Il affirme que les traites escomptées par ses soins étaient garanties par la Banque commerciale industrielle d'Algérie. En l'absence des deux accusés principaux, le tribunal criminel d'Oran ouvre, au deuxième jour du procès, le bal des auditions en faisant appel, en tête du peloton, à l'ex-directeur de l'agence n°74, Adda Larbi, accusé d'avoir escompté de fausses traites avalisées par la Bcia. Le président du tribunal, Achaâchi Abdelouahab, va dans le vif du sujet en rafraîchissant la mémoire de l'accusé par des dates et faits bien précis. C'était aussi une opportunité pour l'accusé de se disculper en déclarant, d'emblée, son innocence du fait que les traites escomptées par ses soins étaient garanties par la banque commerciale industrielle d'Algérie et que le règlement intérieur de la BEA lui donne le quitus d'agir de la sorte. Surtout que ces transactions apportent des bénéfices à la banque. «Mais on devait faire une enquête spéciale sur les traites qui sont de l'ordre de 4 milliards de dinars qui ont mis 12 jours pour qu'elles atterrissent dans nos bureaux», c'est anormal, dira-t-il. L'accusé, qui se montre déjà, aux premières questions du juge, à la fois, rassurant et rassuré, appuyé par Me Mokrane Aït Larbi, s'est alors lancé dans l'affirmative, en reconnaissant avoir ordonné les opérations visées, mais dans un cadre juridique et conformément au règlement intérieur de la BEA l'autorisant à valoriser son fonds de commerce et gagner, à travers ces pratiques, des bénéfices. D'ailleurs, tout le monde est au courant, y compris les directions générale et régionale qui «m'ont félicité et récompensé». «Lorsque j'escompte des traites, j'écris à la hiérarchie et je ne cache rien. L'escompte des traites a existé au sein de la BEA avant que je prenne les destinées de l'agence. Sauf qu'aujourd'hui, tout le monde jette son dévolu sur ma personne en ma qualité de directeur alors qu'il y a six contrôleurs qui travaillent dans le même bureau qui nient être au courant d'aucune information.» L'ex-directeur demande une confrontation pour confirmer ses dires. L'autre point soulevé par l'accusé est la manière avec laquelle a été effectuée l'expertise financière qu'il qualifiera d'un procès avant son jugement devant le tribunal, notamment au sujet des bons de caisse que l'expertise a jugé illégaux, alors que la mission de l'expertise est d'ordre technique. La pratique d'escompte est simulée par le fait qu'elle apporte des bénéfices à la banque (10,5% par transaction). Le juge est intéressé beaucoup plus par le parcours du mis en cause dans les institutions financières et le rythme des escomptes des traites qui augmentent à partir de l'année 2000. Retraçant son parcours, l'accusé fera état de traites escomptées qui varient d'un mois à l'autre et qui sont de l'ordre, parfois, de 2 milliards de dinars, 3 milliards de dinars et 500 millions de dinars, et les bilans sont aussitôt transmis à la Banque d'Algérie. Les conditions exigées pour entretenir de telles transactions à court terme (trois mois), il suffit d'avoir au préalable un crédit garanti par une institution bancaire, tel a été le cas d'Addou Samir de la société Sotrapla (au box des accusés) qui a bénéficié d'un montant de 130 milliards de centimes garantis par la Bcia qui assume toute seule ses responsabilités. Ayant laissé le temps qu'il faut à l'accusé, le juge procède ensuite à l'interrogatoire du mis en cause sur les mesures prises à l'encontre du même Addou Samir qui a émis auprès de sa banque des chèques impayés. Et devant cet état de fait, on devait informer la hiérarchie. Pis encore, cette même personne a eu à bénéficier d'un montant de 130 milliards de centimes. L'ex-directeur de l'agence 74 de Medioni signalera que quand il y a des chèques impayés, des mesures sont prises. Il signalera avoir convoqué le concerné et en présence du directeur régional, il lui a été signifié que la BEA pourra cesser de lui escompter des traites, on lui a recommandé de ne plus émettre de chèques.