Le plan Orsec ayant montré ses limites et la pluie se faisant toujours désirer, les walis sont appelés à la rescousse pour trouver des solutions. La pénurie d'eau est suffisamment préoccupante pour que le Chef du gouvernement songe à réunir en urgence les walis pour débattre du problème de l'eau et trouver, en commun, les solutions qu'il faut. On verra sûrement participer à la réunion de samedi prochain les ministres directement concernés: des Ressources en eau, des Travaux publics, de l'Industrie et de l'Agriculture, c'est-à-dire tous les secteurs qui sont chargés de la mobilisation et de la gestion de l'eau, ou bien par la construction des barrages et retenues collinaires, les grands utilisateurs et consommateurs comme l'Agriculture et l'Industrie, auxquels il sera demandé de faire un effort pour réduire la consommation et mettre un frein au gaspillage. Participeront également à cette conférence les spécialistes, les techniciens, et les cadres dont l'avis sera certainement précieux pour définir les opérations prioritaires à mettre en oeuvre, car malheureusement, on n'a plus beaucoup de temps à perdre pour dégager des solutions à ce problème épineux. Le plan Orsec va ainsi passer à un autre stade. C'est là le grand SOS eau! C'est aussi l'occasion de faire le bilan des actions menées par la cellule de crise mise en place en janvier dernier par le Chef du gouvernement. Présidée par le ministre des Ressources en eau, cette cellule, composée des représentants des départements ministériels et des établissements publics concernés, a pour mission d'assurer une prise en charge efficace et rapide des opérations du plan d'urgence aux niveaux technique, administratif et financier. La sémantique même des mots choisis pour parler de la pénurie est révélatrice du seuil critique atteint par la situation : cellule de crise, réunion d'urgence. Ces mots eux-mêmes ne sont que le reflet d'une crise réelle que les citoyens vivent au quotidien, eux qui sont soumis au rationnement et à l'application d'un plan Orsec draconien. Et on assiste même à des scènes qui auraient été cocasses si elles n'étaient pas dramatiques, comme ces eaux usées qui s'infiltrent dans les canalisations d'eau potable, mettant les autorités dans l'obligation d'alimenter la population par camions-citernes. Mais l'indicateur le plus éloquent de la crise de l'eau en Algérie est le recours, pour la première fois, aux usines de dessalement de l'eau de mer. Rien que dans une première étape, trois projets ont été retenus, les appels d'offres faits, les soumissions réceptionnées, et on a procédé aux ouvertures des plis. On en parle depuis les années 80, mais leur coût exorbitant a toujours découragé les plus hautes autorités du pays. Si elles disent oui aujourd'hui, c'est que la situation est vraiment critique. Bien sûr, les autorités vont, une fois de plus, pointer le doigt vers la pluviométrie, et ces mauvaises conditions climatiques qui s'acharnent sur l'Algérie. Mais la nature a bon dos, même si elle n'est pas toujours responsable de la bêtise des hommes. Car la bêtise des hommes aussi doit être montrée du doigt. Jugez-en. Contrairement à ce qui a été affirmé, l'Algérie a consenti des investissements énormes pour la mobilisation de l'eau, mais des défauts techniques (comme l'envasement) ou le choix de la taille des projets ont rendu les efforts de l'Etat inopérants. Les variantes sont aujourd'hui nombreuses et les spécialistes ne manqueront pas de les énumérer, comme la possible importation, sous toutes ses formes, de l'eau potable d'Europe, du Canada ou de Turquie, ou l'interdiction d'irriguer les cultures de la Mitidja à partir des forages. Mais ce ne sont que des palliatifs pour répondre à une situation d'urgence, et il faudrait un plan à long terme pour que l'Algérien ait de l'eau à son robinet vingt-quatre heures sur vingt-quatre et douze mois sur douze.