Alger et Paris n'ont plus de relations directes depuis le rappel par l'Algérie de son ambassadeur, en réaction à l'exfiltration de Amira Bouraoui par les services de renseignement français. Cette nouvelle ère de «glaciation» diplomatique qui s'annonce plus compliquée que les précédentes, n'empêche visiblement pas le pouvoir français de tenter une manoeuvre de disculpation des faits que l'Etat algérien retient contre lui. Cette tentative n'émane pas de l'Elysée, mais du ministère des Affaires étrangères. Ainsi après une première réaction pour le moins décevante, car contradictoire, concernant l'affaire Bouraoui, le 9 février dernier, le Quai a ressorti, ce jeudi, le dossier de la brouille avec Alger en commentant les propos de son ancien ambassadeur en Algérie, Xavier Driancourt. Ainsi, près de 40 jours après son entretien «lunaire» accordé au Figaro où il avait préconisé «l'effondrement de l'Algérie», un porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a soutenu que «les propos de M. Xavier Driancourt ne nous engagent en aucune manière». Répondant à une question de journaliste, lors d'un point de presse, le fonctionnaire a signalé que son pays «continue à travailler à l'approfondissement de sa relation bilatérale avec l'Algérie». Un propos relevant de la langue de bois, sachant l'état actuel des rapports entre les deux pays. Le porte-parole souligne, néanmoins, l'avancée historique constatée le mois d'août dernier et évoque «l'esprit de la Déclaration d'Alger». Adoptée par les présidents algérien et français le 27 août dernier à Alger lors de la visite d'Emmanuel Macron en Algérie, cette Déclaration mettait les bases d'un partenariat multiforme entre les deux pays, mais que la France a tout simplement violé en procédant à une «exfiltration clandestine et illégale d'une ressortissante algérienne dont la présence physique sur le territoire national est prescrite par la justice algérienne», comme la qualifie justement le ministère algérien des Affaires étrangères. L'évocation des relations algéro-françaises, par deux fois, depuis l'éclatement de la crise, en usant d'un vocable diplomatiquement optimiste, n'enlève rien à l'ampleur du mal causé à cette «relation bilatérale» que le Quai d'Orsay dit vouloir «approfondir». Cette relation que les présidents Tebboune et Macron ont patiemment construite, abattant tellement d'entraves et de tabous, est présentement très abîmée par les représentants des «résidus du colonialisme», comme les qualifie opportunément le président du Conseil de la nation, Salah Goudjil. Ces forces ont activé leurs barbouzes, histoire de donner suite aux propos haineux de leur «porte-voix», Xavier Driancourt, ainsi décrit par Salah Goudjil. On retiendra dans cette autre opération, qui consiste à se disculper de la part de la France, un silence pesant de l'Elysée, donnant une forte impression d'un échec intérieur. Et pour cause, logiquement on ne lance pas une opération d'exfiltration, aussi scandaleuse, quelques semaines après avoir dépêché à Alger son Premier ministre à la tête d'une délégation de 15 membres du gouvernement! L'avenir nous éclairera certainement sur le malheureux épisode de l'exfiltration. Mais en attendant, retenons que le pouvoir en France n'est peut-être pas là où on nous le dit. Lorsqu'il s'agit de l'Algérie, ce sont les «résidus du colonialisme» qui mènent la barque en définitive.