Une clause de l'ordonnance laisse au président une marge de manoeuvre considérable. Des signes évidents de nuisance, destinés à provoquer l'effet médiatique attendu, émanent de quelques groupes armés encore actifs. Des bombes artisanales ont explosé récemment du côté de Aïn-Taya, Tipaza, Boumerdès ainsi que des attentats contre des personnes dans le même cercle. Les effets de ces manifestations de violence n'ont pas été palpables chez les estivants qui ont continué à remplir les plages du centre, contrairement à ce qui a été rapporté par quelques journaux, notamment à Boumerdès où la plage n'a pas désempli. A l'approche de la date du 31 août, le débat a repris sur tous les fronts. L'Alliance présidentielle a été la première à se manifester, en rendant public un communiqué, signé par Boudjerra Soltani qui assume la présidence tournante, et qui demande franchement le respect des délais impartis par l'ordonnance portant application de la Charte pour la paix et la réconciliation, tout en rappelant la marge de manoeuvre accordée au président de la République par le texte adopté par les deux chambres du Parlement. Le Parti des travailleurs (PT) s'est prononcé pour le prolongement des délais afin de donner plus de chance aux «négociateurs», de convaincre les groupes armés encore hésitants, de revenir au droit chemin et mettre un terme définitif à la violence physique qui continue, hélas, de faire couler le sang. La même démarche est soutenue par Islah, avec ses deux ailes. L'Organisation nationale pour la réconciliation et l'amnistie, présidée par Noureddine Smaïl, a demandé le report au-delà de l'échéance du 31 août «afin de permettre la réalisation de la paix totale et globale, l'éradication des racines de la violence et de l'intolérance de la société algérienne», dans un communiqué rendu public hier. Le même texte adresse une critique acerbe aux «rancuniers qui gesticulent sous le prétexte de délais de la Charte pour détruire ce qui a été réalisé». Sur le terrain, on note un déploiement des troupes de l'ANP dans les zones où subsistent encore des poches de nuisance. Elles concernent les wilayas du centre-est (Boumerdès, Bouira et Tizi-Ouzou) et Tipaza au centre-ouest. Il s'agit des derniers groupes du GSPC qui sévissent et dont le nombre est estimé à une centaine de personnes, selon les recoupements des chiffres repris par la presse. Rappelons qu'au tout début, lors de l'adoption des deux ordonnances portant application de la Charte, il était question de reddition de Mokhtar Belmokhtar et de Hassan Hattab. Les informations qui ont circulé à ce moment-là évoquaient l'existence de négociations intenses. Mais, depuis, rien n'a filtré sur les négociations en cours ou leur interruption. Il y a eu quelques redditions mais peu spectaculaires. On n'est plus au temps de la Concorde civile où les nombreux hommes armés revenaient en masse à la société qu'ils avaient quittée dans des moments d'hésitation, de pression, de peur ou de haine. Ces temps sont révolus. Plus rien ne justifie leur présence dans les maquis. Deux versions s'affrontent, cependant. La première consiste à envoyer les troupes et à les débusquer, à les faire sortir de leurs trous et à en finir de manière radicale. La seconde, émanant de la classe politique et de la société civile, se veut plus tolérante. Connaissant la capacité de nuisance des groupes armés, malgré la réduction incontestable de leurs effectifs, on veut épargner à la société des deuils supplémentaires. La décision est entre les mains du président et des négociateurs. Le président dispose des éléments d'information nécessaires pour prendre la bonne décision. La classe politique n'est pas unanime sur le sujet. Chacun a sa vision des choses. Mais ils se rejoignent tous -ou la plupart- sur la nécessité de tourner la page, sans trop de violence.