Israël n'a pas réalisé ses objectifs en déclenchant la guerre contre le Liban de l'aveu même d'Olmert. Le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, a menacé lundi de «poursuivre» les dirigeants du Hezbollah «en tout lieu et en tout temps» peu après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, reconnaissant en filigrane qu'Israël -contrairement à ce qu'affirment ses dirigeants- n'a pas atteint ses objectifs de neutraliser le mouvement islamiste libanais. Olmert a ainsi indiqué que «pour ces gens là, (les responsables du Hezbollah) il n'y aura aucun pardon. Nous continuerons à les poursuivre en tout lieu et en tout temps. C'est une obligation morale envers nous-mêmes, et nous n'avons pas l'intention de nous en excuser ou de demander une permission à qui que ce soit pour ce faire». Or, loin de l'avoir vaincu, ou même désarçonné, la guerre qu'a livré Israël au Hezbollah, lui a donné au contraire une notoriété internationale qu'il n'avait pas avant le début des hostilités par sa résistance et sa capacité à rendre les coups à l'armée israélienne mettant ainsi en échec, la plus puissante armée du Moyen Orient. Olmer revenant sur la question du désarmement du mouvement islamiste a déclaré hier qu'Israël considérait «le refus du Hezbollah de renoncer à ses armes» comme un «test» pour le gouvernement libanais et la communauté internationale dans l'application d'une résolution des Nations unies. Pourtant dans le domaine de l'inapplication des résolutions de l'ONU Israël -qui n'a jamais honoré aucune des résolutions du Conseil de sécurité, continuant notamment à occuper les Fermes de Chebaa au Liban, le Golan syrien et les territoires palestiniens- n'a à l'évidence de leçons à recevoir de personne lui qui est en fait orfèvre en la matière. Mais Israël crie au loup pour mieux faire oublier à la «communauté internationale» que l'Etat hébreu, hormis la résolution 181 de 1947 portant partage de la Palestine, n'a jamais daigné se plier au droit international ni aux recommandations des Nations unies ayant trait au contentieux du Proche-Orient dont le noeud gordien demeure l'occupation par Israël des territoires arabes. Aussi, Israël quoique qu'en disent ses généraux et ses politiciens a bel et bien été mise «pat» par les milices du Hezbollah. Un «match nul» qui n'est certainement pas à l'honneur de Tsahal, ci-devant invincible armée gardienne des «valeurs occidentales» en pays «barbares». En refusant, lundi de désarmer ses milices, Hassan Nasrallah, fait en réalité une analyse correcte de la situation: Israël ne l'a pas vaincu militairement ni diminué de ses capacités de résistance, met ainsi au pied du mur -pour d'autres raisons que ceux évoqués hier par Olmert- la communauté internationale, du fait que le pourquoi de la guerre demeure entier: l'occupation des fermes de Chebaa et la libération des prisonniers libanais détenus par Israël. Aussi, le problème, qui n'est pas aussi kafkaïen que cela, n'est pas dans l'existence du Hezbollah -qui n'aura plus sa raison d'être militaire si demain Israël applique toutes les résolutions ayant trait à l'occupation des fermes de Chebaa- mais bien dans l'intransigeance d'Israël comme la prétention de l'Etat hébreu de vouloir imposer son diktat à son entourage arabe. Par ailleurs, le fait qu'Israël n'a pas agi sans le feu vert des Etats-Unis est conforté par les déclarations du porte-parole du département d'Etat américain, Sean McCormack, et du président George W.Bush. M.McCormack déclarait hier que la résolution de l'Onu établissant l'arrêt des hostilités au Liban marque un «revers stratégique» pour l'Iran et la Syrie, indiquant: «Je crois qu'il est très clair que quand la résolution sera totalement appliquée ce sera un revers stratégique pour l'Iran, ce sera un revers stratégique pour la Syrie, parce que vous aurez un Liban démocratique et plus fort». De son côté, le président américain George W.Bush a affirmé lundi que le Hezbollah avait «subi une défaite» au Liban, mettant d'autre part en garde contre, selon lui, «l'ampleur» que pourrait prendre un tel conflit si l'Iran, soutien de l'organisation islamiste, «disposait de l'arme nucléaire» trahissant de fait ce qui l'obsède le plus en ce moment: le possible accès de l'Iran à la technologie nucléaire. De fait, M.Bush qui a estimé que «Le Hezbollah a subi une défaite dans cette crise» est quasiment le seul à faire une telle analyse quand l'ensemble des observateurs jugent qu'Israël n'est pas sorti vainqueur de sa confrontation avec le Hezbollah et M.Bush croit enfoncer le clou en affirmant que «la responsabilité des souffrances (au Liban et en Israël) incombe au Hezbollah» faisant l'impasse sur la réalité du terrain, se référant à la capture des deux soldats israéliens et ignorant délibérément la cause de cette capture induite directement par l'occupation par Israël d'une partie du territoire libanais. Or, n'est aveugle que celui qui ne veut pas voir et sourd celui qui ne veut pas entendre, Rôle peu glorieux que M.Bush joue au bénéfice d'Israël. Loin de partager la vision la gloriole des Etats-Unis et d'Israël qui crient victoire, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, revendiquait haut et fort hier la victoire sur Israël en estimant que son mouvement a remporté une «victoire stratégique et historique pour tout le Liban et la résistance» après l'arrêt des combats tout en refusant dans le même temps le désarmement de ses miliciens «de façon hâtive» affirmant «la question du désarmement ne peut être réglée de façon hâtive et sous la pression, elle doit être réglée par le dialogue entre Libanais». C'est cela l'échec d'Israël: désarmer le Hezbollah et le neutraliser. Hassan Nasrallah a aussi indiqué qu'«il s'agit d'une victoire stratégique et historique pour le Liban, tout le Liban, pour la résistance, et pour l'oumma, toute l'oumma» (chacun pourra traduire ce terme à sa convenance). De fait en lançant une guerre insensée contre le Liban Israël aura surtout contribué à confirmer le statut d'un Hezbollah devenu incontournable dans toute décision de paix concernant le Liban. C'est aussi celle-là la triste réalité pour les «part en guerre» israéliens et américains.