En revenant sur les lieux du suicide l'Expression a relevé des détails poignants. Près de soixante-douze heures après le drame qui a vu deux jeunes filles se donner la mort sur la voie traversant Réghaïa au lieudit Fâaoussi, l'Expression qui est revenu sur les lieux du suicide a relevé des détails poignants. L'on apprend en effet que les deux victimes vivaient une véritable misère morale durant les quinze derniers jours qui ont précédé la mise à exécution de leur acte fatal. Orphelines toutes les deux, particulièrement après le décès récent de leur père qui avait pris une seconde épouse, elles auraient connu une crise existentielle qui les aurait laissées envisager le pire. A priori, bien qu'étant toutes deux célibataires, la vie commune avec leur marâtre devenait impossible et aurait précipité leur geste désespéré. Pratiquement seules au monde, elles n'avaient pour seul parent immédiat qu'un frère unique, célibataire. Avec ce détail près que l'une des soeurs avait connu les déboires d'un divorce. Pour rappel, les deux femmes s'étaient mises en travers d'un train qui les aura toutes deux fauchées vers vingt et une heures quarante-cinq dans la soirée de vendredi dernier. Au moment des faits et selon les témoignages livrés par la Gendarmerie nationale de Réghaïa qui a désormais ouvert une enquête pour mieux élucider les circonstances de cette mort tragique, elles jouissaient d'une bonne réputation au sein de leur communauté, particulièrement dans leur travail. Nées respectivement en 1963 et en 1966, elles exerçaient une activité professionnelle régulière à l'APC de Réghaïa. Néanmoins l'on précise qu'un état émotionnel instable caractérisait leur comportement. Une observation qui s'appliquerait plutôt à l'aînée des soeurs que d'aucuns décriraient comme ayant été sujette à des «crises». A tel point que leur frère leur avait enjoint de consulter un psychiatre, praticien à Alger. Suite à quoi elles prenaient régulièrement un traitement en vue d'améliorer leur état nerveux. Traitement qui aura tout de même duré près d'une année jusqu'à leur ultime minute de vie. Vivant une situation sociale particulièrement instable et difficile, elles auraient développé une grande sensibilité au point de se laisser déstabiliser par le moindre aléa dont la vie regorge naturellement au quotidien. Toutefois la gendarmerie exclut toute hypothèse suggérant l'usage de psychotropes lors des faits. De fait, la détermination qu'elles ont développé pour mettre fin à leurs jours est évidente. D'abord elles auraient été vues le jour de leur suicide vers quinze heures guetter un train de passage, soit plus de sept heures pour ne périr qu'au-delà de vingt et une heures, à quelque cinq cents mètres de leur demeure de fortune située à la cité Ghazali, une sorte de bourg à mi-chemin entre Boudouaou et Réghaïa où constructions neuves et gourbis se mêlent dans un décor typique de cette banlieue de la capitale, cette ville qui arrive cahin-caha à se défaire de son étiquette de ville ceinturée par les bidonvilles et où les habitants doivent se battre avec un quotidien souvent difficile. Réghaïa aura ainsi connu son premier suicide depuis plus de cinq ans, du moins en ce qui relève de la compétence de la Gendarmerie nationale qui se charge d'éclaircir ce qui reste de zones d'ombre dans cette triste affaire où l'opinion retiendra pour longtemps les détails poignants d'un suicide atypique où durant les dernières secondes du drame l'on dit que les deux filles avant de se jeter sous la draisine se serraient très fort l'une contre l'autre. Alors que d'autres affinent encore plus ce détail et ajoutent que la cadette aurait tenté de se dégager des bras de sa soeur.