La rencontre entre les USA et l'Afrique qui fait suite à l'initiative de l'ancien président, Barack Obama en 2014, s'est tenue du 13 au 15 décembre 2022, à Washington. Il faut la situer dans le nouveau contexte géostratégique mondial, avec des tensions à plusieurs niveaux interdépendants à la fois militaires politiques et socio- économiques ne devant pas oublier un facteur déterminant du XXIème siècle le facteur culturel qui influe à terme sur les décisions politiques et les échanges économiques. L'Algérie a été représentée par le Premier ministre, en sa qualité de représentant du président de la République. Cette rencontre fait suite à l'importante réunion des travaux de la 9ème Conférence de haut niveau sur la paix et la sécurité en Afrique à Oran-Algérie le 07 décembre 2022, celle de la Chine/ monde arabe, en Arabie saoudite 8/9 décembre 2022,elle a lieu au moment de fortes tensions géostratégiques dans le monde, préfigurant une nouvelle reconfiguration mondiale à la fois économique, sociale, culturelle et militaire entre 2023/2030.Nous assistons aux tensions en Ukraine, Russie /Occident, où le monde ne sera plus jamais comme avant, la Russie et l'Ukraine représentant 33% des exportations mondiales de denrées alimentaires, qui ont des incidences sur l'Afrique. La majorité des pays africains ayant opté pour la neutralité dans ce conflit, dont l'Algérie, des tensions en Asie USA/Chine concernant Taiwan, au Moyen-Orient le conflit israélo-palestinien, l'instabilité au Yémen sans oublier l'épineux dossier du nucléaire de l'Iran et des sanctions US, les remous dans bon nombre de pays africains et bien d'autres conflits en Amérique latine et au niveau du globe. Cette rencontre se tient au moment de la crise énergétique actuelle, dont les USA sont un des plus grands producteurs et exportateurs mondiaux de pétrole avec la Russie et l'Arabie saoudite, plus de 10 millions de barils/j ayant pénétré récemment le marché européen, (pétrole et gaz de schiste), de la décision récente du G7 plus l'Australie de plafonner le prix du pétrole russe par voie maritime à 60 dollars, et en février 2023 concernant les produits pétroliers, n'ayant de chance de succès que si ce plafond se rapproche de celui du marché. Les objectifs du Sommet Problème beaucoup plus complexe, le projet proposé par l'Union européenne pour 2023 de plafonner également le prix de cession du gaz, projet qui ne fait pas l'unanimité au niveau des pays européens. Comme conséquence de toutes ces tensions nous devrions assister pour 2023, selon le FMI et la Banque mondiale, à moins d'une baisse de toutes ces tensions, à un recul de la croissance de l'économie mondiale, notamment des deux poids lourds, la Chine et les USA avec une stagflation, combinaison d'une croissance faible et d' une inflation élevée avec des tensions sur le marché de l'emploi d'où des remous sociaux que les Etats essaient de ralentir l'inflation par la hausse des taux d'intérêts des banques centrales mais au risque de pénaliser la croissance ainsi que le recours à l'endettement public pour assurer la cohésion sociale, mais pénalisant les générations futures qui supporteront cet endettement. Cette rencontre se tient après celle sur le réchauffement climatique, en Egypte, qui risque d'avoir un impact important sur l'Afrique, responsable seulement de 3,8% des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde; et sur la biodiversité au Canada posant un véritable problème pour la sécurité des Nations, une pénurie d'eau et par voie de conséquence une crise alimentaire devant repenser toute notre système de production et de consommation. Qu'en est-il précisément des objectifs de la rencontre USA/Afrique? Il est utile de rappeler que sur le plan économique, le classement des pays par PIB, le top 10 des pays les plus riches au monde en 2022.à la première position du classement nous retrouvons les Etats-Unis dont le PIB s'élève à 24 796 milliards de dollars pour une population de 332 millions en 2022, la Chine 2ème position avec un PIB de 19 900 milliards de dollars mais pour 1,41 milliard d'habitants. Mais l'Europe, plus les USA pour moins d'un milliard de la population mondiale estimée à 8 milliards d'habitants en 2022, pèsent en termes de PIB courant, en 2022, plus de 40% de la richesse mondiale. Cette rencontre en préconisant l'adhésion de l'Afrique au G20, ainsi que dans d'autres institutions internationales, rentre dans la stratégie de contrecarrer la stratégie de «la route de la soie initiée par la Chine ainsi et que celle des Brics dont la Chine entend être le leader, voulant attirer certains pays africains et arabes. Récemment lors de la rencontre en Arabie saoudite, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, ayant récemment annoncé l'idée des «Brics Plus», un cadre qui résume cette intention d'ouvrir l'organisation à de nouveaux membres. Actuellement,les Brics avec la dominance de la Chine représentent en 2022, environ 25% du PIB mondial et plus de 45% de la population mondiale, sur 8 milliards dont des pays qui possèdent l'arme nucléaire la Russie, la Chine, l'Inde et le Pakistan. Si cette évolution se confirme avec l'entrée de bon nombre d'autres pays, cela devrait modifier fondamentalement les relations internationales, nous orientant vers un monde multipolaire. (voir contribution internationale professeur A.Mebtoul à AfricapresseParis 12/12/2022 sur les enjeux de cette rencontre). Des pays font une percée en Afrique comme la Turquie où le volume des échanges devrait atteindre 45 milliards de dollars en 2022, la Chine qui selon l'agence chinoise des douanes ont augmenté de 35,3% au cours de l'année 2021, atteignant un montant record de 254,3 milliards de dollars, en n'oubliant pas les échanges avec le monde arabe en 2021 de 330 milliards de dollars, extrapolé entre 2023/205 à 500 milliards de dollars, le poids encore important, mais déclinant de l'Europe selon les données du 1er janvier 2019 (avant l'épidémie du coronavirus) atteignait 151 milliards d'euros d'exportations et 152 milliards d'importations. L'Europe et les Brics Or, les échanges commerciaux entre les Etats-Unis et l'Afrique sont passés de 142 milliards de dollars US en 2008 à 64 milliards en 2021. Comme le reconnaissent les responsables US eux-mêmes, le cadre de la guerre d'influence qui se joue entre les deux plus importantes économies de la planète, la Chine a largement distancé les Etats-Unis en Afrique sur le terrain économique où les échanges commerciaux entre le continent et les USA durant ces dernières années n'ont cessé de se réduire comme peau de chagrin. Outre les raisons géostratégiques, afin de contrer la Chine et la Russie sur le plan économique, lors de cette conférence, les USA ont annoncé une première enveloppe de 55 milliards de dollars à étaler sur trois ans pour l'Afrique dans un grand nombre de secteurs, donnant la priorité à quelques industries spécifiques sur la base de certains critères tels que l'avantage comparatif du secteur privé américain dans des domaines comme l'industrie pharmaceutique, la santé, l'éducation, l'agriculture, les technologies numériques et l'enseignement supérieur, dans des minéraux essentiels pour l'énergie propre comme le raffinage et le traitement du lithium, du cobalt et du nickel tout en renforçant les garanties sociales et environnementales, et en impliquant la diaspora africaine aux Etats-Unis et les pays africains. Qu'en est-il maintenant du poids économique de l'Afrique face aux grandes puissances? L'Afrique est passée de 100 millions d'habitants en 1900, la population de l'Afrique est passée à environ 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990 et à 1,4 milliard en 2022 soit 18% de la population mondiale. Mais avec des disparités: Nigeria près de 212 millions, l'Egypte 102 millions, l'Afrique du Sud 61 millions, Ethiopie 99,7 millions, Algérie 45 millions, Maroc 36,3 millions, le Mali 21 millions et la Libye seulement 6 millions. Les projections de croissance de l'économie mondiale du FMI pour l'afrique dépendent d'une série d'hypothèses qui peuvent se réaliser ou pas, bonne gouvernance dont la lutte contre la corruption, réformes, sous-intégrations régionales, et stabilité politique et d'autres facteurs internes et externes. Comme devront être pris en compte la flambée ou la chute des cours des hydrocarbures, l'inflation, les découvertes de ressources naturelles, les crises, les catastrophes naturelles, les stratégies de développement, les appréciations et dépréciations des monnaies vis-à-vis du dollar/euro et les facteurs géostratégiques. Le commerce mondial a augmenté de 25% en rythme annuel en 2021 pour atteindre un record de 28.500 milliards de dollars et même si les exportations africaines de biens et services ont enregistré une croissance particulièrement rapide au cours des dix dernières années, elles représentent à peine 3% du commerce mondial, loin de ses importantes potentialités. L'Afrique est caractérisée par la faiblesse de son intégration qui est de l'ordre de 11/12% alors que le flux des échanges entre pays européens est de plus de 60%. Et l'Algérie dans tout ça? Selon des simulations reposant sur l'amélioration de l'efficacité des marchés des produits et du travail, de dégrèvements tarifaires progressifs, supposant des entreprises concurrentielles en termes de cout /qualités s'alignant sur les normes internationales, sa mise en oeuvre permettrait selon un rapport de l'OUA: de sortir 30 millions d'Africains de l'extrême pauvreté, d'augmenter les revenus de près de 68 millions d'autres personnes qui vivent avec moins de 5,50 dollars par jour; d'augmenter les revenus de l'Afrique de 450 milliards de dollars d'ici à 2035 (soit une progression de 7%). Sur les 450 milliards de dollars de revenus supplémentaires générés, 292 milliards proviendraient du renforcement des mesures de facilitation des échanges qui visent à lever les freins bureaucratiques et à simplifier les procédures douanières et d'accroître de 560 milliards de dollars les exportations africaines, essentiellement dans le secteur manufacturier. En conclusion, les USA considèrent l'Algérie comme un acteur de premier plan comme facteur de stabilisation de la région méditerranéenne et africaine et dans le lutte contre le terrorisme, entendant investir en Algérie, sous réserve de profondes réformes du ressort des seuls Algériens. Car, dans le domaine économique, les échanges commerciaux USA/Algérie sont loin des potentialités comme l'a reconnu le Secrétaire d'Etat US Anthony Blinken lors de sa dernière étape en région MENA, qui l' a conduit en Algérie où le commerce bilatéral entre les Etats-Unis et l'Algérie était d'un montant de 1,2 milliard de dollars en 2020, et pour 2021, ce chiffre a plus que doublé pour atteindre 2,6 milliards de dollars, espérant porter les échanges commerciaux à 6,1 milliards de dollars. En bref, et d'une manière générale, le devenir de l'Afrique, continent pivot du XXIème siècle, d'où les rivalités tant des grandes puissance que des nations émergentes avec un monde instable devant connaître de profonds bouleversements géostratégiques, qui seront, ce que les Africains voudront qu'il soit.