Après une campagne électorale largement plus discrète que celles des précédentes élections présidentielles, le rideau est tombé, hier, sur les douze candidats qui s'affronteront demain au premier tour, dont il semble qu'il va encore mettre en face- à- face le chef de l'Etat sortant, Emmanuel Macron, et sa rivale d'extrême droite, Marine Le Pen. C'est en tout cas ce que laissent supposer les sondages dont le tout dernier, sorti jeudi soir, indique que Macron serait vainqueur avec 52% contre 48% pour Marine Le Pen. Un remake, donc, du duel de 2017 qui a laissé une bonne partie de l'électorat français, à gauche comme à droite, sur sa faim. Viendrait en troisième position mais avec une longueur considérable le chef de file de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon qui a pourtant enregistré une progression régulière au cours des semaines écoulées, appelant les électeurs de la gauche au sens large à un vote «utile» qui lui assurerait la présence au deuxième tour. Le contexte sociopolitique et économique dans lequel intervient ce scrutin a ceci de particulier qu'il porte un niveau d'incertitude élevé. En effet, de nombreux électeurs se disent indécis, d'autres ont «changé d'opinion» et, selon les observateurs, ils seraient près de la moitié de l'électorat à balancer dans cet état d'esprit qui pourrait bouleverser la donne. À cela s'ajoute le taux d'abstention dont beaucoup prédisent qu'il va constituer un nouveau record. Il faut dire que la campagne a été sans relief, marquée par une entrée tardive du président sortant, en pleine bourrasque liée au conflit en Ukraine qui a quelque peu anesthésié les candidats. Il aura fallu ces derniers jours pour qu'un certain regain d'intérêt soit observé et que l'hypothèse d'une victoire spectaculaire de la candidate de l'extrême droite, qualifiée «candidate du Front national» par le président sortant, ne vienne provoquer un électrochoc. Ce serait, si tel devait être le cas, la première fois qu'une femme accéderait à la Présidence en France. Malgré une campagne nettement centrée sur le pouvoir d'achat, devenu la priorité absolue des Français confrontés aux conséquences du conflit en Ukraine, dont l'envolée des prix des énergies et de certains produits alimentaires, Marine Le Pen demeure le porte-étendard de certaines «valeurs» rétrogrades propres à une base électorale qui patauge dans la xénophobie et le racisme envers les immigrés, en général, et les musulmans, en particulier. Acculée sur ce terrain par son concurrent d'extrême droite Eric Zemmour, elle a policé son discours en direction des Français dont elle affirme partager les angoisses du pouvoir d'achat, mais il lui faut relativiser ses chances dans la mesure où les autres candidats du Parti communiste, Fabien Roussel, et de la droite traditionnelle, Valérie Pécresse, ont confirmé l'un qu'il «fera barrage à Mme Le Pen» et l'autre qu'elle «ne donnera pas de consigne de vote mais dira à qui ira son bulletin». Le silence règne, désormais, sur le scrutin jusqu'à demain soir, à 18 h GMT, le temps pour les 48,7 millions de Françaises et de Français de se prononcer.