Le chef de l'etat le compare à certains esprits lucides, à l'instar de Montesquieu, Machiavel, Vico, Comte, Hegel et Marx. Qu'a-t-on à dire aujourd'hui sur Ibn Khaldoun? Que reste-t-il à explorer de la pensée de ce géant après tous les travaux de recherche qui ont été effectués de par le monde? «Nous n'avons aujourd'hui qu'à saluer la mémoire de ce génie dont l'Algérie a été et pour longtemps la source d'inspiration», a indiqué le président de la République, hier, à l'hôtel Aurassi, lors de l'allocution prononcée à l'occasion de l'ouverture du colloque international sur la pensée et l'oeuvre d'Ibn Khaldoun. «En dépit des nombreux travaux de recherche consacrés à cet illustre penseur, la personnalité d'Ibn Khaldoun continue de susciter l'intérêt des historiens, philosophes et autres chercheurs», a ajouté le chef de l'Etat à l'ouverture de ce colloque organisé par le Centre national d'études et de recherches préhistoriques et anthropologiques, à l'occasion de la célébration du 6e centenaire de la mort de cet éminent savant. Aussi, ce colloque, dont la clôture est prévue pour demain, verra la participation de plusieurs historiens et chercheurs dans la pensée d'Ibn Khaldoun, algériens et étrangers notamment de Tunisie, du Maroc, d'Egypte, de France, d'Italie, de Malaisie et des Etats-Unis. Le sixième centenaire de la mort d'Ibn Khaldoun, faut-il le rappeler, a été célébré en grande pompe dans tous les pays du grand Maghreb et en Espagne. D'ailleurs, le président de la République a été convié, le 18 mai dernier à Séville, en Espagne, à l'inauguration de l'exposition consacrée à cet éminent savant. Ce savant qui a révolutionné toutes les théories sur les «vérités historiques» répandues en son temps. Et aujourd'hui, peut-on prétendre qu'on a tout dit et qu'on a étudié en profondeur la pensée khaldounienne? Certainement non. Car, «plus on avance dans l'exploration de la pensée de cet érudit, plus on découvre de nouveaux trésors que renferme cette pensée», a soutenu le président de la République. Celui-ci n'hésite pas, et à juste raison, à le comparer à certains esprits lucides, à l'instar de Montesquieu, Machiavel, Vico, Comte, Hegel et Marx qui ont fait de l'Europe, un fleuron de savoir et de science. Mieux, ils ont contribué efficacement à la libération de l'humanité du joug de l'Inquisition. Justement, les supplices et châtiments subis par Ibn Khaldoun tout au long de sa vie sont pratiquement les mêmes que ceux endurés par les philosophes et penseurs européens cités plus haut. Il est du devoir de l'humanité de reconnaître le mérite d'Ibn Khaldoun. «C'est grâce à lui que la science a pris le chemin de l'objectivité et de la méthodologie. Cette vérité, nous devrons l'accepter et l'admettre aussi bien au nord qu'au sud de la planète», a encore souligné Bouteflika. En ce sens, il n'est un doute pour personne que c'est Ibn Khaldoun qui a posé les fondements, non seulement, de la sociologie moderne mais encore de l'ensemble des sciences humaines. Ibn Khaldoun a soutenu que «la science n'est pas tributaire du climat ou délimitée par l'espace géographique. Le principe étant de faire un rapport entre les évènements passés et les relier à l'actualité tout en respectant l'enchaînement des évènements. Cela est vraiment une trouvaille qui a révolutionné l'écriture et la compréhension de l'Histoire loin des préjugés religieux. Ce fait, on peut l'appeler et à juste tire, la petite révolution», a signalé le président de la République. Ainsi, on peut le dire et sans rougir: Ibn Khaldoun a parlé du «Doute méthodologique», bien avant Descartes ; il a élaboré une nouvelle science, en l'occurrence la sociologie, bien avant Auguste Comte. «Après nombre d'années passées à voyager, et les évènements politiques qu'il a vécus, en tant qu'acteur et observateur, soit en Tunisie, en Algérie, au Maroc ou en Andalousie, Ibn Khaldoun a finalement décidé de s'installer à Tiaret où il a passé quatre ans et où il a écrit la majorité de son oeuvre dont son chef-d'oeuvre de tous les temps El Mouqadima. Un livre qu'il a écrit en cinq mois seulement», a fait remarquer le président Abdelaziz Bouteflika. Ainsi donc, si Ibn Khaldoun n'a vécu que 73 ans (il naquit en 1332 et mourut en 1406), il n'en demeure pas moins que sa Mouqadima restera l'une des énigmes devant laquelle les chercheurs restent incapables de «décoder» la totalité.