Près de 24 000 Algériens ont participé aux essais nucléaires français et près du quart a été irradié, selon les chiffres du Commissariat à l'énergie atomique français (CEA). Selon ce rapport, établi sur les 210 essais nucléaires français réalisés entre 1960 dans le Sud algérien et 1996 dans l'île de Fangatoufa (Polynésie), principalement atmosphériques, 26% des Algériens habitant la zone de Reggane, soit 6.240 personnes entre autochtones et employés dans la zone touchée ont été en contact avec des éléments radioactifs dans le Sahara. Le CEA précise dans son rapport qu'il s'agit «de doses extrêmement faibles. Si l'on prend le seuil à partir duquel on peut commencer à avoir un risque de cancer». Mais l'étude précise que si deux cas de cancer ont été détectés au Pacifique, dernier site utilisé par la France pour ses essais nucléaires, 49 cas d'Algériens atteints de cancer ont été depuis détectés. En tout, 76.750 personnes ont participé aux essais nucléaires français depuis la première bombe H larguée par l'armée française dans le désert de Reggane, dans le Sud-Ouest algérien, le 13 février 1960. Les risques d'irradiation ont été longtemps ignorés, ou passés volontairement sous silence, pour que les victimes éventuelles ne réclament pas d'indemnités à l'Etat français. Or, un rapport parlementaire, publié cette semaine à Paris, est venu conforter l'idée que ces essais nucléaires atmosphériques effectués essentiellement en Algérie et en Polynésie «ne se sont pas réalisés sans prendre de risques humains». Depuis la publication de ce rapport, des «vétérans» des essais nucléaires français sont montés au créneau pour dénoncer le lien existant entre leurs problèmes de santé actuels et ces tests nucléaires. Plusieurs de ces «vétérans» se sont constitués partie civile pour demander réparation à l'Etat français. La justice française a immédiatement réagi en déboutant d'emblée les plaignants arguant qu'il n'y a pas de «rapports directs» entre ces essais français et les ennuis de santé de ces «cobayes». La justice leur demandant même d'exposer des «preuves scientifiques» quant à leur contamination, ce qui est pratiquement impossible pour les «vétérans» d'Algérie et du Pacifique. Or, le même cas s'est déroulé lorsqu'un nuage radioactif a traversé le sud-est de la France en 1986, après l'accident nucléaire de Tchernobyl et toutes les victimes françaises ont obtenu réparation de la justice russe. La députée écologiste française, Marie-Hélène d'Aubert, une des rares voix politiques françaises à se solidariser avec les victimes des essais nucléaires français, a demandé au gouvernement français la création d'une commission de suivi de ces personnes ainsi qu'un fonds d'indemnisation pour les personnes atteintes de pathologies graves tel le cancer. D'autres députés français n'ont pas trouvé mieux que de renvoyer la balle du côté des... Américains et des Soviétiques estimant que les effets provoqués par les essais français ont eu des «effets dérisoires» par rapport à ceux des Etats-Unis et de la Russie avant leur interdiction par des traités de l'ONU. Reste qu'en dépit de la diffusion des chiffres du CEA, aucune réaction officielle n'est venue d'Alger qui a, toutefois, dénoncé à maintes reprises les conséquences des essais nucléaires français sur les populations algériennes autour des sites d'explosion.