La Russie a récusé, hier, la responsabilité de la chute d'un missile sur un village polonais près de la frontière avec l'Ukraine, dont Varsovie elle-même a jugé «hautement probable» qu'il s'agissait d'un projectile antiaérien ukrainien, «un accident malheureux». Le missile a tué deux hommes dans le village polonais de Przewodow en frappant un bâtiment agricole mardi, laissant la Pologne sous le choc, son armée en état d'alerte renforcé, et faisant craindre une nouvelle escalade de la guerre en Ukraine. «Rien n'indique qu'il s'agissait d'une attaque intentionnelle contre la Pologne», a affirmé, hier, à la presse le président polonais Andrzej Duda. «Il y a une forte probabilité qu'il s'agisse d'un missile qui a simplement été utilisé par la défense antimissile ukrainienne», a-t-il poursuivi. C'est «probablement un accident malheureux, hélas», a-t-il ajouté. Il n'y a «pas d'indication d'une attaque délibérée» en Pologne, a déclaré de son côté le chef de l'Otan, Jens Stoltenberg. Les ambassadeurs des pays membres de l'Alliance atlantique se sont réunis en urgence, hier, à Bruxelles. Depuis Bali (Indonésie) où le G20 était réuni en sommet, le président américain Joe Biden avait lui aussi estimé «improbable» que le missile ait été tiré par la Russie. «Je vais m'assurer que nous puissions déterminer ce qu'il s'est passé exactement» avant de décider d'une réaction, avait-il ajouté à l'issue d'une réunion d'urgence, hier, des dirigeants des grandes puissances du G7 (Etats-Unis, France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Canada, Japon), en Indonésie, en marge du sommet du G20. Saluant la «retenue» de la réaction américaine, Moscou a indiqué que «les frappes de haute précision n'ont été menées que sur le territoire de l'Ukraine à une distance supérieure à 35 kilomètres de la frontière ukraino-polonaise», dans un communiqué du ministère russe de la Défense, selon qui «les débris retrouvés en Pologne «ont été identifiés de manière catégorique par des spécialistes russes (...) comme un élément d'un missile guidé antiaérien des systèmes de défense antiaérienne S-300 des forces armées ukrainiennes». «Toutes les destructions dans les quartiers d'habitation de la capitale ukrainienne (...) sont le résultat direct de la chute et de l'autodestruction des missiles antiaériens lancées par les forces ukrainiennes», a aussi ajouté Moscou. Mao Ning, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a appelé «toutes les parties concernées» à «rester calmes et faire preuve de retenue afin d'éviter une escalade». Le chancelier allemand Olaf Scholz a réclamé une «enquête minutieuse» et mis en garde contre les jugements «hâtifs», tandis que Paris a appelé à «la plus grande prudence», «beaucoup de pays» de la région disposant du même type de missile. Il est «absolument essentiel d'éviter l'escalade de la guerre en Ukraine», a exhorté le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, réclamant une «enquête approfondie». Côté ukrainien, le doigt est pointé vers Moscou. La frappe du missile en Pologne «n'est rien d'autre qu'un message de la Russie adressé au sommet du G20», a vite estimé le président ukrainien Volodymyr Zelensky par visioconférence devant les dirigeants réunis à Bali. La Pologne, qui a une frontière de 530 km avec l'Ukraine, est un leader régional en terme d'assistance militaire et humanitaire à son voisin oriental. Elle est membre de l'Otan et quelque 10000 militaires américains se trouvent sur son territoire. Le missile est tombé alors que la Russie menait mardi des frappes massives sur les infrastructures civiles ukrainiennes, qui ont laissé des millions de foyers sans électricité. Les missiles russes ont frappé des villes dans tout le pays, dont Lviv (ouest), près de la frontière polonaise.