Carte blanche a été donnée, dimanche dernier, à Danièle Maoudj, une femme de tête, de père kabyle et de mère corse. A la veille de la clôture de cet événement majeur qui se tient actuellement dans la ville des Zianides, la Maison de la culture de Tlemcen continue de s'activer et ses soirées s'animent de mille feux, dans une ambiance bon enfant et chaleureuse. Même si d'aucuns attestent de la richesse du programme, cette année, le bémol à retenir serait le manque de consistance peut-être des ateliers, qui sont, cette année, intitulés séminaires. Et pour cause, ceux-ci s'apparentent à de véritables cours magistraux de haute qualité informative, certes, mais qui hélas ne drainent pas la foule. La théorie, cette année, est exempte de pratique, à quelques exercices près, exception faite pour les petites qui apprennent à connaître l'appareillage de prise de photos et l'atelier de critique cinématographique. Au 4e jour du festival, il est donné carte blanche à Danièle Maoudj, poète et aussi professeur à l'université de Corse, coordinatrice des Actes de tables rondes, pour penser le mythe et le sacré, stimuler les coproductions dans les cinématographies d'Europe, de la Méditerranée et d'Amérique latine. Dans Tra u Djudjura é Bavedda (Entre les montagnes du Djudjura et celles de Bavella), de Marie Pierre Valli (documentaire, de 26 minutes, 2001,Corse), c'est une Danièle Maoudj, femme de combat qu'on découvre, «née pour aimer la vie», comme elle le dit dans ce film documentaire qui lève le voile sur une femme de père kabyle et de mère corse, élevée dans un Paris rancunier. Dès la communale de la Bastille, à l'appel de son nom algérien, elle s'expose à la question: d'où vient-elle? La question des origines est posée. Corses et Algériens connaissent le rejet, certes à des degrés différents et pas comparables. Elle vit en marge de la République. Elle s'initie à la position de tiers, héritée de sa mère. De retour en 1974 dans le pays de sa mère, la Corse qu'elle a mythifiée, et qui connaît une réappropriation de son identité, Danièle est actrice de la vie culturelle et, notamment, cinématographique, c'est à travers le cinéma qu'elle mène la quête de la médiation culturelle entre la Corse et la Kabylie, la France et l'Algérie, voire entre l'Europe et l'Amérique latine, soucieuse de la dimension universelle et humaniste. Elle a été cofondatrice, en 1982, du Festival du fiklls des cultures méditerranéennes et en 1986, du Collectif antiraciste Ava basta (maintenant ça suffit) et en 1994, coordinatrice du programme d'études européen visant à stimuler les coproductions cinématographiques entre l'Amérique latine, la Méditerranée et l'Europe, le programme Almecin. Elle prend, aujourd'hui, conscience que les idées de mort gagnent férocement les âmes anémiées, parfois même celles qu'elle croyait plus éclairées. Sensible à la pensée nomade menant vers les multiples interrogations de l'origine de son chemin, l'initie-t-elle à imaginer, qu'il est l'heure «de stimuler le nerf du mot», pour dévoiler la blessure. Ecrire, pour voyager dans les contrées de l'existence, où la rencontre avec l'Autre offre les accents aux mille et un parfums...Ecrire pour inventer un amour continu. Ecrire pour alerter des effets destructeurs des restes d'une ambiance de la société française et de la Corse. Ce sont là, les propos de Danièle Maoudj, femme exceptionnelle...Son documentaire met, également, en exergue la problématique de trahison et ou de double culture que ressentent les émigrés. Sorte de déchirement dû à ce déracinement. Une souffrance due à l'exil. Un thème développé dans le documentaire de Nanache Saïd, dans les âmes de l'exil décliné sous un angle féminin et de voir comment les femmes ont vécu le départ de leurs proches...Un film très touchant, d'ores et déjà, ressenti pour remporter l'Olivier d'or de ce festival. L'autre film apprécié par le public, présenté dimanche dernier, est Slimane Azem, une légende de l'exil de Rachid Merabet (un documentaire de 52 minutes, 2005). Un film témoignage sur ce grand chanteur de l'exil dont l'oeuvre s'est surtout exprimée en France. Enfin, s'agissant des films entrant dans le cadre de la télématique corse, il a été aussi présenté Nous deux d'Henri Graziani avec comme acteurs principaux, Philippe Noiret et Monique Chaumette. Ce film raconte l'histoire de ce couple, de retour dans leur village natal en Corse. Un film où le paysage est sublime et se fait acteur, rappelant fortement celui de la Kabylie. Des similitudes frappantes qui ne laisseront personne indifférent. Pour l'anecdote, le film de Azzedine Meddour, La Colline oubliée a failli être tourné en Corse.