ubuesque qui n'a que trop duré. En effet, l'Algérie demeure l'un des rares pays au monde à vendre son phosphate brut sans aucune valeur ajoutée interne. Jusque- là, les 1,5 million de tonnes extraites dans nos mines sont revendues en l'état. Les devises et les produits de transformation partent à l'étranger et nous n'en gardons que les poussières dont on a débarrassé le minerai avant de l'exporter. C'est la société française Timac-Agro filiale du Groupe Roullier qui achète la grande partie de notre phosphate. Le manque à gagner est immense, l'Algérie ne peut plus se permettre le luxe de cette prodigalité dans une conjoncture économique où chaque dinar doit être soigneusement compté. Il fallait réagir et c'est ainsi que l'Algérie a fait appel à l'expertise chinoise. Le phosphate est généralement utilisé dans la fabrication des engrais. Actuellement la société Feriale, filiale de Sonatrach, produit environ 300000 tonnes d'engrais et nous importons bon an, mal an 100000 tonnes à raison de 100 à 120 millions de dollars. Le développement et l'exploitation du gisement Bled El Hadba et celui de Djebel Onk à la wilaya de Tébessa permettra à l'Algérie de traiter jusqu'à 10 millions de tonnes de minerais. Selon les estimations économiques, cette quantité rapportera 1,5 million de dollars uniquement dans le segment transformation. Une révolution, puisqu'au lieu de dépenser 120 millions de dollars dans l'importation des engrais, l'Algérie engrangera une enveloppe de 2 milliards de dollars. Il faut savoir qu'une tonne de minerai phosphate rapporte pour l'Algérie environ 100 dollars. Mais une tonne de phosphate traité coûte 5 fois plus. Appréciez donc le manque à gagner. Sans compter la valeur ajoutée inestimable que va générer ce projet. Il y a en premier les services des impôts qui doivent se frotter les mains et ils ont raison, puisqu'ils vont renflouer les caisses du Trésor public. Il y aura des rentrées en devises pour l'Etat qui seront tirées des exportations et enfin la création de 24 000 postes d'emploi direct et des milliers d'autres indirect. C''est l'aspect le plus important de ce mégaprojet qui concernera au moins quatre wilayas de l'est du pays où la densité populaire est très importante. L'actuel projet qui portera sur l'exploitation des gisements de phosphate de Bled El Hadba, celui de Djebel Onk, dans la wilaya de Tébessa, la transformation chimique des phosphates à Oued Kébérit, wilaya de Souk Ahras, la fabrication des engrais à Hadjar Soud, à Skikda et enfin des installations portuaires dédiées au niveau du port de Annaba. Il faut s'attendre à une réelle dynamique d'emploi qui permettra à la jeunesse de trois wilayas de l'Est de s'insérer dans le processus de l'intégration économique et sociale. Le projet permettra également de libérer le monde agricole très gros demandeur et consommateur d'engrais. C'est une donnée capitale en ces moments où l'équation de notre sécurité alimentaire est désormais posée sous l'angle de la souveraineté nationale. On a vu l'angoisse qui s'est saisie de pays menacés d'une rupture d'approvisionnement en blé du fait de la guerre en Ukraine. Sereinement et par petites touches, l'Algérie peut s'affranchir de la dépendance pétrolière. La machine économique est en marche. De pareils projets font renaître les grandes ambitions dont le pays a besoin.