Sujet à interprétation, la candidature de ce qu'il est convenu d'appeler les repentis n'est pas du tout évidente, et pour cause... Les élections législatives du 17 mai sont attendues par la classe politique pour trancher une question cruciale pour l'avenir de l'exercice démocratique en Algérie. Il s'agit de la question relative à la participation ou non des politiques ayant activé sous la bannière de l'ex-FIS durant le début des années quatre-vingt-dix et qui ont été derrière la crise politique majeure vécue par le pays. La promulgation de la Charte pour la paix et la réconciliation, adoptée par le peuple algérien par voie référendaire avec une majorité écrasante (97,36%), a permis de sortir le pays du cycle infernal de la violence en accordant le pardon à toute personne ayant été liée aux actes terroristes. La détermination des Algériens à retrouver la paix et la stabilité, indispensables à toute vie normale, s'est manifestée par une adhésion totale au projet présidentiel qui n'a jamais signifié l'oubli de la tragédie nationale et ses conséquences sur la société entière. La réconciliation nationale, même avec ses insuffisances, a permis aux Algériens de préserver l'essentiel, à savoir la vie des citoyens à travers l'arrêt de l'effusion du sang et la diminution de niveau de la violence terroriste. La plaie est encore ouverte pour exiger plus et situer les responsabilités et demander des comptes. Mais il reste tout de même un point important qui n'a pas été définitivement tranché même si, au regard de la loi, rien n'a été laissé en suspens: la participation ou pas des anciens activistes de l'ex-FIS à l'animation de l'activité politique. Cette question s'impose du fait que les textes de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale laissent toute latitude au chef de l'Etat «en vertu du mandat qui lui est conféré par le référendum du 29 septembre 2005 et conformément aux pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution» de prendre, à tout moment, «toute autre mesure requise pour la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale». (art. 47.) Ce qui laisse tout de même une lueur d'espoir aux militants dits modérés de la mouvance du parti dissous de se présenter aux échéances électorales. La pratique de la chose politique, durant le second semestre de l'année 2006, a été riche en rebondissements qui ont fait naître chez les citoyens l'idée de pouvoir voir un jour, les figures emblématiques de l'ex-FIS reprendre du service. C'est le cas par exemple, du retour d'exil de l'ex-chef de la délégation de l'ex-FIS à l'étranger, Rabah Kebir, qui a été reçu par les officiels du gouvernement, dont l'actuel chef de l'Exécutif, Abdelaziz Belkhadem, avant de faire la tournée de quelques médias de la presse écrite. Avant lui, Madani Mezrag l'ex-chef de l'AIS, bras armé du FIS dissous, a été entouré d'un intérêt particulier de la part des autorités algériennes, jusqu'à l'entendre dire qu'il se présentera dans la liste du FLN lors des prochaines élections. Une offre de service qui en dit long sur les tractations en cours à l'époque entre les officiels et les éléments influents de la mouvance islamiste mise au banc des accusés. Ces derniers n'ont jamais accepté le sort qui leur est réservé par les textes de la Charte de la réconciliation nationale. La polémique suscitée autour de la création d'un parti politique islamiste «soft» avait fait du chemin avant de voir le ministre de l'Intérieur intervenir pour rappeler à tout le monde les limites à ne pas franchir. Même le MSP, parti de la coalition présidentielle, n'avait pas évacué l'idée d'un enrôlement de cadres de l'ex-FIS au sein de ses rangs pour les porter candidats aux élections. Mais à chaque fois, le gouvernement se voyait obligé de se référer à l'article 26 de l'ordonnance n°06-01 du 28 moharram 1427 correspondant au 27 février 2006, portant mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale qui stipule clairement que «l'exercice de l'activité politique est interdit, sous quelque forme que ce soit, pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale. L'exercice de l'activité politique est interdit également à quiconque, ayant participé à des actions terroristes refuse, malgré les dégâts commis par le terrorisme et l'instrumentalisation de la religion à des fins criminelles, de reconnaître sa responsabilité dans la conception et la mise en oeuvre d'une politique prônant la violence contre la nation et les institutions de l'Etat.» Le dernier mot revient au président de la République pour trancher la question, d'autant plus que la classe politique craint une abstention massive des Algériens lors du prochain scrutin. Le 17 mai sera l'occasion de mettre fin à la polémique et lancer le débat politique sur de nouvelles bases.