Israël préparait hier une invasion terrestre dans le nord de la bande de Ghaza, pilonnée sans relâche depuis huit jours, pour parachever la politique expansionniste du gouvernement le plus à droite de son histoire récente.»Nous sommes déployés le long de la bande de Gaza avec nos forces terrestres, nous nous préparons pour la prochaine étape de l'opération», a affirmé hier un porte-parole de l'armée sioniste, Jonathan Cornicus. Il a sommé les Gazaouis vivant dans le nord du territoire -environ 1,1 million de personnes sur une population totale de 2,4 millions- à «fuir» vers le sud au plus vite, tout en accusant le Hamas, qui s'oppose à cette évacuation, de ne pas «laisser les gens» partir. Israël prétend cibler la ville de Ghaza, déjà dramatiquement détruite par ses raids aériens ininterrompus, pour y détruire le centre des opérations du mouvement islamiste palestinienne. Hier matin, des colonnes de fumée noire s'élevaient au dessus de la ville et de nombreuses carcasses éventrées de ses immeubles. Plus de 1.300 personnes ont été tuées en Israël lors de l'attaque des commandos du Hamas et environ 150 prises en otage. L'armée sioniste, qui a jusque-là identifié 120 personnes enlevées, a annoncé avoir retrouvé lors d'incursions dans le territoire «des cadavres» d'otages. Le Hamas a fait état de 22 otages tués dans les frappes aériennes de l l'ennemi. L'agression israélienne a tué plus de 2.300 personnes, dont plus de 700 enfants, dans la bande de Ghaza, un territoire pauvre et fait plus de 9.042 blessés, selon les autorités locales. Des dizaines de milliers d'habitants de Gaza ont déjà gagné le sud, selon le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), et tentent d'y trouver abri, nourriture et eau. Au total, plus de 423.000 Ghazaouis ont dû quitter leur foyer depuis le début des frappes, selon l'ONU. A Rafah, dernière localité avant l'Egypte, des familles entières s'entassent dans une école des Nations unies, sur des matelas à même le sol. Plus au nord, dans la cour de l'hôpital Nasser, à Khan Younès, se pressent des milliers de déplacés. «C'est un désastre, il n'y a rien à manger, nous ne savons pas où dormir, nous ne savons pas quoi faire et où aller», raconte Juma Nasser, un quadragénaire. Cette évacuation massive, et la perspective d'une offensive terrestre dans un territoire surpeuplé, désormais placé sous un strict siège, suscitent critiques et inquiétudes au sein de la communauté internationale. Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait réclamé un accès humanitaire «immédiat» à cette petite bande de terre, soumise à un blocus israélien depuis plus de 15 ans et désormais privée d'alimentation en eau, électricité et nourriture. Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a lui assimilé un tel «déplacement» à une «deuxième Nakba» («Catastrophe», en arabe), en référence à l'exode de quelque 760.000 Palestiniens à la création en 1948 de l'Etat d'Israël. Face au «risque d'embrasement régional», les Etats-Unis ont annoncé samedi l'envoi d'un second porte-avions en Méditerranée orientale. L'ambassade des Etats-Unis en Israël a aussi annoncé hier que les ressortissants américains pourraient être évacués aujourd'hui par bateau du port israélien de Haïfa (nord) vers Chypre. La crainte d'une extension du conflit à la frontière nord d'Israël avec le Liban concentre les visées. Une personne a été tuée et d'autres ont été blessées hier dans le nord d'Israël par des tirs en provenance du Liban, a indiqué l'armée sioniste, précisant avoir frappé le territoire du pays voisin en «représailles». Elle a fermé la zone frontalière aux civils. Le Hamas a indiqué hier la mort de trois combattants infiltrés. L'armée sioniste a aussi frappé samedi soir à l'artillerie la Syrie après des alertes aériennes dans la partie du plateau du Golan occupé depuis 1967. Les Etats Unis ont appelé samedi la Chine, partenaire de l'Iran, à user de son influence pour une désescalade. Le président brésilien Lula et son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sisi se sont eux accordés sur la nécessité d'autoriser l'entrée d'aide humanitaire d'urgence à Ghaza. L'Egypte contrôle la seule ouverture de Gaza qui ne soit pas sous contrôle israélien, le point de passage de Rafah, actuellement fermé. L'aide humanitaire arrivée de plusieurs capitales s'y empile, dans l'attente. Le conflit a coûté jusque-là la vie à 10 journalistes, dont sept tués à Ghaza et au Liban. Le 7 octobre à l'aube, en plein Shabbat, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré Israël à bord de véhicules et par les airs depuis Ghaza. Ils ont tué plus d'un millier de réservistes, semant la terreur sous un déluge de roquettes lors de cette attaque d'une ampleur inédite depuis la création d'Israël en 1948. Le conseiller à la sécurité nationale du gouvernement sioniste a reconnu samedi des «erreurs» des services de renseignement en amont des attaques.