La salle de cinéma Ibn Zeydoun à Riadh El Feth a abrité samedi dernier, en soiré, l'avant-premiere du long métrage Fouroulou d'après le célèbre livre Le fils du pauvre» de Mouloud Feraoun. Une projection timide n'ayant pas drainé grand monde, faute de communication note-t-on. Réalisé par Ali Berkennou, d'après un scénario coécrit avec Rachid Smaïli qui affirma avoir voulu « montrer ce qu'ont vécu nos parents », ce film plutôt inspiré du livre éponyme, retrace la vie d'un nombre de villageois dans les rudes montagnes de Kabylie durant la période de colonisation française. Fouroulou est un petit garçon qui va à l'école, contrairement à ses sœurs. Il est choyé par la famille qui veut qu'il étudie pour bien apprendre à lire, du moins jusqu'à l'obtention de son certificat. Le garçon, lui, aspire à poursuivre ses études à l'aide d'une bourse…En attendant ce sésame, son père, plus fataliste, souhaiterait que son fils l'aide dans le travail des champs et du bétail. Son père étant pauvre n'arrive pas à joindre les deux bouts. Il hypothèque même son bout de terrain qu'il a en héritage. Il finit par partir travailler en France, comme beaucoup avant lui. Avec un peu d'argent en poche, il rentre au village et espère vivre un peu mieux, bien qu'il sache qu'il a de nombreuses bouches à nourrir…Au-delà de cette vie de misère apparente, le film d'Ali Berkennou aborde d'autres sujets, tels l'exil des hommes en France, le désert affectif des femmes restées seules, qui finissent parfois par devenir folles ou encore le patriarcat et son pendant, le pouvoir des hommes sur celui des femmes et le manque de soins, notamment des femmes qui accouchent et qui finissent par mourir…. Une image fortement symbolique est celle montrant des hommes en haut d'un terrain lors de l'enterrement de cette femme, alors que toutes les femmes et jeunes filles demeurent en bas. La condition précaire de ces villageois, doublée de la souffrance psychologique des femmes, renforce la trame de ce long métrage qui, hélas, se noie dans une certaine mise en scène bien délétère, voire bancale. Les plans- séquences semblent aussi perdre de leur profondeur en raison de la théâtralité de quelques personnages, bien que d'autres parviennent à sauver la mise grâce à leur maîtrise dans l'interprétation. On pense à la comédienne qui campe le rôle de la mère de Fouroulou ou encore de sa tante, la formidable actrice Louisa Nehar. Lors de la présentation du film, le réalisateur n'a pas cessé de répéter que le film a été fait avec peu de moyens, ce qui expliquerait son manque de consistance cinématographique ; qui est loin d'égaler le roman qui raconte le destin de Fouroulou Menrad, cet homme-enfant, de parents pauvres, qui, destiné à être berger, mais mu par une forte ambition et des rêves omniprésents, luttera sans cesse pour échapper à son destin. Ici dans ce film, le garçon n'est pas vraiment ce vaillant personnage qui se sacrifie pour sa famille. Il est plutôt un enfant gâté qui n'apprend même pas ses sœurs à lire, mais les éloigne de ses livres. Il est plutôt passif, même si l'avenir de la famille semble reposer sur ses épaules en le poussant à aller à l'école. L'on sent en tout cas, nettement, le traitement de faveur qui lui est dû, a contrario de ses sœurs, toujours acculées dans les tâches ménagères, alors que lui joue avec ses amis…. Néanmoins, l'on ne peut que saluer cette juste tentative qui a essayé Mouloud Feraoun, en espérant qu'il y ait plein d'autres, comme l'a suggéré la comédienne Louisa Nehar. Un film qui a donné aussi corps au patrimoine amazigh de Kabylie à travers des images et des traditions séculaires bien ancrées dans le quotidien des gens de la montagne et ce, de façon fidèle, à travers les us et coutumes, habits, apparats et architecture de ces régions…